Attention à ce faux article de presse annonçant un projet de loi américain sur le 11-Septembre

Les attentats jihadistes du 11-Septembre 2001 aux Etats-Unis ont causé la mort de près de 3.000 personnes après la destruction des tours du World Trade Center à New York par deux avions de ligne détournés. La responsabilité du groupe islamiste Al-Qaïda, largement documentée, est néanmoins régulièrement remise en cause. Depuis le mois d'avril, des internautes s'inquiètent qu'un article semblant venir du New York Post fasse état d'un projet de loi prêt à être voté par le Congrès américain et rendant illégal tout questionnement autour des événements portant sur le 11-Septembre. C'est faux : le Congrès n'examinait en mai 2024, aucune législation de la sorte, et le New York Post a indiqué à l'AFP n'avoir jamais publié cet article.

"Le Congrès envisage de voter un projet de loi qui criminaliserait la remise en question des événements entourant le 11 septembre 2001", assure une publication reprise sur Facebook, X en français et en anglais.

Ce texte s'accompagne d'une image reprenant la charte graphique du journal américain New York Post avec le titre en anglais "le Congrès va voter une loi qui criminaliserait les questionnements autour des événements sur le 11-Septembre". 

<span>Capture d'écran prise sur X le 06/05/2024</span>
Capture d'écran prise sur X le 06/05/2024

"Avec le soutien de l'AIPAC - American Israel Public Affairs Committee, un lobby pro-israélien - et de l'ADL - Anti-defamation League, principale organisation de lutte contre l'antisémitisme aux Etats-Unis-, le Congrès s'apprête à voter un projet de loi qui criminaliserait toute remise en question des événements qui ont eu lieu lors des attentats du 11-Septembre", peut-on lire sur le visuel, qui montre aussi une photo des tours en feu le 11 septembre 2001.

Toujours selon cette publication, la législation envisagée prévoirait une amende de 10.000 dollars et une peine de cinq ans d'emprisonnement pour toute personne qui "remettrait en question ou contesterait le récit officiel" des attaques du 11-Septembre.

Théories complotistes sur le 11-Septembre

Le 11 septembre 2001, deux avions détournés se sont écrasés sur le World Trade Center et un autre sur le Pentagone à Washington lors d'attaques orchestrées par le groupe islamiste Al-Qaïda, faisant 2.977 morts au total et près de 6.300 blessés selon un bilan officiel.

Dans ces gratte-ciel, 2.753 personnes ont perdu la vie ce jour-là, dont au moins 343 pompiers qui y sont intervenus.

Un quatrième avion s'est écrasé dans un champ en Pennsylvanie après que les passagers se sont battus avec les pirates de l'air.

Ces attaques, qui ont donné lieu à une enquête fédérale nourrie de preuves (lien archivé ici), ont aussi été largement documentées par les médias du monde entier, et par exemple racontées ici par un journaliste de l'AFP en poste à New York à ce moment-là.

L'événement a provoqué "le plus grand nombre de décès causés par une attaque étrangère sur le sol américain" à ce jour, rapporte le site du musée et mémorial américain sur le 11-Septembre (lien archivé ici).

<span>Un avion détourné va s'écraser sur les World Trace Center le 11 septembre 2001.</span><div><span>SETH MCALLISTER</span><span>AFP</span></div>
Un avion détourné va s'écraser sur les World Trace Center le 11 septembre 2001.
SETH MCALLISTERAFP

Plus de vingt ans après, ces attaques font néanmoins régulièrement l'objet de théories conspirationnistes, qui se heurtent à la réalité des images et témoignages. Plusieurs médias ont écrit des articles démystifiant ces théories infondées, comme ici Le Monde (lien archivé ici) et France 24 (lien archivé ici) en 2021, ou encore l'équipe anglophone de l'AFP (1234) ces dernières années.

De nombreux internautes continuent néanmoins de soutenir que ces attaques n'auraient jamais eu lieu, que le gouvernement américain les auraient lui-même orchestrées ou qu'aucun avion n'aurait été impliqué dans les attentats.

Pour autant, le Congrès américain n'envisage pas, à ce jour, de législation sanctionnant ces théories.

Pas de projet de loi

Une recherche menée le 1er mai 2024 au sein de la base de données en ligne du Congrès américain (lien archivé ici) montre que la Chambre des représentants et le Sénat examinent actuellement 12 propositions de loi portant sur les attentats du 11-Septembre au cours de la session 2023-2024. Parmi elles, une proposition visant à élargir l'éligibilité à des services de santé aux premières personnes à être intervenues après l'effondrement des World Trade Center et une autre prévoyant le versement de fonds au Mémorial et musée national du 11 septembre (liens archivés ici et ici).

<span>La famille de victimes des attentats du 11-Septembre rendent hommage devant le mémorial dédié, à New York, le 11 septembre 2022</span><div><span>YUKI IWAMURA</span><span>AFP</span></div>
La famille de victimes des attentats du 11-Septembre rendent hommage devant le mémorial dédié, à New York, le 11 septembre 2022
YUKI IWAMURAAFP

Aucun des projets de loi ou des résolutions examinés ne mentionnent des sanctions visant ceux qui remettraient en cause les conclusions de l'enquête sur les attentats.

Les porte-parole de l'American Israel Public Affairs Committee (AIPAC), et l'ADL, deux organisations citées sur la capture d'écran, ont tous deux indiqué à l'AFP n'avoir pas soutenu une proposition de loi allant dans ce sens.

Un faux article

L'image qui accompagne les publications, reprenant la charte graphique du New York Post, est "clairement fausse", et l'article "ne provient pas" du journal, a en outre réfuté auprès de l'AFP Iva Benson, porte-parole du média.

Elle a précisé que les signatures et l'image d'illustration provenaient d'un article publié le même jour, le 26 avril, mais sans rapport.

Les quatre mêmes auteurs sont cités dans l'article  initial (lien archivé ici) publié en ligne le même jour et à la même heure, mais qui relatait, avant d'être modifié, l'annulation par un tribunal new-yorkais de la condamnation du producteur hollywoodien Harvey Weinstein en 2020 (lien archivé ici).

Les différences de charte graphique trahissent également le fait que l'image n'est pas authentique.

Sur la fausse capture d'écran, le titre est écrit en majuscules, la police ne correspond pas à celle habituellement utilisée dans les articles publiés en ligne par le New York Post et aucun lien hypertexte de couleur rouge, comme généralement utilisé, n'apparaissent. En outre, aucune des publications en ligne qui partagent la capture d'écran ne mettent de lien vers un article complet du journal.

<span>Captures d'écran d'un authentique article du site du New York Post à gauche en comparaison avec la fausse capture d'écran partagée en ligne à droite pour mettre en avant les différences de typographie.</span>
Captures d'écran d'un authentique article du site du New York Post à gauche en comparaison avec la fausse capture d'écran partagée en ligne à droite pour mettre en avant les différences de typographie.

L'AFP a vérifié plusieurs autres publications copiant la charte graphique de médias américains, britanniques, canadiens ou français pour en usurper l'identité et véhiculer de fausses informations.