Vladimir Poutine menace la Turquie de nouvelles représailles

Lors de son discours annuel devant les deux chambres du Parlement, Vladimir Poutine, qui a parlé d'un crime de guerre, a promis que la Turquie regretterait "plus d'une fois" d'avoir abattu un chasseur-bombardier russe près de la frontière syrienne le 24 novembre. /Photo prise le 3 décembre 2015/REUTERS/Aleksey Nikolsky/Sputnik/Kremlin

MOSCOU (Reuters) - La Turquie regrettera "plus d'une fois" d'avoir abattu un chasseur-bombardier russe près de la frontière syrienne le 24 novembre, a promis jeudi Vladimir Poutine, parlant d'un crime de guerre. "Nous n'avons pas l'intention de nous lancer dans une surenchère (avec la Turquie) mais que personne ne pense pouvoir s'en tirer avec quelques mesures concernant les tomates, des restrictions dans la construction et dans d'autres secteurs après avoir commis un tel crime de guerre", a averti le président russe, lors de son discours annuel devant les deux chambres du Parlement. Quelques minutes plus tard, son ministre de l'Energie, Alexandre Novak, a annoncé la suspension des négociations sur le projet de gazoduc Turk Stream. Moscou avait déjà annoncé le boycott de fruits et légumes turcs dans le cadre des sanctions imposées après la destruction du Soukhoï-24. "Il semble qu'Allah ait décidé de punir la clique turque au pouvoir en la privant de sagesse et de discernement", a poursuivi le chef du Kremlin, après avoir demandé une minute de silence à la mémoire des deux militaires tués au cours de l'incident. Vladimir Poutine, qui a de nouveau plaidé pour la constitution d'une vaste coalition antiterroriste, a en outre invité les puissances occidentales à ne pas faire "deux poids deux mesures" et à ne pas utiliser les organisations terroristes à leurs propres fins, comme le fait selon lui la Turquie. Le ministère russe de la Défense a affirmé mercredi détenir la preuve de l'implication du président turc, Recep Tayyip Erdogan, et de sa famille dans des transactions financières avec l'Etat islamique (EI), ce qu'il a fermement démenti. "PROPAGANDE SOVIÉTIQUE" Lundi, Vladimir Poutine lui-même avait affirmé que la destruction de l'avion russe avait pour but de dissimuler le trafic de pétrole entre la Turquie et les zones tenues par l'EI. "Pendant la Guerre froide, il y avait une machine de propagande soviétique. Tous les jours, elle inventait de nouveaux mensonges (...) C'est une vieille tradition, mais elle pointe à nouveau son nez. Personne n'accorde aucun crédit à cette propagande de type soviétique", a réagi jeudi le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu. Il a toutefois proposé de communiquer tous les détails de l'incident aux autorités russes. Ankara assure que l'appareil a été abattu dans l'espace aérien turc, conformément aux règles d'engagement et après de multiples sommations. Selon Moscou, le Soukhoï-24 n'a jamais quitté l'espace aérien syrien, où il bombardait des positions rebelles. Le Kremlin réclame des excuses que le président turc a exclu de présenter. Vladimir Poutine a refusé de le rencontrer lundi en marge de la COP21 à Paris. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a rencontré jeudi à Belgrade son homologue turc Mevlut Cavusoglu, en marge d'une conférence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il s'agissait de la première rencontre bilatérale à haut niveau depuis l'incident il y a dix jours. "Nous n'avons rien entendu de nouveau" de la part de la Turquie, a déclaré Sergueï Lavrov lors d'une conférence de presse à l'issue de la rencontre. Le chef de la diplomatie turque, pour sa part, a déclaré qu'il était "irréaliste" d'attendre de cette unique rencontre la solution à tous les problèmes qui opposent Moscou et Ankara. Il a souligné la nécessité de maintenir le contact, rapporte la radiotélévision turque TRT. "L'incident du 24 novembre ne doit pas gêner notre combat contre notre ennemi commun Daech, contre le terrorisme et cela ne doit pas être exploité pour des motifs politiques", avait auparavant déclaré le ministre turc. (Christian Lowe, Dmitry Solovyov, Masha Tsvetkova, Lidia Kelly, Denis Dyomkin, Daria Korsunskaya et Denis Pinchuk, Eric Faye, Jean-Philippe Lefief et Guy Kerivel pour le service français)