Violences, insultes, menaces... Douze familles boycottent une école à cause de trois élèves perturbateurs

Douze familles d'enfants scolarisés au sein de l'école élémentaire Victor Hugo d'Aucamville, une commune de 9000 habitants située à quelques kilomètres de Toulouse, ont boycotté l'école jeudi. En clair: ils ont refusé de déposer leurs enfants en classe. Car depuis la rentrée de septembre, ces derniers assurent être insultés, violentés et menacés par trois élèves de cette même classe - un double niveau CM1-CM2.

Comme l'a révélé La Dépêche, "toute la classe, corps enseignant compris, serait malmenée par trois élèves". Il est question d'insultes répétées, de coups à plusieurs reprises, de menaces - y compris à destination du corps enseignant - mais aussi de gestes à caractère sexuel.

Deux camps s'opposent

Un père d'élève malmené évoque "des coups de pied, des coups de coude, des intimidations". Une mère dénonce "des violences quotidiennes". Une autre craint que sa fille ne développe une phobie scolaire. Une famille raconte même avoir décidé que leur fillette n'irait plus en classe le lundi.

"Le dimanche, cela devenait trop compliqué", explique le père de l'enfant au quotidien régional.

"Elle s'effondrait en larmes, terrifiée de retourner à l'école. Elle a peur de ces gosses. Ils l'insultent régulièrement, lui hurlent 'ferme ta gueule, fils de pute, connasse'."

Jeudi matin, les mères des enfants mis en cause étaient également sur place et dénoncent quant à elles des "conflits d'enfants" sur fond de racisme "de la part des parents", précise l'une d'elles.

"Nos enfants n'ont rien à se reprocher", se défend-elle pour La Dépêche.

"Comme par hasard, les enfants qui sont ciblés (accusés d'agresser les autres, NDLR) sont d'origine maghrébine", confie cette mère à La Dépêche. Elle maintient que son fils est lui aussi "victime" et mentionne des "provocations verbales et physiques". "On le traite de gros porc, 'tu es nul', 'tu es bête' parce qu'il a une AVS."

Pour Valérie Dreuilhe, adjointe au maire déléguée chargée de l'éducation, la jeunesse et la parentalité, cet argument n'est pas recevable. "Il n'y a pas de racisme dans cette école ni dans aucune école de la commune", affirme-t-elle à BFMTV.com. Elle ajoute n'avoir d'ailleurs jamais eu aucune remontée de ce genre.

"Il ne faut pas tout confondre."

Les familles des enfants incriminés, comme celles des enfants qui se disent victimes, ont été reçues. Mais la rencontre n'a semble-t-il pas été facile. "Le dialogue n'était pas fluide", se souvient Valérie Dreuilhe. "Nous leur avons pourtant relaté les faits avec l'inspectrice mais c'était deux mondes qui se confrontent."

"La situation est suivie depuis le premier jour"

Les familles qui ont fait la grève de l'école jeudi déclarent pour leur part se sentir "méprisées par l'institution", estimant que la situation est "banalisée" et que "peu de solutions concrètes" ont été apportées.

Une absence de réponse que dément Arnaud Leclerc, inspecteur d'académie de la Haute-Garonne. Il assure à BFMTV.com que l'inspectrice de la circonscription s'est rendu plusieurs fois sur place, que des réunions se sont tenues avec les représentants des parents et que des conseillers pédagogiques sont également intervenus à plusieurs reprises.

"La situation est suivie depuis le premier jour", se défend Arnaud Leclerc, qui fait allusion à deux "phases" des troubles - fin septembre puis début mars.

Dès "les premiers échos" des nouveaux "débordements" au mois de mars, un professeur supplémentaire a ainsi été envoyé dans la classe. Un maître surnuméraire qui restera "jusqu'à ce qu'on retrouve un certain calme", précise-t-il.

"Il y a des enfants en souffrance"

L'inspecteur d'académie ajoute avoir également demandé "une surveillance accrue" de tous les temps en dehors de la classe. "Je félicite d'ailleurs toute l'équipe de cette école qui est très impliquée et professionnelle." Et mentionne différentes stratégies éducatives, comme l'isolement des enfants perturbateurs dans le bureau de la directrice ou encore la "fiche de réflexion" - l'enfant formule à l'écrit l'acte répréhensible et le moyen de sa réparation.

Il n'en reste pas moins que Valérie Dreuilhe, l'adjointe au maire, est inquiète. Un policier municipal est donc présent depuis hier lors des entrées et sorties d'école et le sera encore la semaine prochaine. "Il n'y a pas eu de problème hier ni ce matin mais on redouble de vigilance."

"Il faut trouver une solution le plus rapidement possible", tempête-t-elle, "je ne cesse de le dire depuis des mois, j'ai l'impression de me répéter."

Mais la mairie se dit impuissante, l'école relevant du rectorat. "Il y a des enfants en souffrance et nous avons si peu de pouvoir. La situation est devenue insupportable pour les familles. Il y a des élèves qui vont entrer au collège avec peut-être des traumatismes."

Du harcèlement?

Jeudi, trois conseillers pédagogiques ont également été envoyés dans la classe "pour accompagner les équipes", précise Arnaud Leclerc. Des conseillers qui pourront de nouveau être mobilisés "s'il y a encore des fragilités".

Mais pas question de sanctionner les enfants - il n'y a pas de conseil de discipline dans le premier degré - ni de les changer d'école, une piste qui n'est pas envisagée par le rectorat. "Déplacer le problème, ce n'est pas la solution la plus adaptée", explique l'inspecteur d'académie, qui rappelle que l'école doit être "pleinement inclusive" et accueillir tous les enfants.

Arnaud Leclerc rappelle d'ailleurs que les problèmes dans cette école ne relèvent pas du harcèlement, contrairement à ce qu'affirment certains parents. "Nous avons évalué la situation pour savoir si nous étions oui ou non dans du harcèlement. Et ce n'est pas le cas." Il évoque des élèves "fortement perturbateurs" - dont un en particulier - causant des "difficultés" avec des "comportements inadaptés" mais qui ne visent pas un seul élève.

Il promet par ailleurs que si les parents souhaitent un échange plus poussé avec lui, "on mettra tout en place pour que cet échange ait lieu", et promet de nouvelles rencontres avec l'inspectrice.

Du côté des familles, une association de parents a organisé début mars, avec une association de lutte contre le harcèlement scolaire, une soirée d'informations et d'écoute sur le harcèlement à destination des parents et enfants scolarisés à Aucamville. Elle n'a pas souhaité répondre aux questions de BFMTV.com mais ajoute œuvrer "pour une amélioration de la situation, avec les moyens qui sont les nôtres".

Article original publié sur BFMTV.com