Publicité

Vincent Lagaf' : "Mon père géniteur, que j’appelle un trou du c*l, a essayé de faire avorter ma mère quand il a su qu’elle était enceinte"

Viols, agressions, deuils insurmontables, accidents de la vie : dans "Trauma", anonymes et célébrités reviennent pour Yahoo sur un traumatisme qui a bouleversé leur vie.

Figure médiatique et animateur emblématique des émissions de TF1 ("Le Bigdil", "Le Juste Prix"...), Vincent Lagaf' a eu une enfance atypique. Car derrière l'étiquette de "comique troupier" ou de "gars qui gueule tout le temps", que certains lui collent volontiers, se cachent des cicatrices profondes laissées par la vie. Abandonné avant sa naissance par son père, puis par sa mère dans une dernière preuve d'amour, adopté à l'âge de trois ans, il a fait face par la suite aux deuils, de ceux dont on ne se remet pas toujours. Son histoire, il a décidé de la raconter dans un livre, "Je m'appelais Franck". Pour "Trauma" de Yahoo, l'animateur s'est livré, se souvenant des moments où il a frôlé la mort, et de son histoire familiale.

Animateur, Vincent Lagaf' l'a quasiment toujours été. D'abord, pour le Club Med de Vittel (Vosges), puis, plus tard, dans les années 90, pour la télévision. Il a officié ainsi sur France 3 dans un premier temps, et finalement pour des émissions emblématiques de TF1, telles que le "Bigdil" ou "Le Juste Prix", réunissant des millions de Français devant leur poste. Entre les deux, les planches. Vincent Lagaf' a aussi joué dans des cabarets avant de se produire dans des théâtres, où il a présenté des sketchs et des chansons humoristiques. (Retrouvez l’intégralité de l’interview en fin d’article)

Mais dernièrement, c'est un sujet intime et personnel, loin du monde des paillettes et du showbusiness, que Vincent Lagaf', de son vrai nom Vincent Rouïl, a souhaité aborder dans son livre, "Je m'appelais Franck", aux éditions XO. L'animateur y livre le récit de son enfance, dans une famille qui l'a adopté à l'âge de trois ans, avec qui, malheureusement, le lien affectif ne s'est jamais vraiment développé.

"Il a essayé de la faire avorter"

L'animateur connaît l'histoire de sa naissance et de son adoption : sa mère, Lucienne, a failli ne jamais lui donner la vie. Le père biologique de Vincent Lagaf', un homme marié, père de deux enfants, qui couchait avec son employée, Lucienne, a tout fait pour l'en empêcher. "Quand il a su qu'elle était enceinte, il a essayé de la faire avorter avec ce qu'on appelait autrefois un 'faiseur d'anges'. (...) Je me suis bien accroché et moi, les aiguilles à tricoter, je les ai repoussées. (...) Mon père, que j'appelle mon géniteur, ce trou du c*l, -et encore c'est un manque de respect pour l'anus- je ne le connais pas. Je pars du principe que quand tu es marié et que tu as deux enfants, tu ne pars pas dans une galère comme celle qu'il a fait vivre à Lucienne, qui était sa maîtresse, son employée. Je crois qu'il a coupé tous les ponts le jour de ma naissance, quand je suis arrivé."

Cette absence a laissé des séquelles, des blessures qui n'ont jamais pu guérir : "Je manque d'affection, de souvenirs, de mains qui passent dans la nuque, je manque de promenades où je tiens la main de mon père ou de ma mère. Le fait d'avoir vécu tout ce que j'ai vécu dans ma plus tendre enfance, ça m'a blindé, ça m'a permis d'avoir un autre regard sur certaines choses", estime Vincent Lagaf'.

