Violences envers des manifestants: la Défenseure des droits "très inquiète" des saisines qu'elle reçoit

Dans un entretien au Monde, Claire Hédon se dit "choquée des vidéos qui circulent" et veut "étudier la proportionnalité" de l'usage de la force de la police face aux agissements des manifestants.

La Défenseure des droits demande une réaction de l'État. Claire Hédon, qui dirige cette institution chargée de défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés, se dit "très inquiète" des saisines qu'elle reçoit depuis 10 jours au sujet des manifestations contre la réforme des retraites. Dans un entretien accordé au Monde, elle indique avoir reçu, ce lundi matin, "56 saisines depuis le début du mouvement.", dont "une quarantaine dans les dix derniers jours".

"Nous sommes saisis par des personnes qui se disent victimes ou témoins de privation de liberté dans les nasses, de violences, d’interpellations suivies de gardes à vue…", détaille Claire Hédon.

Elle avait déjà mis en garde le 21 mars sur "les conséquences d’interpellations qui seraient préventives de personnes aux abords des manifestations" pour les libertés individuelles. Dans un communiqué, son institution rappelait également l'importance, pour les forces de l'ordre, du "respect des règles de déontologie".

Des "situations inacceptables"

Auprès du Monde, Claire Hédon "condamne tout acte de violence" et adresse ses pensées à "toutes les victimes, que ce soient les manifestants ou les forces de l’ordre". Elle rappelle aussi que "le premier objectif du maintien de l’ordre" est le "respect de la liberté de manifester avec, en corollaire, la protection et la sécurité des personnes".

"Les témoignages et les images qui nous parviennent montrent des situations inacceptables", juge la Défenseure des droits.

Coups de poing, coups de matraque, insultes: plusieurs vidéos mises en ligne sur les réseaux sociaux ces derniers jours montrent des actes de violence envers des manifestants.

"Il y a urgence"

Claire Hédon se dit ainsi "choquée des vidéos qui circulent" et veut "étudier la proportionnalité" de l'usage de la force de la police face aux agissements des manifestants.

Son institution est chargée d'enquêter sur le respect de la déontologie par les professionnels de sécurité, après saisine ou auto-saisine. Les enquêtes peuvent avoir différentes issues, mais la demande de sanctions disciplinaires est "la plus courante dans le traitement des dossiers liés au respect de la déontologie par les professionnels de la sécurité", explique l'institution indépendante sur son site.

"Les forces de l’ordre sont aussi gardiennes de la paix. Les deux termes ont du sens", note Claire Hédon.

Le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a invité ce mardi la Défenseure des droits dans la salle de commandement de la préfecture de police de Paris afin qu'elle puisse "constater" de quelle manière les forces de l'ordre interviennent, lors de la 10e journée de mobilisation contre la réforme des retraites.

Invité de France Inter, le préfet de police a fait valoir qu'ainsi Claire Hédon verrait "à quel moment (il) décide d'engager la force". "Elle verra que j'engage la force quand des individus tout grimés, tout en noir commencent à casser des commerces", a-t-il poursuivi. "Il n'y a pas un pays au monde où on n'intervient pas dans ce genre de situation".

"Nous intervenons avec beaucoup de proportion", a-t-il insisté.

Claire Hédon appelle à une "désescalade"

La Défenseure des droits appelle à une "désescalade", qui doit être selon elle menée par l'État: "C'est aux pouvoirs publics de dire concrètement ce qu’il faut faire", mais "il y a urgence".

Elle en veut pour "preuve" les événements de ce week-end à Sainte-Soline, où, après de violents affrontements entre les forces de l'ordre et des personnes qui manifestaient contre une réserve d'eau en construction, trois manifestants ont été grièvement blessés. L'un d'entre eux, un homme âgé de 30 ans, était dans le coma ce lundi.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - "Ça dévoile le vrai visage de Macron" : la colère des manifestants après l'annonce du recours au 49.3