20 ans après la mort de Marco Pantani, le mystère demeure autour des circonstances du décès du "Pirate"

Le 14 février 2004, Marco Pantani décédait dans une chambre d'hôtel de la station balnéaire de Rimini. Vainqueur du Tour d'Italie et du Tour de France en 1998, l'Italien demeure encore, vingt ans après sa mort, dans les mémoires des amoureux du vélo. Régulièrement au cours des dernières années, le mystère autour de la disparition du "Pirate" a alimenté la chronique.

"Marco n'est pas mort comme ils l'ont faire croire au monde entier", pense la mère de Pantani

Officiellement, après avoir écarté la thèse du suicide, l'enquête des autorités a rapidement indiqué que Marco Pantani avait succombé à une overdose due à un mélange de cocaïne et d’antidépresseurs. Cette version n'a jamais vraiment convaincu la famille du cycliste. qui reste une icône dans le monde du vélo. Le 30 juin prochain, à l'occasion de la deuxième étape du Tour de France, le peloton s'élancera de Cesenatico, où repose la dépouille de Pantani.

Les coureurs de la Grande Boucle pourront ainsi, peut-être, lire cette inscription sur le caveau du défunt: "A Marco Pantani, un grand champion victime de la justice italienne." La charge est portée principalement par Tonina Pantani, la mère: "J'ai toujours en tête le coup de fil de sa manager quand elle m'a dit que Marco était mort. J'ai eu un flash et depuis ce moment, j'ai toujours eu la même idée. Marco n'est pas mort comme ils l'ont fait croire au monde entier", confiait-elle en 2014 à France Télévisions.

Après sa réouverture en 2014, l'enquête a été classée sans suite en 2017 malgré plusieurs incohérences

Près de dix ans après la mort de Marco Pantani, Antonio De Rensis, avocat mandaté par la famille, avait monté un dossier pour accréditer la thèse de Tonina Pantani. Cette star du barreau décèle alors plusieurs anomalies sur le "désordre organisé" de la chambre d'hôtel où Pantani a été retrouvé. Des traces de cocaïne sur une bouteille n'ont pas été analysées par exemple. "Comment une personne peut penser que l'enquête a été bien faite?", pointait du doigt De Rensis.

Dans l'autopsie officielle, le rapport indique que Marco Pantani aurait ingéré entre 15 et 50 grammes de cocaïne. Dans la contre-enquête de la famille, les chiffres dépassent les 50 grammes et il est suggéré que le cycliste aurait pu consommer de la cocaïne diluée dans l'eau de la bouteille retrouvée mais pas analysée. Par ailleurs, des objets ont été renversés pendant l'inspection des enquêteurs, qui ne portaient pas tous des gants et des protections nécessaires pour leur travail. Aucune empreinte digitale n'a été prise non plus.

Finalement, en août 2014 le parquet de Rimini rouvrait l'enquête pour "homicide avec altération de cadavre et lieu du crime", faisant grand bruit dans la presse italienne. "Pantani a été tué", titrait alors la Gazzetta dello Sport. Toutefois, un non-lieu sera prononcé trois ans plus tard, mettant ainsi fin à la possibilité d'une autre version officielle.

La thèse de l'homicide reste répandue

En 2019, l'ancien dealer de Marco Pantani remettait à son tour une pièce dans la machine. "Il n'est pas mort comme ça, il a été tué", assurait Fabio Miradossa. "Peut-être que celui qui l'a tué ne voulait-il pas le faire, mais il a été tué. Je ne sais pas pourquoi, à l'époque, les juges, la police et les carabiniers ne sont pas allés au fond de l'affaire. [...] Ils ont dit que Marco (Pantani) était dans un délire de drogué, mais je suis convaincu que quand Marco a été tué, il était lucide."

Car si la justice avait classé sans suite la réouverture de l'enquête, les éléments troublants n'ont jamais manqué dans cette affaire. Parmi ceux-ci, les enquêteurs avaient retrouvé uniquement 70 euros dans la chambre d'hôtel, là où Marco Pantani, arrivé avec 10.000 euros en poche, aurait dû avoir 5.000 euros en sa possession, lui qui n'était pas sorti après avoir réglé l'hôtel et son habituel dealer.

Moins d'une heure avant sa mort, Marco Pantani avait contacté la réception de l'hôtel: "Il dit: 'excusez-moi, il y a des gens qui me dérangent, est-ce que vous pouvez appeler les carabiniers?", retraçait Antonio De Rensis en 2014. "Marco n'était pas un homme qui demandait de l'aide", appuyait la mère. "Il l'a fait deux fois à l'hôtel, pourquoi personne n'y est allé?"

Retraité du cyclisme fin 2003, Marco Pantani présentait notamment une coupure à l'arcade et une bosse à la tête au moment de sa mort. Pour la famille, difficile d'imaginer que l'homme, âgé alors de 34 ans, soit à l'origine des blessures constatées sur le visage là où l'enquête justifiait ces éléments potentiellement par la démence de l'ex-coureur, provoquée par la drogue. En avril 2014, soit quelques mois avant la réouverture de l'enquête, la justice italienne avait détruit les organes de Marco Pantani et la fameuse bouteille retrouvée dans la chambre d'hôtel.

Toujours en 2014, Vincenzo Nibali remportait le Tour de France, mettant fin ainsi à la disette italienne. Fan du "Pirate", le "Requin de Messine" avait reçu l'un des maillots jaunes avant le départ de la Grande Boucle, envoyé par Tonina Pantani. Seul Italien à avoir gagné la plus grande course cycliste du monde depuis Marco Pantani, Vincenzo Nibali promettait d'effectuer le même cadeau en cas de victoire finale, ce qu'il était donc parvenu à faire. En 2024, difficile d'imaginer toutefois qu'un coureur transalpin ait le niveau pour rendre un tel hommage au "Pirate" alors que le Tour de France s'élancera pour la première fois d'Italie.

Article original publié sur RMC Sport