"Ma maman m'a aimé"

En revanche, l'animateur a de la tendresse pour sa mère biologique et comprend son choix : "Ma maman m'a aimé. Au bout de deux mois, j'étais terriblement malade, j'avais un très gros problème, que j'ai gardé toute ma vie puisqu'il me manque la moitié d'un poumon. Comprenant bien qu'elle n'arriverait pas à subvenir à mes besoins et qu'elle avait réellement envie qu'il y ait le meilleur de la vie pour moi, elle a préféré me confier, plutôt que de prendre le risque de m'élever d'une manière qui ne lui convenait pas et je pense que ça, c'est le truc le plus dur qui puisse y avoir pour une femme qui aime son enfant. Le déposer dans un couffin, le regarder une dernière fois, l'embrasser, et lui dire 'on ne se reverra plus'."

S'il était trop jeune pour garder une image précise de ces adieux, Vincent Lagaf' assure avoir retenu un son qui lui brise encore le coeur, qu'il a entendu maintes fois avant d'être adopté, à l'âge de trois ans. "Je me souviens, et ça, ça m'a suivi toute ma vie, encore aujourd'hui, c'est difficile à vivre. C'est le cri de l'enfant. Le pleur de l'enfant désespéré, triste, qui a un chagrin fou. Ils sont là à dire : 'Pourquoi personne ne m'aime ?, Pourquoi je suis là ?, 'Qu'est-ce que j'ai fait ?'. Ça m'est toujours difficile à supporter, ça me fait venir les larmes aux yeux, c'est terrible."

“Avec mes parents adoptifs, il y a toujours eu quelque chose de faux”

À trois ans donc, celui qui est né Franck, le 30 octobre 1959, est rebaptisé Vincent par sa famille d'adoption. "Je crois que c'est une erreur fondamentale que de changer le prénom d'un enfant à l'âge de trois ans. En 1959, je m'appelle Franck et à l'âge de trois ans, j'arrive chez François et Monique Rouil, et je m'appelle Vincent. Aujourd'hui encore, 60 ans plus tard, si j'entends quelqu'un qui dit : 'Franck !', je vais tourner la tête, c'est ancré en moi. C'est une des choses qui a provoqué ce déséquilibre chez moi, ce je m'en foutisme", analyse-t-il.

Et de poursuivre : "De là découle toute cette relation que j'ai eue avec mon père et ma mère adoptifs, il y a toujours eu quelque chose de faux. J'ai très vite compris, quand on me présentait à la famille, qu'on présentait le nouvel élément. Il y a une photo (...) où on voit que je fais un défilé de mode. (...) Je retourne dans ma chambre, et juste avant que je ferme la porte, il y en a une, je ne sais pas laquelle, qui a dit : 'Il est gentil ?' (...) C'est ce genre de petits événements qui ont fait que j'ai toujours été à fleur de peau. Je déteste encore aujourd'hui qu'on se permette de porter un jugement sur moi et c'est aussi pour ça que j'ai écrit ce livre. J'en avais un peu marre d'être le comique troupier, le mec bas de gamme, le mec qui explique avec les mains, le mec qui gueule tout le temps... Lis ! Apprends à me connaître et tu comprendras pourquoi je ne veux pas perdre de temps à répéter les choses vingt fois."

"Ce cheval a été mon centre de vie. On était deux frères, deux potes"

En grandissant, Vincent Lagaf' devient très casse-cou et tête brûlée. Il se prend ainsi de passion pour l'équitation et développe une relation très forte avec son cheval. "Il y a trois ans de pur amour, je l'ai gardé de 12 à 15 ans. Ce cheval a été mon centre de vie. Il ne demandait rien d'autre que d'avoir des câlins, de partager quelque chose. Puis on a fait des conneries. On a rigolé, on s'est baignés, on a escaladé. J'avais même l'impression qu'il me faisait des gags, ça me faisait mourir de rire. On était deux frères, deux potes." L'adolescent donne tout l'amour qu'il n'a pas eu, qu'il n'a pas su recevoir, à ce compagnon de jeu et de vie. Jusqu'à la catastrophe. Alors qu'il participe à une compétition de saut d'obstacles, chose qu'il avait l'habitude de faire avec sa monture, il perd ce qu'il a "de plus précieux au monde".

