Et si les États-Unis arrêtaient de protéger leurs alliés? Les conséquences si Trump mettait sa menace à exécution
Menace réelle ou énième provocation? En évoquant la possibilité de ne plus défendre les pays de l'Otan rechignant à investir dans leur défense, Donald Trump a provoqué de vives réactions au sein de l'alliance.
Ce type de déclarations "sape notre sécurité à tous, y compris celle des États-Unis", a fustigé le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg dans un communiqué au ton particulièrement ferme.
Si elle se concrétisait, cette remise en cause de l'assistance mutuelle des États membres en cas d’agression, fondement même de l'Alliance atlantique, aurait des conséquences lourdes sur la capacité de ses membres à se défendre.
Washington encore "indispensable" aux Européens
Bien que Donald Trump soit coutumier des critiques envers l'Otan et qu'il a maintenu son pays dans l'alliance lorsqu'il était président, la menace brandie ce week-end incite les Européens à imaginer un futur sans le bouclier américain. Et ce dernier ne serait pas rose.
"En l'état, les Européens sont encore largement tributaires des États-Unis pour leur défense", assure à BFMTV.com le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense pour notre chaîne et ancien auditeur du collège de défense de l'OTAN.
"La France et le Royaume-Uni le sont dans une moindre mesure, car ils sont dotés de la dissuasion nucléaire", nuance-t-il.
Première puissance militaire mondiale, les États-Unis représentent "un peu moins de la moitié des capacités militaires de l'Otan" et restent les premiers contributeurs au fonctionnement de l'alliance.
Outre son armée et son gigantesque complexe militaro-industriel, les États-Unis possèdent "des capacités d'analyse et de renseignement que les alliés ne peuvent pas remplacer", selon Jérôme Pellistrandi. "Les Américains sont les yeux et les oreilles de l'Europe", schématise notre spécialiste.
Parapluie nucléaire
En cas d'un retrait de l'Otan par Donald Trump, les alliés ne seraient plus couverts par le "parapluie" nucléaire américain. Une situation qui rendrait particulièrement vulnérable des pays comme les États baltes et la Pologne, en première ligne face à la politique expansionniste de Vladimir Poutine.
"Il ne fait aucun doute que pour les Polonais, les Baltes et les Nordiques, la disparition de l’OTAN constituerait une menace existentielle", anticipait déjà l'institut de géopolitique Iris en 2020, alors que Donald Trump proférait déjà des menaces du même ordre. Si jamais il mettait ces dernières à exécution, ces pays "activeraient le plan B: celui d’accords bilatéraux de défense avec les États-Unis", estimait alors l'Iris.
La France, de son côté, serait pressée par ses voisins européens de partager sa dissuasion nucléaire. "Mais Emmanuel Macron a toujours rejeté cette possibilité", souligne le général Pellistrandi.
Une "européanisation de l'Otan"
Dans le scénario d'une Otan sans Washington, "le Royaume-Uni, la France et l'Allemagne pourraient être amenés à jouer un rôle accru, accélérant une européanisation de l'alliance", poursuit le militaire.
Les autres États pourraient eux être poussés à augmenter leur budget consacré à la défense, alors que Donald Trump leur reproche justement leur manque d'investissement dans ce domaine.
De fait, une majorité des 31 pays membres de l'Otan n'ont toujours pas atteint l'objectif des 2% du produit intérieur brut (PIB) consacré aux dépenses militaires, un objectif que l'Alliance s'est pourtant fixé en 2006. L'ambition était alors de mieux partager l'effort entre les pays européens et les États-Unis.
Donald Trump l'avait rappelé à maintes reprises lors de sa présidence, comme d'autres avant lui, y compris son prédécesseur Barack Obama. Selon une estimation de l'Otan, seuls onze d'entre eux ont atteint cet objectif en 2023.
Les menaces de Trump, un électrochoc?
Pour la plupart des diplomates européens, les menaces de Donald Trump ne sont pas à prendre au pied de la lettre et sont à remettre dans un contexte de campagne électorale. Mais elles incitent à une prise de conscience.
"On ouvre les yeux, on reste calmes, on continue", a ainsi résumé ce week-end l'ambassadrice de France auprès de l'Otan, Muriel Domenach sur X (ex-Txitter).
Le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, a estimé de son côté que la France devait réfléchir à "une deuxième assurance vie, pas contre l'OTAN, pas en substitution mais en addition".