Visite de Macron en Nouvelle-Calédonie : ces habitants ont des messages à lui faire passer

Alors que le président se rend en Nouvelle-Calédonie, ces habitants espèrent beaucoup de cette visite, tant pour l’apaisement des tensions que pour l’avenir de l’archipel.

Les Calédoniens espèrent que la visite de Macron appaise les tensions.

NOUVELLE-CALÉDONIE - « On aimerait qu’il instaure une mission de dialogue, comme on l’avait demandé à la base ». Le souhait de Gabriel*, un militant indépendantiste Kanak de 27 ans, pourrait bien être exaucé. Après dix jours d’émeutes en Nouvelle-Calédonie, Emmanuel Macron s’est envolé mardi soir pour Nouméa, où il est attendu ce jeudi 23 mai au matin. Le but de cette visite ? « Écouter, échanger, discuter avec les élus calédoniens » et « rétablir l’ordre républicain », comme son entourage l’a précisé à l’AFP.

Émeutes en Nouvelle-Calédonie : Ces jeunes Kanaks dénoncent un « passage en force » et un manque de respect de l’État

Au HuffPost, on a demandé aux habitants de l’archipel s’ils avaient un message à faire passer au chef de l’État. Ils espèrent tous, dans un premier temps, que la situation s’apaise et que la vie normale reprenne son cours. Mais certains ont aussi des revendications politiques.

Pour Pierre, un ingénieur Français qui vit dans les quartiers sud de Nouméa, les trois priorités de la visite d’Emmanuel Macron sont « la sécurité, la santé et puis pour plus tard l’économie ». Il confie : « On est complètement traumatisés par ce qu’on vit au quotidien. On veut manger et vivre normalement avant tout. » Selon lui, les forces de l’ordre en Nouvelle-Calédonie ont besoin de renforts, car « il y a des zones de non-droit ». Il espère également que l’apaisement passera par des annonces sur « des injections d’argent pour l’économie ».

Un retour à normale est important aussi pour ses enfants, qui vivent chez leur mère, à un kilomètre de chez lui. Il mentionne le cas de son fils en terminale qui doit passer le bac cette année : « C’est déjà la deuxième semaine de cours qu’il manque, il ne faut pas que ça traîne trop non plus. »

Et, s’il ne souhaite pas se positionner sur la question politique, Pierre estime toutefois que la visite du chef de l'État va permettre de « générer des rencontres qui n’auraient pas eu lieu sans sa présence ».

Pour les Kanaks, les attentes concernant les questions politiques sont primordiales. Les contestations sont nées d’un projet de loi constitutionnelle visant à dégeler le corps électoral. Le retrait de ce projet, ou le report du congrès - qui devrait avoir lieu en juin prochain, apparaît comme une condition sine qua non à l’apaisement.

« On attend une réponse politique, tout simplement le retrait du projet de loi constitutionnelle. Je suis certain que ça apaiserait les tensions et lèverait les barrages », nous explique Gabriel. « Mais s’il maintient le congrès, ça remettra le feu aux poudres », ajoute-t-il.

Romano*, un Calédonien d’origine indonésienne marié à une Kanak, espère une annonce forte. « Macron a déjà fait preuve d’énormément de mépris envers les indépendantistes. Ce qu’il faut éviter à tout prix, c’est de favoriser le camp des loyalistes. Il doit faire preuve d’humilité et montrer qu’il a compris son erreur », estime celui qui a été très surpris par cette visite.

D’autant plus que le dialogue s’annonce compliqué, tant la blessure est « vive » du côté des Kanaks. « Si tout le camp loyaliste l’attend [Macron] avec impatience, beaucoup d’interlocuteurs indépendantistes ont fermé la voie du dialogue. Alors on espère que son déplacement va permettre de réouvrir les discussions », assure Romano. Il aimerait aussi que le chef de l’État s’excuse de la « méthode employée » pour la réforme constitutionnelle.

Si le retrait de la réforme semble être le minimum pour Romano et Gabriel, tous deux ont des attentes beaucoup plus grandes, qu’ils jugent néanmoins irréalisables. « Ce qu’on aimerait, c’est que le président demande un pardon symbolique au nom de la France pour ce qui est arrivé dans ce pays, explique Romano. Mais je sais qu’il ne vient pas pour ça. »

Gabriel va encore plus loin : « On espère qu’il vienne avec un traité d’indépendance. On ne veut pas d’un accord de Nouméa bis, on veut qu’il y ait l’indépendance, et pas autre chose, c’est ce qui se dit sur les barrages ». Cependant, il reste réaliste : « Je ne pense pas qu’il le fera. Mais c’est un espoir pour la jeunesse. On ne renoncera jamais aux rêves d’indépendance de nos pères. »

*Ces prénoms ont été modifiés

À voir également sur Le HuffPost :

  

Emmanuel Macron en Nouvelle-Calédonie : Édouard Philippe espère « des annonces » lors de sa visite

Nouvelle-Calédonie : une « cyberattaque inédite » a visé l’archipel avant l’arrivée d’Emmanuel Macron, ce que l’on sait