À quoi servirait l'inscription de l’IVG dans la Constitution ?

Photo d'illustration (Photo by Geoffroy Van der Hasselt / AFP)

Plusieurs partis ont déposé des propositions de loi pour inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution, celle des Insoumis a été adoptée à l'Assemblée ce jeudi.

C'est un des rares sujets qui peut réunir les voix des Insoumis, de la majorité et du RN. L'inscription du droit à l'Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) dans la Constitution est débattu à l'Assemblée nationale dans le cadre d'une proposition de loi des députés Insoumis.

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Un sujet également défendu par la majorité et les députés du Rassemblement national, malgré un revirement spectaculaire sur le sujet. Renaissance et LFI se sont d'ailleurs entendus sur une formulation commune pour l'inscription du droit à l'IVG dans la Constitution, à son article 66.

Une majorité de députés suffirait à revenir sur l'IVG

Aujourd'hui, si une majorité de députés le décidaient, ils pourraient modifier la loi Veil et ainsi revenir sur le droit à l’avortement, c’est possible. L'idée de constitutionnaliser le droit à l'IVG est évoquée depuis la décision prise par la Cour suprême américaine de revenir sur le droit à l'avortement, permettant aux États américains de décider d'interdire ou non l'IVG sur leur sol.

Dans une tribune parue dans le JDD en juin dernier, plus de 400 avocats appelaient à constitutionnaliser l'IVG suite à la décision américaine, rappelant qu'"en France, le droit à l’avortement est protégé par la loi du 17 janvier 1975 que l’on doit à Simone Veil. Les récentes élections législatives nous rappellent que les équilibres politique sont ­fragiles, et que cette loi pourrait être un jour menacée".

"Dans la Constitution, cela rend impossible une suppression par le législateur"

Mais très concrètement, dans l'éventualité où le droit à l'IVG finit par être inscrit dans la Constitution française, "sur un strict plan juridique, cela ne changera rien au niveau du droit d'accès à l'avortement", assure le professeur Bertrand Mathieu auprès de La Croix.

En revanche, l'effet recherché par les Insoumis serait atteint, en cas d'entrée dans la Constitution, comme le confirme Gwenaëlle Calvès, professeur de droit à l'Université de Cergy, "Si le droit à l’avortement est inscrit dans la Constitution, cela rend impossible une suppression par le législateur, c'est-à-dire qu'on ne pourra plus abroger la loi Veil".

Aucune modification de la Constitution n'a abouti

La menace sur l'IVG n'est toutefois pas d'actualité, comme rappelle Anne Levade, professeure de droit public à l'université Paris-1-Panthéon-Sorbonne. "Le droit à l'avortement est établi depuis la loi Veil de 1975, complétée à neuf reprises en vue de faciliter les conditions d'accès à l'IVG (...) À la différence des États-Unis, où, depuis des décennies, l'avortement est l'objet de débats souvent violents opposant pro-life et pro-choice, il n'est pas de formation politique qui, en France, propose de revenir sur la loi du 17 janvier 1975, quand bien même certains responsables politiques ont pu se dire “à titre personnel” défavorables à l'IVG, écrit-elle sur le blog du club des juristes.

Si le chemin pour faire entrer le droit à l'IVG dans la Constitution est long, l'en faire sortir le serait tout autant. Il faudrait, comme le précise l'article 89, que l'Assemblée et le Sénat approuvent le même texte au mot près puis que le changement soit voté par referendum. Un chemin d'autant plus compliqué qu'aucune modification de la Constitution sous la Ve République n'a jamais abouti.

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