« Zone interdite » : le désarroi de cette mère d’enfant polyhandicapé montre les manquements de l’État

Le fils de Sandrine, Arthur, 7 ans, est autiste et ne parle pas. Séparée de son père depuis 4 ans, elle a la garde de l’enfant et ne s’en sort plus.
CAPTURE D'ECRAN/GIRAFPROD / CAPTURE D'ECRAN/GIRAFPROD Le fils de Sandrine, Arthur, 7 ans, est autiste et ne parle pas. Séparée de son père depuis 4 ans, elle a la garde de l’enfant et ne s’en sort plus.

HANDICAP - « C’est de la maltraitance vis-à-vis de tout le monde : de la maîtresse, de mon fils, de moi. » Ce cri de détresse, c’est celui de Sandrine, mère d’un enfant handicapé de 7 ans. Elle est l’un des parents qui témoignent dans « Zone Interdite » diffusé ce dimanche 24 mars sur M6. Dans cet épisode de l’émission, intitulé « Scandales et défaillance de l’État : les dossiers noirs du handicap », elle y décrit son quotidien, à bout et sans aide des pouvoirs publics.

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Son fils, Arthur, est autiste et ne parle pas. Séparée de son père depuis quatre ans, Sandrine a la garde de l’enfant et ne s’en sort plus. Elle a arrêté de travailler il y a plus d’un an et attend désespérément, depuis 5 ans, une place dans un établissement spécialisé. Son fils, très agité, est très compliqué à gérer. « Il n’y est pour rien, ce n’est pas de sa faute », souligne-t-elle, épuisée.

La solution que l’administration lui a proposée n’est pas idéale : scolariser Arthur 12 heures par semaine. Mais son fils perturbe trop la classe. Alors, l’institutrice n’a accepté de le prendre que deux heures par semaine. « Pour les autres enfants, ça peut être très impressionnant de le voir en crise et s’il fait une crise, c’est qu’il n’est pas bien non plus », souligne la mère en détresse.

Pas de place en institut médico-éducatif

Une situation qui illustre bien les défaillances de l’inclusion à l’école, votée en 2005. Le manque de personnel spécialisé – les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) – est criant. Dans une impasse, Sandrine tente de mener des « opérations coup de poing », comme ce jour où elle décide d’interpeller un institut médico-éducatif (IME) où son enfant est cinquantième sur liste d’attente.

En caméra discrète, l’équipe de télévision la suit, pour tenter de savoir pourquoi le dossier de son fils est toujours non traité. Les critères d’admission et la progression de la liste d’attente sont opaques. « On a des critères qui nous appartiennent et c’est compliqué…  », tente une responsable de l’IME. Selon le documentaire, 30 000 enfants attendraient une place en institut. Des établissements où, par ailleurs, les maltraitances sont légion, faute de moyens et de personnel, comme le montre le reportage.

La création de nouvelles places dans ces établissements dépend de l’Agence régionale de Santé (ARS). C’est donc devant son siège que Sandrine décide de se rendre ensuite. Face à la porte close, elle sort des chaînes pour s’attacher devant le bâtiment et exiger une réponse. Les responsables de l’ARS, qui finissent par venir discuter avec la mère de famille, renvoient la balle à l’État, qui ne leur fournirait pas assez de moyens.

Le mythe de l’inclusion scolaire

Car l’État semble avoir tout misé sur l’école inclusive, qui coûterait bien moins cher à financer que les établissements spécialisés. Selon les estimations des journalistes de M6, en IME, un enfant coûterait environ 50 000 € à l’État, contre 8 000 à l’école. Faute de moyens, des IME suppriment même des places. Or, l’école ne peut accueillir tous les enfants porteurs de handicap. Les AESH, lorsqu’il y en a, ne sont pas toutes formées correctement.

Dans un rapport parlementaire sur l’inclusion scolaire publié en novembre 2023, les députés Servane Hugues (Renaissance) et Alexandre Portier (LR) pointaient déjà un droit à la scolarisation en milieu ordinaire « loin d’être effectif ». Car si le nombre d’élèves en situation de handicap a doublé, passant d’environ 210 000 en 2004 à environ 475 000 en 2021, les conditions d’accueil de ces enfants, comme le montre le reportage, ne sont pas adaptées.

Des centaines de postes d’AESH sont à pourvoir, car les conditions de travail sont très précaires : 80 % d’entre elles – ce sont des femmes en majorité – sont en CDD et gagnent 800 € nets par mois, pour 24 heures dispersées dans la semaine. Difficile aussi de recruter des enseignants formés pour les Unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis). La mère d’Arthur n’a pour l’instant pas trouvé de solution pour son fils. Une situation à la fois symptomatique de l’attention qu’on accorde aux enfants handicapés et d’une inclusion scolaire qui reste à l’état de mythe, faute de moyens.

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