« À ma grande surprise, devenir mère a simplifié ma vie sur bien des points » - Témoignage

« De manière générale, devenir mère m’a aidé à me poser moins de questions. Un petit être qui occupe tout l’espace, ça évite de le remplir avec ses propres angoisses ! »
Yagi Studio / Getty Images « De manière générale, devenir mère m’a aidé à me poser moins de questions. Un petit être qui occupe tout l’espace, ça évite de le remplir avec ses propres angoisses ! »

TÉMOIGNAGE - Je suis de nature plutôt angoissée. Aussi loin que je puisse me souvenir, je me suis rongé les ongles, j’ai été sujette à l’eczéma… Des manifestations physiques déclenchées par des angoisses existentielles assez marquées : qu’est-ce que je fais de ma vie ? De quelle manière est-ce que j’occupe mon temps, et est-ce que cette manière de faire a du sens ?

Ce que j’aurais aimé savoir avant de devenir mère pour affronter mon sentiment d’abandon

Quand j’ai commencé à envisager d’avoir des enfants, je m’imaginais donc devenir le genre de parent qui se pose énormément de questions et qui se prend la tête, parfois à outrance. Surprise, la réalité a été très différente ! Aujourd’hui, je suis mère d’une petite fille de 4 ans et même si tout n’est pas facile dans la parentalité, il y a beaucoup de points sur lesquels avoir un enfant a simplifié ma vie.

Devenir mère m’a donné confiance en mes décisions

Avant la naissance, je me disais que la parentalité était quelque chose de si banal qu’il y aurait forcément des « recettes » d’éducation pour tous les enfants, des choses universelles. En fait, mon conjoint et moi avons expérimenté le contraire et nous sommes retrouvés, en tant que couple parental, très seuls face à notre bébé… Et à toutes les injonctions. Des professionnels de santé aux autres parents ou aux générations précédentes, tout le monde avait (et a encore) un avis différent, et nous entendions beaucoup de conseils contradictoires.

Malgré ces discours omniprésents, c’était à nous d’apprendre à gérer la vie encore fragile de notre enfant, en tenant compte de sa personnalité et de nos valeurs. Il a fallu apprendre à prendre des décisions importantes rapidement, tout en respectant nos limites et en la protégeant. Cet apprentissage assez abrupt m’a beaucoup aidée : il m’a permis de développer une capacité à m’affirmer que je n’avais pas avant. Aujourd’hui, quel que soit le contexte, je prends mes décisions bien plus sereinement et je suis capable de me dire « si tu fais ce choix, c’est que c’est le bon pour toi » sans me donner d’insomnies.

Accepter de lâcher prise

D’ailleurs, cette capacité à prendre des décisions s’est affinée à mesure que ma fille a grandi. Quand elle a commencé à bouger et à parler, j’ai été forcée de choisir mes batailles. Parce qu’un enfant ne peut pas répondre à tout, et j’ai dû m’habituer à identifier ce qui était primordial (certaines interdictions qui méritent qu’on ne lâche jamais sa position), et en même temps à lâcher-prise sur ce qui n’était pas indispensable.

Ce lâcher prise, c’est aussi composer avec la personnalité de mon enfant : je dois lui donner un cadre, mais c’est un être entier à qui je ne peux pas demander d’être autre chose qu’elle-même. C’est quelque chose dont j’ai désormais une conscience accrue dans mes relations personnelles ou professionnelles, y compris avec les adultes. Je suis plus attentive au fait d’accepter l’autre et ses référentiels, tout en ayant la certitude qu’en se concentrant sur les choses importantes, on peut réussir beaucoup de choses ensemble.

Savoir qu’on peut résister à beaucoup de choses

Depuis sa naissance, ma fille a des problèmes de sommeil qui ont généré beaucoup de stress et de prises de tête. Après de nombreuses injonctions contradictoires sur où, quand, comment et pourquoi il fallait qu’elle dorme (« il faut la laisser pleurer sinon elle ne dormira jamais », « il ne faut surtout pas la laisser pleurer sinon son cerveau sera cassé »), nous avons tenté des psys du sommeil et à peu près toutes les techniques. En vain. Jusqu’à ses 3 ans, elle se réveillait plus ou moins cinq fois par nuit, refusait les siestes. Mon conjoint et moi avons dû survivre avec un manque de sommeil terrible.

Cela n’avait rien d’agréable, et j’étais très consciente que la situation était tout simplement merdique. Et en même temps, j’ai pu constater l’étendue de mes capacités de résilience. Parce que, même dans ces moments qui pouvaient être affreux, il n’y avait pas le choix. Il fallait se lever épuisés, et recommencer encore et encore. Avant d’être mère, je n’aurais jamais imaginé pouvoir survivre aussi longtemps à des nuits catastrophiques tout en continuant à aller au travail, et même à avoir une vie sociale de temps en temps. Avec le recul, savoir que j’ai pu résister à cette situation, qui m’a poussée dans mes retranchements, ça m’a aidée à me sentir capable de gérer beaucoup de choses, bien au-delà de la parentalité.

Relativiser sur la saleté

S’il y a bien une chose qui m’a surprise quand je suis devenue mère, c’est la saleté. Il y a quelque chose de très primaire - voire gore - dans l’exercice de la parentalité. On peut se faire vomir dessus un nombre incalculable de fois, avoir du caca sur le visage, tout en étant certain que ce n’est absolument pas grave.

Ma fille a déjà eu des vers, des poux. C’est dégueu mais la réalité, c’est que je ne peux pas faire autrement que de m’en foutre. Oui, elle a des poux mais on va quand même se faire un câlin si elle le demande, parce que je l’aime ! Ça devient même un non-sujet : l’important, c’est que sa santé physique et mentale ne soit pas en danger. Pour le reste, même les trucs les plus sales, on prendra des traitements et le lendemain, on n’en parlera plus.

Depuis que je suis mère, je me pose moins de questions

De manière générale, devenir mère m’a aidé à me poser moins de questions. Un petit être qui occupe tout l’espace, ça évite de le remplir avec ses propres angoisses ! Et en ça, je me sens plus apaisée. J’ai ralenti le rythme. Quand ma fille marche à la vitesse qu’elle veut, elle peut mettre des heures à faire quelques mètres, mais elle est tellement contente de me montrer des fourmis qui montent sur un pissenlit, ou la lune qui apparaît dans le ciel en plein jour qu’on s’arrête, et qu’on regarde ce qu’elle veut. Même si j’ai des choses à faire, avoir un enfant m’a permis de reprendre plaisir à faire des choses d’enfants et à se laisser le temps de la contemplation. C’est assez merveilleux !

Devenir mère a été un changement radical, et s’y adapter n’a pas été simple, mais les plus grandes difficultés que j’ai rencontrées n’ont pas été dans le rapport à mon enfant. Par contre, les questions de charge mentale, de partage des tâches dans le couple hétéro, les exigences du monde du travail quand on fait face à un tel bouleversement ont été extrêmement difficiles, et, je crois, n’ont pas tant à voir avec la parentalité en elle-même. Là-dessus, il y a énormément de choses à changer dans notre société.

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