Violences conjugales : comment l’alcool peut favoriser le passage à l’acte

L'alcool et la drogue étaient impliqués dans la majorité des féminicides en 2018. Un lien qui s'explique par les effets de ces substances sur le cerveau
L'alcool et la drogue étaient impliqués dans la majorité des féminicides en 2018. Un lien qui s'explique par les effets de ces substances sur le cerveau

Parmi les féminicides commis en 2018, 55% impliquaient une addiction à l’alcool ou la drogue de la part de l’auteur ou la victime. Un lien de causalité qui s’explique par les effets de ces substances sur le cerveau.

Alors que le Grenelle contre les violences conjugales s’achèvera le 25 novembre, les associations et familles de victimes pointent un phénomène qui n’a pas suffisamment été pris en compte à leurs yeux : le lien entre l’addiction à l’alcool ou la drogue et les féminicides.

Sur 121 meurtres de femmes commis par un conjoint ou ex-conjoint en 2018, la victime ou le meurtrier souffrait d’addiction à la drogue ou l’alcool dans 55% des cas. “On a maintenant la certitude que l’alcool est un facteur causal et non un facteur associé dans les violences conjugales”, expliquait Michel Reynaud, président du Fonds actions addictions, au Journal du dimanche.

Des actions sur le cerveau

Un chiffre qui n’étonne pas le Michel Lejoyeux, professeur de psychiatrie et d’addictologie, président d’honneur de la société française d’alcoologie et auteur de “Révélez vos super-pouvoirs”.

Et pour cause : l’alcool, comme la drogue, agit sur le cerveau et donc le comportement. “Boire augmente l’impulsivité, c’est-à-dire que ça réduit le laps de temps entre l’envie d’avoir un comportement et la réalisation de ce comportement”, nous décrit le spécialiste, “ça augmente donc le risque de passage à l’acte et ça implique aussi que l’on mesure moins l’impact de ses gestes”.

Ce n’est pas le seul effet : l’alcool “mène aussi à des moments de dépression, qui peuvent être déterminants dans les troubles du comportement”, ajoute le professeur de psychiatrie et d’addictologie, “ça peut faire augmenter des idées comme la jalousie”.

Les boissons alcoolisées entraînent également des “troubles de l’analyse des émotions”, qui mènent “à moins de contrôle”, énumère le professeur Michel Lejoyeux.

Un sujet pas assez pris au sérieux

Pour lui, le problème c’est que dans des cas comme les féminicides, “l’addiction à l’alcool est l’objet d’un déni considérable”, contrairement à la drogue. “Pourtant, c’est aussi dangereux pour le cerveau”, dénonce le spécialiste. Mais l’alcool est encore trop vue comme une boisson festive.

Le professeur de psychiatrie et d’addictologie tient notamment à rappeler que “la violence peut-être induite par le vin, comme par n’importe quel autre alcool”. Une référence aux propos de Didier Guillaume, le ministre de l’Agriculture, qui estimait, en janvier dernier, que le vin n’était “pas un alcool comme les autres”.

Parmi les 60 propositions rendues par les groupes de travail le 29 octobre dernier, dans le cadre du Grenelle contre les violences conjugales, aucune n’évoque la consommation d’alcool.

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