Zadie Smith : « Pourquoi parler au nom de sa propre identité ? »

Zadie Smith s’est plongée dans le procès, au XIXe siècle, d’un imposteur qui prétendait être sir Roger Tichborne, et qui fut soutenu par Andrew Bogle, un ancien esclave de la famille Tichborne.  - Credit:2015 Eamonn McCabe
Zadie Smith s’est plongée dans le procès, au XIXe siècle, d’un imposteur qui prétendait être sir Roger Tichborne, et qui fut soutenu par Andrew Bogle, un ancien esclave de la famille Tichborne. - Credit:2015 Eamonn McCabe

Au seizième chapitre du roman de Zadie Smith L'Imposture (Gallimard) survient une scène de baiser des plus inattendues. Eliza Touchet, vive et pétulante Londonienne qui vit sous le règne de la sage Victoria, se remémore les débuts de sa relation amoureuse avec William Harrison Ainsworth, le cousin de son défunt mari.

Ce fin lettré, proche de Charles Dickens, devrait l'écraser de tout le poids de la domination masculine : l'âge, la corpulence, le prestige du romancier et journaliste célèbre, la fortune… Or ce premier baiser ne se passe pas comme prévu.

« Elle l'attrapa par la mâchoire et le sentit plier les genoux. Elle était tout à coup plus grande que lui. Elle entendit un gémissement de plaisir incrédule. Elle serra un peu plus fort – nouveau gémissement. Sans desserrer son étreinte, elle l'obligea à s'abaisser ainsi jusqu'au sol. C'était maintenant la bouche d'Eliza qui recouvrait celle de William ; tout était renversé. »

« Les personnages enterrés à deux pas de chez moi »

« Tout était renversé » : quel beau programme ! Dans ce roman écrit à la façon du XIXe siècle, une torride liaison sadomasochiste remplace la romance à la Jane Austen. Et en fait d'« imposture », il s'agit d'une mise au jour de la vérité. Toute l'intrigue tourne autour d'un fait authentique et très documenté par la presse de l'époque, le procès d'un homme qui prétendait être sir Roger Tichborne, l'héritier d'une fortune colossale.

Mais alors qu'il paraît évident que l'accusé est un simple [...] Lire la suite