Seul Bayrou peut battre Hollande !

Ce week-end, la presse s'inquiétait de l'incohérence des sondages. Le JDD a fait sa Une sur le sujet. Au premier tour, IPSOS donne à Hollande 7 points d'avance sur Sarkozy. Tandis que selon l'IFOP, cette avance ne serait que de 1 point. Dans son édition du week-end, Le Monde fait le même constat. Le journal fait sa Une sur « Ces sondages qui troublent la campagne ». IPSOS annonce une stabilité des intentions de vote, tandis que selon l'institut CSA, il y aurait un resserrement des écarts. S'en suit une double page qui décortique les méthodes des instituts de sondages.

Pourtant, les résultats des sondages ne varient pas tant que ça. Si les chiffres varient d'un institut à l'autre, le résultat ne change pas. Dans tous les sondages réalisés jusqu'à présent, Hollande se classe chaque fois en tête du premier tour.

Le croisement des courbes

À force, ça devient presque ennuyeux. À quoi bon faire des sondages toutes les semaines, si c'est toujours le même résultat ? Du coup, on en est réduit à commenter l'évolution des scores de chaque candidat. Le Pen va-t-elle rattraper Sarkozy ; Bayrou va-t-il rattraper Le Pen ; Mélenchon va-t-il rattraper Bayrou ? Chaque semaine, on remplit des pages sur ces questions. Pourtant, voilà des mois que les sondages classent les candidats dans le même ordre : Hollande, Sarkozy, Le Pen, Bayrou, Mélenchon.

Pour qu'un sondage créé l'événement, il doit y avoir croisement des courbes. Selon IPSOS, Sarkozy a gagné 7 points d'intentions de vote après son discours, mais tant qu'il reste derrière Hollande, ça ne change pas grand-chose. En revanche, si au prochain sondage IPSOS, Sarkozy gagne un point et que Hollande en perd un, leurs courbes vont se croiser. Avec 27,5% d'intentions de vote, Sarko passerait devant Hollande à 26,5 %.

Préserver le suspens

Une campagne électorale est un spectacle comme les autres. Pour que le public s'y intéresse, il faut de bons personnages, des péripéties, et surtout du suspens. Si on connaît déjà la fin du film, à quoi bon aller le voir ? Si on connaît déjà le résultat du scrutin, à quoi bon aller voter ?

Le premier institut de sondages qui placera Nicolas Sarkozy en tête du premier tour est sûr de créer l'événement. Et le journal qui annoncera l'info en une tiendra son info exclusive. Bref, si les courbes de Sarkozy et de Hollande se croisaient, ça arrangerait tout le monde. Et le public y trouverait son compte de sensations fortes. Grosse bouffée d'espoir pour les fans de Sarkozy. Grosse poussée d'angoisse pour les partisans de Hollande. Tant que rien n'est joué, la campagne reste palpitante, les journaux ont des choses à raconter.

Et le deuxième tour ?

Sarkozy en tête au premier tour ! C'est le rebondissement que tout le monde attend. Tellement attendu qu'il paraît presque programmé. Mais dans le fond, peu importe, ça ne changera rien au résultat final. Pour le premier tour, les résultats des sondages laissent planer un peu d'incertitude. En revanche, pour le second, les résultats sont unanimes.
En parcourant le site "Sondages en France", on constate que depuis le début de la campagne, aucun institut de sondages n'a donné moins de dix points d'écart entre Hollande et Sarkozy au second tour (Hollande 55 / Sarkozy 45).

Certes, la dynamique est du côté de Sarkozy, qui comptait encore 20 points de retard sur Hollande en octobre 2011. En quatre mois, il a réduit son retard de moitié. Mais à deux mois du second tour, il a toujours dix points de retard.

Hollande n'est pas invincible

Quand va sortir le sondage donnant Sarkozy en tête du premier tour, l'UMP criera victoire. Mais pour être réélu, c'est au second tour qu'il faudra devancer Hollande. Et là, les courbes de Hollande et Sarkozy ne semblent pas prêtes de se croiser… Pourtant, François Hollande n'est pas invincible. Simplement, pour le battre au second tour, il faudrait lui opposer un autre candidat que Sarkozy.

L'hypothèse Bayrou

Officiellement, les sondeurs s'interdisent de tester l'hypothèse Bayrou au second tour car elle ne paraît absolument pas crédible. En réalité, de tels sondages existent, mais ils ne sont pas publiés, comme le révélait Laurent Neumann (directeur de la rédaction de Marianne) au début du mois sur La Chaîne Parlementaire.

Pour contourner l'interdiction, Paris Match a détourné la question. Au lieu de demander aux Français pour qui ils voteront au second tour, on leur propose deux noms et ils doivent élire leur préféré. Quand on leur propose de choisir entre Hollande et Sarkozy, ça donne en gros 56 pour Hollande, 40 pour Sarkozy et 4% qui répondent « ni l'un, ni l'autre ». Sans surprise, les chiffres correspondent aux pronostics pour le second tour.
Mais quand Hollande est opposé à Bayrou, les Français choisissent Bayrou. Selon le sondage, 51% des Français préfèrent le candidat centriste au candidat socialiste.

Les candidats du système

À l'Assemblée Nationale, il y a 577 députés mais seulement deux partis. D'un côté l'UMP, 300 représentants. De l'autre le PS, 204 représentants. Sarkozy est le candidat de l'UMP, Hollande celui du PS ; une fois de plus, il faudra choisir entre les deux. En France, soit on est de gauche, soit on est de droite. N'essayez pas de dire que vous êtes au centre, on vous demandera de préciser : « Centre-gauche ou centre-droit ? »

Dommage pour Bayrou ! S'il était de gauche, il battrait Sarkozy à plate couture. S'il était de droite, il serait favori face à Hollande. Mais tant qu'il est au centre, Bayrou reste une hypothèse improbable.