Élections européennes: avec la candidature de Rima Hassan, LFI met Gaza au centre du débat
Personnalité "de lutte" ou "représentante des idées que véhicule le Hamas"? La controversée militante franco-palestinienne Rima Hassan, candidate pour La France insoumise aux européennes, incarne la volonté du mouvement d'insister sur la situation à Gaza et d'enfoncer le clou sur sa condamnation d'Israël.
La juriste de 31 ans, spécialiste de la question des réfugiés - qu'elle connaît intimement car née dans un camp de réfugiés en Syrie et arrivée en France à l'âge de 10 ans - est très connue dans les milieux militants, mais moins du grand public.
Elle, qui qualifie Israël d'"entité coloniale fasciste" ou qui dit que cet État "ment tous les jours", est accusée d'avoir estimé après le 7 octobre qu'il était "vrai" que le mouvement islamiste palestinien Hamas mène une action légitime, dans une interview au média Le Crayon. Un extrait tronqué, répond-elle, regrettant "une censure" de ses "développements et réponses étayées" et précisant avoir qualifié le Hamas de "groupe terro".
Des critiques également à gauche
Même à gauche, où la question de la réaction au 7 octobre a fini d'enterrer la Nupes, la fondatrice de l'Observatoire des camps de réfugiés compte peu de soutiens. La tête de liste des socialistes Raphaël Glucksmann a ainsi dénoncé des propos "révoltants" alors que le patron des communistes Fabien Roussel a estimé que la jeune femme "porte un projet (...) qui n'est pas porteur d'une solution politique et de paix".
Autre déclaration polémique de Rima Hassan: son utilisation du slogan "de la rivière (Jourdain) à la mer (Méditerranée)". Une expression associée par certains à la destruction d'Israël.
"Je demande que tous les Palestiniens, où qu'ils vivent, soient délivrés de toutes ces oppressions, du Jourdain à la mer", rétorque-t-elle.
Elle a également dit défendre la solution d'un "État binational" alors que La France insoumise est, elle, en faveur de la solution à deux Etats comme l'immense majorité de la classe politique.
"Une expertise décisive", selon Bompard
"Un cri du coeur" et "une parole militante" car sa génération "a perdu espoir dans la solution à deux États, du fait de l'impunité continuelle de l'État d'Israël", s'est-elle défendue auprès de Mediapart, expliquant que maintenant, en tant que "responsable politique", elle s'inscrit "dans le cadre des deux États côte à côte".
"Il n'y a pas de désaccord ou de divergence entre nous à ce sujet", assure le coordinateur de LFI Manuel Bompard.
Et sur le fond, "c'est compréhensible que de plus en plus de monde ait du mal à croire en une solution à deux Etats", ajoute-t-il. "Qui suis-je moi pour dire quelles sont leurs aspirations ?".
"Rima Hassan sait exactement de quoi elle parle, elle va apporter une expertise décisive, et pas uniquement sur la question palestinienne", se réjouit-il à propos de sa présence à la 7e place de la liste, une position éligible.
Cette thématique, les Insoumis entendent bien insister dessus, comme ils l'ont fait dès le 7 octobre. Au risque d'alimenter les accusations d'ambiguïté à propos du Hamas - une organisation considérée comme "terroriste" par Israël, de même que par les États-Unis et l'Union européenne -, et sur la question de l'antisémitisme à leur égard.
"Une stratégie de niche va donner des résultats de niche"
De toutes les forces de gauche, LFI est celle qui a le plus appelé à la mobilisation en faveur des Gazaouis, notamment en manifestant. "C'est le mouvement politique le plus engagé sur ces sujets qui me tiennent à coeur", a insisté Rima Hassan dans une interview à 20 Minutes vendredi.
Reste à convaincre ces sympathisants de la cause palestinienne de se rendre aux urnes le 9 juin.
"C'est l'enjeu, on est d'accord", reconnaissait le mois dernier Manon Aubry auprès de l'AFP. "Le nombre de gens qui viennent nous voir en disant 'ne lâchez rien, tenez bon' est énorme. C'est une base, un socle très fort dans le pays. Pas forcément la partie la plus visible, pas forcément la partie qui se mobilise le plus en termes de taux de participation, mais c'est une des grandes forces de La France insoumise", développait-elle.
Mais en interne, certains restent sceptiques sur l'importance accordée à cette question.
"Une stratégie de niche va donner des résultats de niche", met en garde un Insoumis de longue date, qui précise: "Les gens ne votent pas sur la Palestine. Toutes les mairies communistes qui ont fait 'Palestine, Palestine' depuis 20 ans ont tout perdu".