Pour 2024, Emmanuel Macron peut-il s’attendre à mieux que la cauchemardesque année 2023 ?

2024 peut-elle être pire pour Emmanuel Macron (ici en novembre) que la cauchemardesque année 2023 ?
AURELIEN MORISSARD / AFP 2024 peut-elle être pire pour Emmanuel Macron (ici en novembre) que la cauchemardesque année 2023 ?

POLITIQUE - Annus horribilis (bis ?). Confronté aux épreuves successives depuis son installation à l’Élysée, de la fronde des gilets jaunes à la pandémie de coronavirus, Emmanuel Macron vient de vivre une nouvelle année éprouvante. S’il a réussi à faire passer - aux forceps - la réforme des retraites promises depuis 2017, il a buté en décembre sur le deuxième texte d’ampleur de son second quinquennat, la loi immigration.

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Ce projet, porté par Gérald Darmanin 15 mois durant, a été adopté au prix de nombreuses concessions lâchées à la droite dure, voire à l’extrême droite. La Macronie a ainsi validé la remise en cause du droit du sol, et fait un pas (de plus) vers la préférence nationale chère aux lepénistes.

Pire, son camp s’est fracturé comme jamais aux termes de ce long psychodrame : un quart des députés qui le soutient n’a pas avalisé le texte lors du vote final. Le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a quitté le gouvernement, d’autres ont menacé de le faire. Un nouvel épisode pénible qui souligne la difficulté pour le président de la République de faire vivre son ambition réformiste originelle par temps de majorité relative. Dans ce contexte, l’année 2024 promet, elle aussi, son lot de péripéties.

Un remaniement dans les têtes

La première question épineuse à régler pour le chef de l’État sera celle du casting. Élisabeth Borne peut-elle rester à Matignon ? Quid de la poignée de ministres issus de la gauche qui ont exposé leurs états d’âme sur la loi immigration ? Si le théorème de la réforme des retraites se répète, ces personnalités peuvent se faire du souci.

Au printemps dernier, Emmanuel Macron a effectivement essayé de solder une séquence difficile avec un remaniement qui faisait la part belle aux bons élèves de la Macronie. Exit Pap Ndiaye, François Braun et Olivier Klein, bonjour les défenseurs acharnés de la réforme des retraites. Comme une redite, l’hypothèse d’un remaniement imminent est désormais dans toutes les têtes pour relancer - à nouveau - le quinquennat. « Une nouvelle page s’ouvre. Il faut un élan nouveau, un renouvellement », plaidait ainsi François Bayrou, le premier allié, dimanche 24 décembre dans les colonnes du JDD, en prônant pour l’apport de « personnalités différentes, riches d’expérience. »

Mais pour quelle politique ? Car sur le fond, force est de constater que le chef de l’État entretient un certain flou. En opération « SAV » de la loi immigration sur France 5 fin décembre, Emmanuel Macron n’a pas souhaité dévoiler les contours du « rendez-vous avec la nation » qu’il imagine pour le début 2024. On sait tout juste que son camp portera une réforme de l’AME (aide médicale d’État) dès janvier, avant un projet de loi sur la fin de vie en février. À moins qu’il ne soit à nouveau reporté.

Macron n’a pas prévu d’être « plus gentil »

Une fois ces sujets - délicats - passés, l’horizon « plein-emploi » risque de provoquer de nouveaux débats éruptifs. Alors qu’il recevait des chefs d’entreprise à l’Élysée fin novembre, le président de la République a effectivement lâché quelques mots sur sa stratégie pour les mois à venir. Spoiler : il n’est pas question d’être « gentil. »

« Quand j’écoute les grands débats au fond, l’assurance chômage, les retraites, on peut redistribuer, on peut revenir en arrière. Les réformes, on pourrait les mettre sur pause. C’est le moment de savoir comment on va être plus gentils, comment on va engager… », regrettait-il alors, en exhortant au contraire la société à « se réveiller » face à un taux de chômage à 7 %.

« Quiconque pense que le temps est au repos, au mauvais compromis, c’est-à-dire celui qui se fait contre l’énergie de l’État, de la société civile (...) on ne vit pas dans le même monde », assénait-il encore, sous les applaudissements de son auditoire. Message reçu : dans la foulée, plusieurs ministres ont lancé des pistes dans le débat public, sur la limitation de l’accès aux ruptures conventionnelles ou la réduction des droits au chômage pour les séniors.

Autant de pistes pour raboter, à nouveau, les droits des salariés. Et propres, encore, à se heurter à l’opposition des syndicats, de la rue, mais également d’une aile gauche échaudée par une succession de virages présidentiels à droite. Le risque : fracturer pour de bon un bloc qui montre des premières lézardes inquiétantes.

De nouvelles épreuves de force

C’est dans ce contexte périlleux que le chef de l’État va appréhender deux événements de taille en forme de nouvelles épreuves de force. Le premier sera électoral, avec les européennes du mois de juin prochain. Le scrutin va prendre des allures d’élection de mi-mandat pour le président de la République… Et de tour de chauffe pour le Rassemblement national.

Le parti d’extrême droite, qui n’a jamais été aussi proche de l’Élysée, caracole en tête des sondages, très loin devant la candidature du bloc présidentiel, laquelle devrait être porté par Stéphane Séjourné. Une débâcle du camp Macron serait de bien mauvais augures trois ans avant la grande élection. Marine Le Pen, elle, pourrait compter sur une formidable rampe de lancement.

Enfin, le locataire de l’Élysée jouera très gros quelques semaines après les Européennes, avec les JO à Paris. L’événement, organisé dans la capitale entre le 26 juillet et le 11 août s’érige en redoutable épreuve pour l’exécutif. Une rare bouffée d’oxygène pour Emmanuel Macron, si les choses se passent bien. Ou un plantage au retentissement international, si les écueils déjà soulevés par Anne Hidalgo, se confirment.

Quel que soit le déroulé, le chef de l’État pourra toutefois finir l’année en beauté avec la réouverture de Notre-Dame promise pour le 8 décembre 2024, cinq ans après l’incendie, comme prévu. Une de ses réussites. Emmanuel Macron pourra ainsi profiter de l’instant pour louer l’esprit de résilience des Français. Et le sien ?

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