Alerte sur les stocks de sperme, le nombre de donneurs de gamètes diminue pour la première fois

Les dons de spermatozoïdes sont « insuffisants » alors que la demande de PMA a explosé depuis la modification de la loi. Ce qui rallonge encore les délais d’accès.

PROCRÉATION - Le nombre de donneurs de sperme a reculé en 2023. C’est ce que révèlent des chiffres de l’Agence de la biomédecine, dévoilés par 20 Minutes ce mardi 2 juillet et consultés également par Le HuffPost. Selon les résultats de l’enquête de suivi de mise en œuvre de la loi de la bioéthique, le nombre de candidats au don de gamètes est passé de 714 en 2022 à 676 en 2023 (alors que le don est ouvert à tous les hommes âgés de 18 à 44 ans). Il s’agit du premier recul depuis l’ouverture de l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes seules et aux couples de femmes en 2021.

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Ce chiffre « reste insuffisant » pour répondre à une demande toujours croissante de PMA en France, alerte l’Agence de biomédecine dans un communiqué. « Au moins 1 400 donneurs par an, donc deux fois plus qu’à présent, seraient nécessaires pour répondre à la forte demande », appuie Marine Jeantet, directrice générale de l’Agence de la biomédecine, auprès de 20 Minutes. Une demande qui, selon elle, a été multipliée par 8,5 depuis 2021, une « hausse sans précédent ».

« Près de 35 000 demandes de première consultation pour une AMP (assistance médicale à la procréation, nouveau nom de la PMA, ndlr) avec don de spermatozoïdes ont été recensées de la part de couples de femmes et de femmes seules, dont près de 13 000 sur l’année 2023. Une tendance qui se stabilise par rapport à l’année 2022, qui a comptabilisé 15 000 demandes de première consultation », note l’agence publique nationale de l’État. En 2023, plus de 8 500 premières consultations ont été réalisées.

L’Agence de la biomédecine possède bien un stock de gamètes de donneurs anonymes. Mais ces réserves de sperme congelé, issues de dons réalisés sous l’ancienne législation, qui rendait possible l’anonymat du donneur, ne pourront plus être utilisées après le 31 mars 2025. Depuis 2022, les donneurs de sperme doivent consentir à la divulgation future de leur identité aux enfants qui naîtront de ce don, si ceux-ci la demandent une fois adultes. Une réforme qui avait pour objectif de faciliter « l’accès aux origines personnelles ».

Le stock de dons dit « ancien régime », qui comptait 32 543 paillettes – conditionnements pour échantillons biologiques de petit volume permettant de conserver des petites doses de sperme congelé – à fin mars 2024, sera détruit. Seuls les stocks de gamètes issus de donneurs ayant consenti à l’accès à leurs origines pourront être distribués. Ce nouveau stock comptait 52 305 paillettes au 31 mars 2024.

Ce nombre insuffisant de gamètes pèse fortement sur les personnes souhaitant avoir recours à une PMA : en 2023, le délai moyen de prise en charge pour une AMP avec don de spermatozoïdes était de 15,5 mois au niveau national, contre 14,4 mois en 2022. « Des campagnes d’appel au don de sperme ont été lancées ces dernières années, sans que cela ne crée un réel mouvement », alerte l’Agence de la biomédecine.

Si l’opinion française progresse sur ce sujet, moins d’un Français sur quatre (23 %) interrogé s’estime bien informé sur le don de gamètes, selon le baromètre annuel de l’Agence de la biomédecine, réalisé avril 2024. Et les jeunes de 18-24 ans se montrent plus en retrait que le reste de la population : moins informés, moins favorables et donc moins prêts à donner.

La levée de l’anonymat freinerait 33 % des hommes interrogés à donner leurs gamètes. Mais ce chiffre est stable, selon Marine Jeantet, de l’Agence de la biomédecine : « Nous n’avons pas observé de baisse de don lorsque l’anonymat a été levé en 2021. Les donneurs le savent, accès à ses origines ne vaut pas parentalité. Le droit est très clair. »

L’enfant devenu majeur ne peut pas réclamer que son géniteur le reconnaisse. « Souvent, ils ont juste besoin de savoir à qui ils ressemblent ou de poser des questions sur leurs prédispositions génétiques », assure Marine Jeantet auprès de 20 Minutes.

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