Oise : l'Église refuse d'unir un couple à cause d'un projet d'enfant reporté pour raisons médicales

L'Église a interdit à un couple de s'unir à l'église en juillet dernier dans l'Oise. Le prêtre a décidé de mettre un terme aux préparatifs en raison de l'impossibilité pour le couple d'avoir actuellement un enfant.

Ils préparaient le grand jour depuis des mois. Dans l’Oise, un jeune couple avait prévu de s’unir le samedi 13 juillet à la mairie puis à l’église de Moulin-sous-Touvent. En début d’année, une nouvelle ébranle les préparatifs des futurs époux: l’Église leur interdit le mariage religieux, révèle Le Parisien. La raison? La future mariée est atteinte d'endométriose et le couple ne sait pas encore s’il pourra donner la vie.

En début d’année, les futurs époux sollicitent la paroisse de la Vallée de l’Aisne dans l’Oise. Une prise de contact "très tardive", explique Julien Serey, conseiller auprès de Mgr Jacques Benoit-Gonnin, évêque de Beauvais, à BFMTV.com. "Le couple ne pouvait pas intégrer la préparation de la paroisse déjà trop avancée." En paroisse, la préparation au mariage dure un an environ, selon cette même source.

Le couple est finalement accompagné par un prêtre de l’abbaye d’Ourscamp "spécialisé dans l’accompagnement des fiancés", poursuit Julien Serey. Les futurs époux le rencontrent à cinq reprises entre le 1er février et le 25 avril. "Lors de cette dernière rencontre, le prêtre a pris la décision d’arrêter la préparation et a motivé cette décision auprès d’eux, réitéré par mail le 10 juin, puis lors d’une rencontre avec la responsable de la pastorale familiale le 12 juin", poursuit la même source.

Le projet religieux du couple se fracasse contre le chapitre 6 et sa question: "dans le foyer que vous allez fonder, acceptez-vous la responsabilité d'époux et de parents?". Au prêtre, la future mariée affirme avoir confié être atteinte d’endométriose, un mal contre lequel elle se bat et qui met ce projet d’enfant entre parenthèses. "Je suis atteinte d’endométriose et j’ai fait une fausse couche", confie-t-elle au Parisien.

"J’ai subi une opération et j'ai vu des spécialistes à Paris. J’aimerais réessayer, car nous voulons des enfants, même si l’issue est incertaine. Je risque des complications graves si j’arrête ma contraception. Je l’ai donc expliqué, mais le visage de cet homme s’est refermé et il a tout arrêté. C’était fini."

"C’est brutal. Elle en a pleuré", confie Anne Brocvielle, la maire de Moulin-sous-Touvent, à BFMTV.com. "Ils ont été convoqués et ont même passé des entretiens séparément, c’était violent."

La future épouse passe la première cet entretien. "J’ai encore dû tout expliquer, que je voulais des enfants, mais que c’était compliqué", détaille-t-elle au Parisien. "Puis, on m’a parlé de mon culte. Je suis d’origine malgache et nous honorons nos ancêtres. J’ai bien précisé que je respectais celui de mon conjoint, que j’ai été baptisée, que mes parents s’étaient mariés à l’église…" Son conjoint passe à son tour. "On m’a affirmé que ma compagne avait réitéré son souhait de ne pas vouloir d’enfant", explique-t-il au Parisien. "Je leur ai dit que c’était impossible. Ils ont voulu semer le trouble pour appuyer leur version: qu’on n'acceptait pas la vie. C’est faux."

Contacté par Le Parisien, le prêtre de l’abbaye affirme l’inverse. "Dans une de nos rencontres, la jeune femme a dit ne pas en vouloir", détaille-t-il auprès de nos confrères. "Quand elle sera prête, j’ai invité le couple très sympathique, par ailleurs, à reprendre contact avec moi."

Interrogé sur les motivations du refus, Julien Serey, conseiller auprès de Mgr Jacques Benoit-Gonnin, évêque de Beauvais, affirme qu’elles ne portent "ni sur la question de l’endométriose ni sur celle de la contraception", précisant "qu’à ce stade, il n’y a pas un refus de marier, mais une pause dans la préparation". Selon lui, "à plusieurs reprises, il a été évoqué avec le couple de reprendre la préparation à la rentrée".

Dans l’Église, la différence entre "pouvoir" et "vouloir" un enfant n'est pas une nuance. Si un couple ne souhaite pas avoir d’enfant, le mariage "ne peut pas avoir lieu", détaille Julien Serey. Dans le cas où les deux futurs époux ne pourraient pas concevoir d’enfant "rien n’empêche que le mariage religieux soit célébré, à condition que cela soit clairement pris en compte dans la décision des deux fiancés".

De l’aveux du diocèse de l’Oise, les refus d’unir religieusement deux fiancés dans ce cas précis sont rares, voire inexistants. "Il n’y a pas de statistique sur le sujet et c’est extrêmement rare", explique-t-il. Consulté, le vicaire général "a répondu que personnellement, il n’en avait connu aucun" soulignant que "dans le dialogue pastoral, les désirs et les craintes sont abordés. Bien souvent, les positions évoluent".

De son côté, le couple d’Oisiens s’est tourné vers la maire de Moulin-sous-Touvent pour tenter d’obtenir une aide. "J’ai échangé avec l'affectataire, mais j‘étais malheureusement impuissante. Je ne peux pas aller contre son avis." Anne Brocvielle regrette cette décision. "Ce n’est pas normal, on entre dans leur intimité", affirme-t-elle. L'Église ne dispose également d'aucun recours.

"Si le prêtre chargé de signer le dossier du mariage pour authentifier la démarche des fiancés, en son âme et conscience, ne peut pas signer ce dossier, le curé ou l'évèque ne peut pas aller à l'encontre du discernement pastoral."

Le samedi 13 juillet, le couple s’est malgré tout marié à la mairie. "Et avec mon conseil municipal, nous avons organisé une sorte de cérémonie laïque pour faire en sorte d’oublier ce mauvais moment", confie Anne Brocvielle. “C’est dommage d’en arriver là."

Article original publié sur BFMTV.com