50 ans du périphérique de Paris : Quel avenir pour l’autoroute urbaine la plus empruntée d’Europe ?

Le boulevard périphérique, autoroute urbaine de 35 km autour de Paris, a ouvert le 25 avril 1973.
Le boulevard périphérique, autoroute urbaine de 35 km autour de Paris, a ouvert le 25 avril 1973.

MOBILITÉ - 50 ans que le « périphérique intérieur » et le « périphérique extérieur » rythment les bulletins d’informations routières sur les ondes. Ouvert le 25 avril 1973, cette voie rapide de 35 km autour de Paris se retrouve, un demi-siècle plus tard, à veille d’évolutions majeures. Les enjeux de réduction de la pollution atmosphérique et des nuisances sonores rendent inéluctable une transformation du boulevard périphérique, dont la saturation et les embouteillages sont par ailleurs chroniques.

Loin des promesses de campagne iconoclastes – telle qu’une fermeture pure et simple comme l’envisageait l’éphémère candidat aux municipales Gaspard Gantzer –, quelle voie le boulevard périphérique va-t-il emprunter les prochaines années ? On fait le point sur les orientations en cours pour cette voie qui représente plus de 1 million de trajets par jour.

Voie réservée

Si le « périph » n’a pas connu d’évolution majeure depuis son ouverture en 1973 – à l’exception de l’abaissement de la vitesse maximale à 70 km/h en 2014 –, il devrait connaître une petite révolution dans les mois à venir. À quelques jours du 50e anniversaire de cette autoroute urbaine, la maire PS de Paris Anne Hidalgo a lancé une consultation publique sur les modalités d’accès à une voie réservée pour les transports en commun et le covoiturage. Les Franciliennes et les Franciliens ont jusqu’au 28 mai pour donner leur avis sur les conditions de pérennisation de cette voie qui sera instaurée pour la circulation des athlètes des JO de Paris 2024.

« L’idée, c’est de commencer la transformation d’une autoroute urbaine qui est héritée d’une vision ancienne de la ville », justifie auprès du HuffPost David Belliard, adjoint EELV d’Anne Hidalgo chargé en particulier des transports. « C’est un premier signal d’une utilisation nouvelle de l’automobile en ville. »

La mise en place de la voie dédiée pourrait immédiatement être accompagnée d’une seconde évolution : la consultation lancée par la mairie de Paris porte également sur une « réduction éventuelle de la vitesse limite autorisée ». La précédente baisse de 80 à 70 km/h « a diminué la congestion, et augmenté paradoxalement la vitesse moyenne », soulignaient les élus parisiens – tous bords politiques confondus – dans les conclusions d’une mission d’inspection lancée par la mairie en 2019.

L’enjeu de la réduction de la circulation

La création d’une voie réservée n’est pas vue d’un bon œil par la présidente LR de la région Île-de-France Valérie Pécresse. Dans sa contribution au débat public, révélée par Le Journal du dimanche, l’élue dénonce en particulier le « risque de thrombose généralisé tant sur les portes de la capitale que sur l’ensemble du réseau routier […] régional, notamment les principales autoroutes ».

« La mairie de Paris est dans une logique punitive et estime qu’en leur mettant des bâtons dans les roues, les gens vont arrêter de prendre leur voiture. Or la plupart des déplacements sont contraints ! », souligne auprès du HuffPost Olivier Blond, conseiller régional LR chargé en particulier de la lutte contre la pollution de l’air. « Il faut d’abord proposer des alternatives pour diminuer le besoin », selon lui.

La mission d’inspection de 2019 en convenait : les infrastructures régionales « offrent peu de marge susceptible d’absorber le surcroît de déplacements qui découlerait de la diminution de la circulation automobile sur le périphérique ».

« Aujourd’hui, le projet de la mairie de Paris pour réduire la circulation repose surtout sur le développement du covoiturage [via l’ouverture de la voie réservée]. Or tout le monde essaie de développer le covoiturage, mais ça marche mal, dénonce Olivier Blond. Et c’est assez minuscule par rapport aux enjeux globaux. »

Une autoroute « apaisée » ?

Pour l’élu LR, l’enjeu principal est de faire émerger « une région polycentrique, où les habitants ont moins besoin de toujours sans cesse passer par la capitale pour travailler, consommer, se divertir… Et ainsi que le besoin d’usage diminue ».

Un point sur lequel converge David Belliard : « N’est-on pas arrivé à la fin d’un cycle pour des zones très denses basées sur l’attractivité économique ? Il faut quitter l’idée d’être toujours en croissance et inventer une autre doctrine basée sur une répartition plus égalitaire du territoire. »

L’ouverture des lignes de métro du Grand Paris Express à la fin de la décennie devrait à la fois offrir une alternative en termes de transport et participer à la déconcentration de la capitale, permettant d’imaginer une nouvelle évolution du périphérique avec moins de place pour l’automobile.

« La mission d’inspection et d’évaluation de 2019 imaginait une transformation, à plus long terme, du périphérique en boulevard urbain, souligne David Belliard. Un peu comme sur les boulevards des maréchaux actuellement [ensemble de boulevards qui font le tour de Paris], avec des voies pour la circulation automobile, le tram, des pistes cyclables… C’est une des réflexions qui est menée, est-ce qu’elle aboutira ? Il est impossible de le dire ! »

« Tout est sur la table. L’idéal, c’est évidemment d’apaiser cet espace de toutes les manières possibles, valide Olivier Blond, qui insiste : Mais le prérequis, c’est d’avoir diminué le besoin de trafic. Pour nous, il ne faut pas inverser les choses ! »

Le lien avec la banlieue

Au-delà de la question des transports et de la circulation dans la région, l’un des enjeux pour l’avenir du périphérique concerne aussi le lien avec les communes avoisinantes. D’un point de vue physique, il est par exemple encore souvent très difficile de franchir le périphérique à pied ou à vélo pour passer d’un arrondissement parisien à la petite couronne.

« Il n’y a pas encore assez de réalisations, c’est vrai. Il y a un travail de recouture que nous sommes en train de mener, par exemple porte de la Chapelle ou porte Maillot, où les travaux sont en cours, souligne David Belliard. L’enjeu, c’est d’effacer cette fracture que constitue le périphérique. »

Un enjeu qui concerne aussi la gouvernance de la gestion du périphérique, comme exprimé à maintes reprises par la région Île-de-France. « C’est un axe tellement important pour la région et qu’il est absurde que son destin soit géré de manière à peu près unilatérale par la mairie de Paris. Il faudrait que les communes avoisinantes et la région aient leur mot à dire », plaide Olivier Blond. Preuve que malgré son grand âge, le périphérique continue d’attiser les convoitises.

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