Au Royaume-Uni, Gary Lineker compare le projet de loi immigration à « l’Allemagne nazie »

Gary Lineker dénonce le nouveau projet de loi du gouvernement britannique qui prévoit un durcissement de sa politique migratoire.
Gary Lineker dénonce le nouveau projet de loi du gouvernement britannique qui prévoit un durcissement de sa politique migratoire.

ROYAUME-UNI - « Mon dieu. C’est au-delà de l’horreur. » Voici la réaction de l’ex-footballeur et désormais célèbre présentateur de la BBC Gary Lineker après avoir visionné mardi 7 mars la vidéo de la ministre de l’Intérieur britannique qui vante son nouveau projet de loi sur l’immigration.

Sur ces images, la ministre Suella Braverman se met en scène sur fond noir, avec une musique sombre. « L’année dernière, plus de 45 000 personnes ont fait un voyage dangereux, inutile et illégal à travers la Manche. Notre système d’asile a été submergé. Nous dépensons désormais 7 millions de livres par jour en hôtel », explique-t-elle. Elle assure que sa priorité est de stopper les bateaux qui tentent la traversée.

Interpellé sur les réseaux sociaux après son premier message, Gary Lineker a insisté : « Il n’y a pas d’afflux massif. Nous accueillons beaucoup moins de réfugiés que les autres grands pays européens. C’est juste une politique absolument cruelle dirigée contre les personnes les plus vulnérables dans un langage qui n’est pas différent de celui utilisé par l’Allemagne dans les années 30. »

Ce mercredi 8 mars sur la BBC, Suella Braverman a réagi aux propos véhéments du journaliste. « Je suis bien sûre déçue. Je pense que comparer nos mesures qui sont légales, proportionnelles et pleines de compassion, à l’Allemagne des années 1930 n’apporte rien. Je pense par ailleurs que nous sommes du côté du peuple Britannique ici. Il est clair que les Britanniques en ont marre de cette situation », a-t-elle assuré.

Downing Street a également regretté les propos de Gary Lineker, qu’il juge « inacceptables », rapporte la BBC. Le bureau du Premier ministre ne s’est toutefois pas exprimé sur un possible licenciement de Gary Lineker. « C’est à la BBC d’agir », a estimé un porte-parole de Rishi Sunak. Le groupe audiovisuel public a promis d’avoir une « conversation franche » avec lui.

Gary Lineker veut défendre ceux « qui n’ont pas de voix »

Pour sa part le journaliste n’a pas l’intention de s’arrêter là. Dans de nouveaux messages publiés ce mercredi, il s’est réjoui de voir que « la liberté d’expression ressort vainqueur ». « Je n’ai jamais vu autant d’amour et de soutien dans ma vie que ce matin », a-t-il ajouté, en assurant qu’il allait « continuer de s’exprimer pour ces pauvres âmes qui n’ont pas de voix ».

À noter que Suella Braverman est connue pour ses propos polémiques sur l’immigration. Elle a notamment utilisé le mot « invasion » pour parler des réfugiés, ce qu’une survivante de l’Holocauste n’a pas manqué de lui faire remarquer lors d’une intervention publique.

Ce mercredi, elle a également été épinglée par des syndicats qui lui reprochent d’avoir écrit dans un communiqué que des « fonctionnaires gauchistes » empêchaient de freiner l’arrivée des bateaux de migrants. Le leader de l’union des fonctionnaires FDA, Dave Penman, réclame des excuses.

En tout cas, cette loi n’inquiète pas que l’ancien footballeur. Mercredi, le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme s’est dit « profondément inquiet ». « Une telle interdiction générale empêchant les personnes de demander l’asile et d’autres formes de protection internationale au Royaume-Uni serait en contradiction avec les obligations du Royaume-Uni en matière de droits humains et de droit des réfugiés », a réagi Volker Türk.

« La législation soulève également plusieurs problèmes spécifiques en termes de droits humains, notamment la violation du droit à un examen individuel et l’interdiction du refoulement et des expulsions collectives, ainsi que la détention arbitraire des immigrants ». La veille, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés avait accusé Londres de vouloir « mettre fin au droit d’asile ».

Rishi Sunak défend le texte

« C’est précisément parce que nous voulons aider les personnes les plus vulnérables dans le monde (...) que nous devons faire en sorte que notre système ne soit plus exploité et dépassé par les migrants illégaux », a pourtant martelé au Parlement Rishi Sunak face aux attaques de l’opposition. « Arrêter les bateaux n’est pas que ma priorité, c’est la priorité des Britanniques », a-t-il ajouté.

Avant lui, Suella Braverman, tenante d’une ligne dure sur l’immigration, s’était employée à répondre aux critiques : « Ce n’est pas raciste de dire que nous avons trop d’immigrants illégaux qui abusent de notre système d’asile ».

Le gouvernement se dit « confiant » sur le fait que son texte est compatible avec le droit international. Mais dans une lettre rattachée au projet de loi, il reconnaît ne pas pouvoir confirmer totalement que le texte respectait la Convention européenne sur les droits de l’homme.

Sunak va rencontrer Macron

Rishi Sunak, qui a fait du contrôle de l’immigration une de ses priorités, s’est dit prêt à mener la bataille légale autour du texte afin de « reprendre le contrôle de nos frontières une fois pour toutes ».

Il est attendu vendredi en France pour rencontrer le président français Emmanuel Macron, quelques mois après la signature d’un accord entre Londres et Paris visant à renforcer leur coopération dans la lutte contre l’immigration clandestine. Londres plaide notamment pour que les migrants déposent leur demande d’asile dans le premier pays sûr qu’ils atteignent.

L’an dernier, plus de 45 000 migrants sont arrivés au Royaume-Uni par la Manche sur de petites embarcations, et plus de 3 000 depuis le début de l’année. La traversée est périlleuse, et en novembre 2021, au moins 27 personnes sont mortes lors d’un naufrage, pire drame migratoire enregistré dans la Manche.

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