Ryad et Washington minimisent leurs différends

par Lesley Wroughton et Angus McDowall RYAD (Reuters) - L'Arabie saoudite et les Etats-Unis ont cherché lundi à minimiser leurs différends sur l'Iran, la Syrie ou encore la question palestinienne à l'occasion de la visite à Ryad du secrétaire d'Etat américain, John Kerry. Le chef de la diplomatie américaine a rencontré son homologue saoudien, le prince Saoud al Faiçal, puis a eu un entretien avec le roi Abdallah lors de l'étape saoudienne d'un périple de neuf jours au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Au cours d'une conférence de presse commune avec son homologue saoudien, John Kerry a souligné que les relations entre les deux pays avaient un caractère stratégique et durable. Le prince Faiçal a lui aussi insisté sur le lien unissant les deux alliés. "Les relations (américano-saoudiennes) ont toujours été fondées sur l'indépendance et le respect, au service de nos intérêts mutuels", a-t-il dit. "Les divergences, c'est normal et nous cherchons à les gommer par la communication entre les deux nations", a-t-il ajouté. Le royaume wahhabite, principal allié arabe des Etats-Unis, accuse Washington d'inaction dans la crise syrienne et s'inquiète de la main tendue par Barack Obama à l'Iran. Avant de rencontrer le prince Faiçal, John Kerry avait qualifié de "très, très important" le rôle de l'Arabie saoudite dans la région. Ryad est la deuxième étape, après l'Egypte dimanche, d'une tournée qui conduira ensuite John Kerry à Jérusalem et à Bethléem, puis en Jordanie, aux Emirats, en Algérie et au Maroc. ASSURANCES AMÉRICAINES SUR L'IRAN Ryad reproche à Washington d'avoir, par faiblesse, laissé Israël poursuivre sa politique de colonies de peuplement en Cisjordanie occupée, au détriment des Palestiniens. John Kerry a indiqué à ce sujet que les Etats-Unis n'avaient "pas d'autre projet" que la relance des négociations entre Israël et les Palestiniens engagée depuis cet été, sous l'impulsion de Kerry lui-même. Le rapprochement esquissé par les Etats-Unis en direction de l'Iran chiite inquiète également le royaume wahhabite, qui craint de voir Téhéran étendre son influence à l'ensemble du Moyen-Orient. Le secrétaire d'Etat a dit au sujet de l'Iran avoir donné aux dirigeants saoudiens des assurances, non spécifiées, et répété que les Etats-Unis s'opposeraient à l'acquisition de l'arme nucléaire par Téhéran. L'Egypte constitue un autre point de friction entre les deux alliés. Ryad n'a pas apprécié le peu d'empressement montré par Washington à soutenir le nouveau gouvernement issu au Caire du renversement par l'armée du président islamiste Mohamed Morsi, qui avait amorcé une coopération avec l'Iran. John Kerry, qui a rencontré dimanche les responsables égyptiens, a déclaré que Washington soutenait les transformations économiques en cours en Egypte. L'Arabie saoudite a manifesté son mécontentement de façon spectaculaire il y a deux semaines en renonçant à son siège au Conseil de sécurité de l'Onu. RÈGLEMENT NÉGOCIÉ EN SYRIE Ryad s'insurge également contre la présence éventuelle de l'Iran à une seconde conférence de paix de Genève sur la Syrie, qui pourrait avoir lieu le 23 novembre mais dont la tenue reste très incertaine. John Kerry a souligné qu'"un règlement politique négocié (du conflit syrien) tel que formulé dans le communiqué de Genève constitue à nos yeux la meilleure manière de mettre fin au bain de sang". Tout en reconnaissant l'importance de la négociation, le prince Faiçal a cependant estimé que celle-ci ne pouvait durer indéfiniment. Il a également exigé la fin de la présence d'éléments iraniens en Syrie. Un chef des gardiens de la révolution, fer de lance des forces armées iraniennes, a été tué en Syrie où il s'était porté volontaire pour défendre la mosquée Sayyida Zainab, sanctuaire chiite des faubourgs sud de Damas, rapporte lundi l'agence de presse iranienne Mehr. Selon un responsable du département d'Etat, John Kerry a clairement fait savoir aux Saoudiens que l'Iran ne serait pas admis à Genève avant d'avoir accepté comme préalable à toute négociation un calendrier pour le départ du président syrien. Abdoullah al Askar, président de la commission des Affaires étrangères de la Choura, le parlement saoudien, a dit espérer que le voyage de Kerry servirait à rapprocher les points de vue. "Je pense qu'il est venu pour provoquer un changement. Il y a de nombreux problèmes et incompréhensions entre les deux pays. Mais ils (Les Américains) sont nos alliés depuis 70 ans", a-t-il souligné. Jean-Stéphane Brosse et Pascal Liétout pour le service français, édité par Gilles Trequesser