Au Liban, les Adoon, un surprenant duo de folk en langue phénicienne

Revenir aux sources de la musique ancestrale du pays du Cèdre et y puiser une certaine tonalité caractéristique aux Phéniciens et Cananéens qui ont habité cette terre [dans l’Antiquité], pour en faire le noyau dur de leurs compositions contemporaines. “L’idée nous trottait dans la tête depuis des années. Il a fallu le Covid et le temps libéré par le confinement pour que nous puissions la concrétiser”, affirme Tony El-Khoury à L’OLJ. Designer de son, chanteur et joueur de luth, il a ainsi lancé il y a deux ans, avec son acolyte Youssef Helayel, guitariste et professeur de musique, un band de musique folk d’inspiration phénicienne qu’ils ont baptisé Adoon.

“Il s’agit de notre transcription personnelle du mot phénicien Adon qui signifie “seigneur” et désigne l’un des plus importants dieux cananéens, devenu chez les Grecs le mythique Adonis”, précisent-ils. C’est aussi le titre de la chanson qu’ils viennent de sortir en préambule à tout un album en… phénicien.

Un hyme à la déesse de la fertilité

Pour ce tout premier morceau, déjà disponible sur YouTube et Spotify, le duo de jeunes musiciens de 28 et 29 ans, aussi passionnés par l’histoire antique de la région que par la musique folk, a choisi de s’inspirer directement de la plus ancienne mélodie connue, qui remonte à 1400 av. J.-C.

Il s’agit de l’Hymne à Nikkal (désigné aussi sous le code h.6) adressé à la déesse de la fertilité, qui fait partie d’une collection de 36 chants hourrites [Les Hourrites sont un ancien peuple originaire des montagnes de l’est de l’Anatolie] gravés en inscriptions cunéiformes sur les fameuses tablettes d’argile d’Ougarit. Et dont des fragments ont été découverts au cours du siècle dernier lors de fouilles entreprises dans cette ancienne cité cananéenne, que l’on peut situer de nos jours à Ras Shamra, sur la côte méditerranéenne syrienne, à 10 kilomètres au nord de Lattaquié.

Cet hymne, qui nous est parvenu de manière quasi complète, est considéré comme le plus ancien exemple connu de notation musicale du monde. “Il a été décrypté en 1950 par le musicologue Richard Dumbrill, auteur du livre L’Archéomusicologie de l’Ancien Proche-Orient [inédit en français]. Et c’est sur la base de son interprétation que nous avons procédé à sa dissection mélodique pour en reprendre la gamme et l’échelle des notes dans notre morceau Adoon en ajoutant aux instruments anciens que sont la lyre, le luth, l’aulos [flûte double], le qanun [à cordes pincées] et les cymbales des sonorités contemporaines de guitare, basse et percussions électroniques”, indiquent les jeunes musiciens, qui ont eu recours à une dizaine d’instrumentistes pour l’enregistrement de ce premier titre.

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