"Une vision d'enfer": la contrôleuse des prisons Dominique Simonnot alerte sur les conditions de détention

"Une vision d'enfer": la contrôleuse des prisons Dominique Simonnot alerte sur les conditions de détention

Au 1er août, la France comptait 60.629 places de prison. Elle dénombrait dans le même temps 74.237 détenus, soit un taux d'occupation des cellules de 122%. Au-delà de ces statistiques, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté Dominique Simonnot tire la sonnette d'alarme quant aux conditions de détention dans les prisons françaises qu'elle a pu visiter.

Dominique Simonnot explique à BFMTV.com avoir visité des endroits surpeuplés "jusqu'à 245 %". "Dans ces conditions, les détenus vivent 21 heures sur 24 à trois ou quatre dans des cellules avec des matelas au sol", raconte-t-elle.

Un "châtiment corporel"

À cette promiscuité s'ajoute le problème de la chaleur, en particulier en période de canicule: "Les détenus n'ont d'autre solution que (...) de mettre des serviettes ou des draps mouillés pour se rafraîchir un peu. C'est une vision d'enfer."

Un "enfer" que les détenus partagent avec de "la vermine qui court partout" et qui les obligent à "se mettre du papier toilette dans les oreilles et dans le nez pour (éviter) que les cafards ne rentrent."

Dominique Simonnot se rappelle également avoir entendu des détenus la dissuader de s'asseoir pour éviter de rentrer chez elle avec des punaises de lit.

"C’est normal de punir des gens qui ont commis des infractions, des délits", remarque la contrôleuse générale. Ce qui l'est moins à ses yeux, c'est que cette punition prenne la forme d'une "vengeance" et souvent d'un "châtiment corporel". Une méthode qu'elle juge complètement contre-productive car "la façon dont les gens sont détenus et enfermés rejaillira forcément sur la façon dont ils vont se conduire dehors."

Des doutes sur les nouvelles places prévues

"Toute la société va payer ça. On paye déjà 110 euros par jour par détenu. Combien nous coûte la récidive quand ils sortent?", s'interroge Dominique Simonnot, qui plaide pour la mise en place de mécanismes pour désengorger les prisons et atteindre un taux d'occupation de 100%.

Sur ce point, la contrôleuse générale ironise sur les diverses "circulaires, directives, incantations" du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti: "Ça n’a servi à rien. La preuve, ça s'aggrave. Je dirais que ni pour lui, ni pour moi, c'est un grand succès."

Dominique Simonnot se montre tout aussi sceptique sur le plan de construction de prisons prévoyant la création de 15.000 places supplémentaires d'ici quatre ans. "Depuis 2010, il y a eu quatre annonces successives par différents gouvernements de la création de 15.000 places de prison", rappelle-t-elle. "Vous savez à combien on en est aujourd'hui, en 2023, de ces annonces successives? Si je compte bien, ça fait 60.000 places annoncées. On en est à 3000."

Article original publié sur BFMTV.com