L'animateur se souvient parfaitement de cet événement traumatisant. "On arrive sur le dernier obstacle (...) Il y a cette femme qui a un chien qui lui échappe. Il part droit dans le parcours. Au moment où je suis en l'air, il est sous le cheval. Il a voulu l'éviter. Et au lieu de poser les antérieurs comme il faut, il a rippé, il a roulé, j'ai été carrément éjecté et je tombe dans les gens. Je l'entends hurler, je me retourne et il est sur le flanc, il tremble et puis il ne bouge plus. Il est mort sur le coup, en quinze secondes. Je ne suis jamais remonté."

"Je suis mort deux fois"

Confronté à la mort, la vie semble pourtant être un jeu pour celui qui a failli y passer deux fois. "Je la connais bien la mort, c'est une copine, on s'entend bien", plaisante-t-il. Il détaille : "Je suis mort deux fois, une première fois à la clinique du Belvèdere, dans la nuit du 31 au 1er avril, en 1960-61. Sur le suivi médical, il est écrit 'légère cyanose', et à minuit 15 il est écrit 'mort clinique'. Dans la nuit, je reprends vie, je respire, et le 1er avril, il est écrit 'adoptable'." "La deuxième fois que je suis mort, c'est sur la table d'opération. Je dois faire l'émission 'L'aventure Robinson', je fais un check-up. Mon cardiologue me demande : 'T'as pas une douleur dans la cage thoracique ?'."

L'animateur se fait opérer. En salle d'anesthésie, il ressent une étrange douleur : "Au moment où je tombe, j'ai l'impression qu'il y a quelqu'un qui me saute sur la cage thoracique". À son réveil, il en fait part à son cardiologue et ami, qui lui apprend qu'il a, en réalité, fait un arrêt cardiaque. "J'ai l'impression d'avoir pris l'autobus dans la gueule", décrit Vincent Lagaf', qui résume : "Je suis mort quelques secondes, deux fois".

"Rien à br*nler quoi qu'il arrive"

Malgré ces deux expériences de mort clinique, Vincent Lagaf' a continué toute sa vie à prendre des risques inconsidérés, peu importe les conséquences. "'Rien à br*nler quoi qu'il arrive', je me le suis fait tatouer. (...) J'ai une idée, je vais le faire. Peut-être que ça ne marchera pas, mais pour que ça ne marche pas, il faut que j'essaye. J'ai une bonne étoile, il y a aussi beaucoup d'insouciance, d'incohérence, et de connerie aussi. Quand on te dit : 'La piste, elle est fermée', elle est fermée. Avec l'âge, je me suis toujours dit : 'Il faut tenter la chose, mais sans mettre les autres en danger'. (...) Rien à br*nler quoi qu'il arrive, mais enfin regarde quand même où tu mets les pieds."

L'animateur intrépide essaye désormais de toujours écouter ses envies, mais en se préservant, en profitant au maximum de sa bonne santé et en pensant à l'avenir : "Je n'ai pas peur de la mort, j'ai peur de m'abîmer et de finir lentement rattaché à des tuyaux, à des traitements... Je voudrais que ça s'arrête, comme ça (il frappe dans sa main; ndlr) net", conclut-il.

Retrouvez l'interview Trauma de Vincent Lagaf' en intégralité :

Interview : Alexandre Delpérier

Article : Maïlis Rey-Bethbeder

À lire aussi :

>> Vincent Lagaf' abandonné à la naissance : pourquoi a-t-il changé de nom ?

>> Vincent Dedienne se confie sur son enfance "compliquée" : "Le rire m'a vengé"

>> Bruno Solo a adopté le fils de sa compagne : "Je l'aime, je ne fais pas de distinguo"