Viol des personnes âgées : un phénomène en augmentation ?

Sujet tabou, le viol des personnes âgées en particulier est un phénomène difficile à quantifier. D’autant que plusieurs éléments compliquent la libération de la parole.

Les violences sexuelles n'épargnent pas les personnes âgées (Photo by Klaus-Dietmar Gabbert/picture alliance via Getty Images)
Les violences sexuelles n'épargnent pas les personnes âgées (Photo by Klaus-Dietmar Gabbert/picture alliance via Getty Images)

Plusieurs cas de personnes âgées violées à leur domicile ou dans les établissements de santé ont été rapportés ces derniers mois. Lundi 5 février, une octogénaire habitant à La Madeleine dans le Nord a déposé plainte pour des faits de viols, de violences et des humiliations qui se sont produits à son domicile, rapportait BFM Grand Lille. Début janvier, c’est une femme de 75 ans qui a été violée chez elle, à Ozoir-la-Ferrière en Seine-et-Marne, par un individu qui a pris la fuite. Son mari, handicapé et alité, n’a pas pu lui venir en aide, expliquait LCI.

En mai dernier, Le Parisien se faisait l'écho d’une histoire similaire. Deux hommes se sont introduits chez une femme de 83 ans handicapée, à La Courneuve en Seine-Saint-Denis, en passant par la porte d’entrée qui n’était pas verrouillée. Ils l’ont violée avant de prendre la fuite. D’autres cas ont été rapportés dans les Bouches-du-Rhône, le Tarn, la Creuse ou encore en Loire-Atlantique.

Une multiplication des cas

“En moyenne, le nombre de femmes âgées de 18 à 74 ans qui au cours d'une année sont victimes de viols, tentatives de viol et/ou agressions sexuelles est estimé à 217 000 femmes”, estime le gouvernement. Les chiffres se focalisant sur la tranche d’âge des senior ne sont pas connus.

Interrogé par Atlantico, le criminologue Xavier Raufer parle d’une multiplication des cas de viol de femmes âgées. “Classiquement, on avait quelques affaires par an, dont les coupables étaient des pervers, au sens psychiatrique (...) aussi, de rares ivrognes. Là on en est à plusieurs de ces viols/agressions par mois".

Outre le domicile, les établissements de santé ne sont pas épargnés. BFM raconte l’histoire de la mère d’une femme handicapée qui a porté plainte contre l’AP-HP. La victime, âgée de 50 ans, trisomique et atteinte d’un début d’Alzheimer a été abusée sexuellement par un autre patient. L’homme a été surpris sur le fait en juillet dernier par une aide-soignante du service de gérontologie de l’hôpital Sainte-Périne-Rossini dans le XVIe arrondissement de Paris.

Les raisons d’un tabou

Le phénomène est d’autant plus difficile à quantifier du fait du profil des victimes. "Il y a une raison générationnelle, la génération actuelle des personnes âgées est une génération moins concernée par la libération de la parole, c'est une génération où on ne dénonce pas", explique le criminologue Julien Chopin à BFM.

Parmi les autres raisons invoquées, la santé des personnes âgées qui présentent des troubles cognitifs et ont parfois du mal à communiquer. L’état des patientes combiné aux délais de la procédure judiciaire souvent très longs ne vont pas en faveur de la libération de la parole. Les concernées ne sont pas toujours en capacité d'aller témoigner au tribunal.

Le choc de l’agression peut, de plus, pousser les victimes à se laisser mourir sans jamais parler. Deux nonagénaires agressées sexuellement au service gériatrie de l'hôpital Victor-Dupouy d'Argenteuil (Val-d’Oise) sont mortes quelques jours seulement après leurs agressions, en octobre 2023. Aucun lien formel avec ce qu’elles ont subi n’avait pour autant été démontré.

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