Viktor Bout contre Brittney Griner ? Qui est l’homme que la Russie veut échanger

(FILES) In a file picture taken on February 16, 2010 Russian Viktor Bout, the alleged arms dealer, looks on while sitting in a cell at the Criminal Court in Bangkok. Thailand said on February 18 that Russian alleged arms dealer Viktor Bout could face fresh extradition proceedings after US prosecutors filed new charges against the so-called

NICOLAS ASFOURI / AFP

Dans une photo d’archive prise le 16 février 2010, Viktor Bout, trafiquant d’armes russe, patiente dans une cellule du tribunal pénal de Bangkok avant son extradiction vers les États-Unis.

INTERNATIONAL - Une star du basket contre un trafiquant d’arme qui a inspiré Hollywood. Au lendemain de la condamnation de la basketteuse américaine Brittney Griner par un tribunal russe, l’hypothèse d’un échange de prisonniers hautement médiatiques fait son bout de chemin entre Washington et Moscou.

Condamnée à 9 ans de prison dans cette très controversée affaire de « trafic de drogues », Brittney Griner pourrait bien ne jamais purger cette peine dans son intégralité. Diplomates américaines et russes négocient actuellement au sujet d’un échange de prisonniers dans lequel se trouverait également un autre américain, Paul Whelan, un militaire qui purge actuellement une peine de 16 ans de prison en Russie pour « espionnage » depuis 2018.

Un échange à deux (Américains) contre un (Russe) qui semble pleinement contenter le Kremlin. Seul dans la balance, Viktor Bout est un homme bien connu sur la scène internationale, mais c’est surtout un prisonnier tout sauf lambda que la Russie cherche à récupérer depuis plus d’une décennie.

Le vrai « Lord of War »

Derrière l’homme qui pourrait permettre de faire revenir aux États-Unis Brittney Griner et Paul Whelan, se cache un marchand d’armes russe de 55 ans à la moustache saillante. Arrêté en 2008 en Thaïlande puis emprisonné en 2011 par les États-Unis pour quatre chefs d’accusation, dont trafic d’armes et complot en vue de tuer des citoyens américains, Viktor Bout est redouté autant qu’il fascine.

Qualifié comme « l’un des marchands d’armes les plus prolifiques au monde » par le procureur général Eric Holder lors de son procès, il a également hérité d’un autre surnom, comme le mentionne le New York Times : « le marchand de la mort ». Un titre reçu en raison de sa capacité à filer entre les mains des autorités durant de nombreuses années.

Les surnoms ne manquent pas pour qualifier cet homme mystérieux dont même les origines sont floues. Selon les biographies, il serait né en 1967 à Douchanbé, dans l’actuelle capitale du Tadjikistan. Après un passage à l’Institut militaire des langues étrangères de Moscou, dans lequel il apprend notamment à parler de nombreuses langues, il devient à l’âge de 24 ans et suite à la chute de l’URSS, un trafiquant d’arme habile et polyglotte.

Photo
Garth Stead / Lions Gate Films Inc.

Garth Stead / Lions Gate Films Inc.

Nicolas Cage, dans le rôle de Yuri Orlov dans le film « Lord of War », adapté -en partie- de la vie de traficant d’armes de Viktor Bout.

Des aspects de sa vie que l’on retrouve partiellement dans le film Lord of War, sorti en 2005 et dans lequel le personnage de Nicolas Cage (Yuri Orlov) incarne un trafiquant d’arme d’origine ukrainienne, proche de l’image renvoyée par Viktor Bout durant ses années d’activités. Même si dans ce film d’Andrew Niccol (célèbre pour avoir réalisé Bienvenue à Gattaca et écrit le scénario de The Truman Show), le personnage principal est aussi inspiré d’autres trafiquants d’armes célèbres.

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« Le briseur de sanctions »

Dans son métier, Viktor est célèbre pour avoir vendu un large panel d’armes issu des stocks abandonnés par l’armée soviétique après la chute de l’URSS. Des armes revendues à travers le monde, grâce notamment à un stock d’avions de la flotte aérienne soviétique servant de moyen de transport à Viktor Bout.

Parmi ces principaux faits d’armes : la livraison illégale d’armes dans plusieurs zones tendues durant les années 90 et le début des années 2000 : Liberia, Rwanda, Angola, Sierra Leone ou encore Afghanistan, Sri Lanka ou Colombie. Une réputation vite acquise qui pousse la CIA a s’intéresser au cas Bout.

Capable de retourner n’importe quel embargo sur les armes, il a autant travaillé avec des groupes rebelles, des seigneurs de guerre africains qu’avec des États. Une capacité qui lui vaut également le surnom de « briseur de sanctions ».

Devenant rapidement l’un des hommes les plus recherchés au monde, il a aussi profité de situations humanitaires urgentes pour faire du profit, comme lorsqu’il servit de support logistique pour livrer du matériel de l’ONU en Somalie en 1993. Préférant toujours les affaires à la politique, il a permis aux États-Unis d’obtenir des moyens de transport en Afghanistan jusqu’en 2005, fourni des armes aux talibans et collaboré pour le Programme alimentaire mondial, l’organisme d’aide alimentaire de l’ONU et de la FAO.

A Italian United Nations soldier observes the
ERIC CABANIS / AFP A Italian United Nations soldier observes the "Green Line" separating the north from the south of the Somali capital 03 July 1993, in Mogadishu. The road is deserted since clashes 02 July in which three soldiers were killed. (Photo by ERIC CABANIS / AFP)

ERIC CABANIS / AFP

Un soldat italien des Nations Unies observe la « ligne verte » séparant le nord du sud de la capitale somalienne, dans le cadre du déploiement de l’opération « Restore Hope », pour laquelle Viktor Bout a été prestataire de services pour le transport d’hommes et de matériels de l’ONU.

Un trafiquant à la botte du Kremlin ?

Arrêté en 2008 à Bangkok après une opération XXL de la DEA (Drug Enforcement Administration), il est finalement extradé vers les États-Unis et condamné à 25 ans de prison, malgré deux années de guerre diplomatique avec la Russie, qui n’a jamais eu de cesse de chercher à obtenir sa libération.

Un intérêt de l’État russe loin d’être anodin, quand on connaît les nombreuses cordes à son arc : maîtrise de plusieurs langues, connaissance pointue du commerce international d’armes et capacités inouïes pour passer sous les radars.

Son passage au sein de l’Institut militaire des langues étrangères de Moscou fait de lui un potentiel agent du GRU, le renseignement militaire soviétique. Selon Mark Galeotti, un expert des services de sécurité russes, cité par le New York Times, il y a des signaux forts qui peuvent laisser penser que Bout serait un agent, ou tout du moins un électron libre en étroite collaboration avec l’agence de renseignement russe.

« C’est aussi l’opinion des autorités américaines et cela explique les raisons pour lesquelles la Russie a fait si assidûment campagne pour le récupérer », ajoute ce maître de conférences sur la Russie et la criminalité transnationale à l’University College de Londres. D’ailleurs, selon l’expert, « son cas est devenu totémique pour les services de renseignement russes, soucieux de montrer qu’ils n’abandonnent pas les leurs ».

À voir également sur Le HuffPost : La star du basket américain Brittney Griner arrêtée en Russie

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