Au Canada, un émoji “pouce levé” peut valider un contrat

Selon des documents judiciaires dont le contenu est rapporté par CBC, un acheteur de grain de South West Terminal, en Saskatchewan, a envoyé en mars 2021 un texto à plusieurs fermiers de la province pour leur faire savoir que sa compagnie cherchait à acheter 86 tonnes de lin. L’acheteur, Kent Mickleborough, a ensuite contacté directement un agriculteur local, Chris Achter. Il lui a envoyé la photo d’un contrat pour une livraison devant être effectuée en novembre, en indiquant : “Veuillez confirmer le contrat pour le lin.” M. Achter a répondu avec un émoji “pouce levé” [👍]. Mais l’entreprise n’a pas reçu la marchandise au moment prévu.

Le plaignant a argué devant un tribunal saskatchewanais avoir passé plusieurs contrats avec cet agriculteur, qui avait pour habitude de les confirmer par texto “et honorait toujours les commandes”. Mais Chris Achter a répondu que l’émoji signifiait seulement qu’il avait accusé réception de la commande.

Une nouvelle réalité juridique

Dans sa décision rendue en juin, poursuit CBC, le juge Timothy Keene a tenu compte du fait que les deux hommes faisaient affaire ensemble depuis dix ans. Il a statué que les émojis étaient désormais couramment utilisés, que celui du pouce levé “répondait aux exigences de signature et que, par conséquent, l’agriculteur avait rompu son contrat”. Il a condamné M. Achter à payer au plaignant un dédommagement de 82 200 dollars canadiens (56 320 euros).

Un avocat spécialisé dans la résolution de différends complexes, Jason Lee, approuve le jugement. Les communications numériques, affirme-t-il à CBC, sont les mêmes que d’autres formes de communication : “Vous êtes engagé par ce que vous écrivez.”

“C’est une décision intéressante, parce qu’au Canada c’est la première fois qu’une telle question se pose”, déclare à La Presse Vincent Gautrais, avocat spécialisé en droit du commerce électronique qui enseigne à l’université de Montréal.

Il précise que le droit a intégré la nouvelle réalité des preuves électroniques. Un avocat québécois en droits des affaires, Simon Chénard, avertit : “Il vaut mieux être clair dans ses communications pour s’assurer d’éviter des ambiguïtés.”

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