Les violences dans les manifestations inquiètent la Défenseure des droits

Spectatrice des violences entre manifestants et forces de l’ordre depuis plusieurs semaines, la Défenseure des droits remet en cause certaines méthodes et outils utilisés pour les opérations de maintien de l’ordre.
Spectatrice des violences entre manifestants et forces de l’ordre depuis plusieurs semaines, la Défenseure des droits remet en cause certaines méthodes et outils utilisés pour les opérations de maintien de l’ordre.

FRANCE - Un appel à une désescalade. Confrontée à des images qu’elle juge « inacceptables », la Défenseure des droits Claire Hédon veut jouer la carte de l’apaisement en France, après plusieurs journées de mobilisation contre le texte de la réforme des retraites émaillés de violences.

Dans une interview au Monde mise en ligne ce mardi 28 mars, jour de la dixième journée d’action intersyndicale, la Défenseure des droits appelle surtout à plus de déontologie dans les rangs des forces de l’ordre. « Nous avions reçu 56 saisines depuis le début du mouvement. Dont une quarantaine dans les dix derniers jours », dénombre Claire Hédon. « Et nous n’avons pas encore reçu de saisines sur les manifestations de ce week-end à Sainte-Soline. C’est beaucoup et je suis très inquiète », poursuit-elle.

Elle ajoute d’ailleurs qu’elle s’est autosaisie d’au moins un cas supplémentaire en lien avec les violences à Paris. « Celui de la personne présentée comme sans abri, mise à terre place de la Bastille [le 22 mars]. Et j’envisage de me saisir du cas du jeune homme qui s’est fait rouler dessus par un motard [le 21 mars] », précise-t-elle.

Ce qu’elle reproche à la BRAV-M

Forcément questionnée sur les agissements de la BRAV-M, Claire Hédon préfère botter en touche, le temps des enquêtes en cours. « Nous n’avons pas pris de position générale sur la BRAV-M. Mais plusieurs instructions impliquant cette unité sont en cours ». Elle souligne surtout l’importance de s’intéresser à « la formation, l’encadrement, les ordres qui ont été donnés » à ces unités, précisant avoir « une grosse inquiétude » au sujet du manque de formation souvent dénoncé de la BRAV-M.

Et elle n’oublie pas d’évoquer l’absence remarquée de RIO (le matricule d’identité des forces de l’ordre) sur certains agents. « C’est indispensable pour savoir qui est en cause. Or, dans certaines vidéos, le RIO n’est pas visible », dénonce-t-elle.

Claire Hédon réaffirme enfin son opposition à l’usage de certaines armes en manifestation, notamment les « grenades de désencerclement et des lanceurs de balles de défense (LBD) ». Selon elle, « les pays du Nord, l’Allemagne, la Grande-Bretagne ne les utilisent pas » et « ce n’est pas pour rien ».

L’invitation du préfet de police

« Les témoignages et les images qui nous parviennent montrent des situations inacceptables », assure-t-elle ensuite pour demander « une désescalade de la violence », qui est selon elle, « de la responsabilité de l’État ». La Défenseure des droits assure également qu’elle a conscience que les « forces de l’ordre font un travail excessivement difficile, qu’elles mettent leur vie en danger ». C’est pourquoi, elle invite au respect des règles de déontologie pour revenir au calme : « Le guide dans tout cela, c’est le respect de la déontologie. Cela permet le respect et de rétablir la confiance. C’est essentiel ».

Interrogé sur ces remarques, le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a convié Claire Hédon à venir ce mardi dans la salle de commandement de la préfecture de police pour qu’elle puisse elle-même constater « à quel moment [il] décide d’engager la force en manifestation ».

« Elle verra que j’engage la force quand des individus tout grimés, tout en noir commencent à casser des commerces. Il n’y a pas un pays au monde où on n’intervient pas dans ce genre de situation, a-t-il assuré sur France Inter. Elle constatera que nous intervenons pour disperser un black bloc, que nous nous retirons dès que nous le pouvons ». Mais la Défenseure des droits n’a pas pu se libérer pour répondre favorablement à l’invitation. Elle devrait s’y rendre lors d’une prochaine journée de mobilisation.

À voir également sur Le HuffPost : 

Manifestations en France : le Conseil de l’Europe s’alarme d’un « usage excessif de la force »

Manifestant frappé par un policier à Paris : Laurent Nunez a signalé les faits à l’IGPN