Vaurien de Mehdi Senoussi : "Faire passer des messages de tolérance nous a donné envie de ne jamais lâcher"

AlloCiné : Vaurien est le premier long métrage que vous réalisez. Comment ce projet est-il né et qu'est-ce qui vous a donné envie de faire ce film mélangeant les genres (polar, film social, etc.) ?

Mehdi Senoussi : Avec mes co-scénaristes Haris Cheguettine et Akim Sakref, on a commencé à travailler sur Vaurien en 2006. On a trouvé cette idée qui était originale et légère à l'époque. Malheureusement depuis, la réalité a rejoint notre fiction (la prise d'otage d'une agence Pôle emploi à Paris en 2011) et avec tout ce qu’on a vécu récemment, le film a pris une dimension plus dramatique. Nous avons donc pensé à une direction plus dure et plus sérieuse.

Ce qui nous a donné envie de ne jamais lâcher, c’est justement de faire passer des messages de tolérance et de "vivre ensemble". Comme je le dis souvent en ce moment, Vaurien : petit film, grand message. En ce qui concerne le mélange des genres j’adore le fait de transmettre aux spectateurs des émotions et plusieurs styles. C’est ce qui fait que le spectateur va voyager pendant plus d’une heure et demie. J’ai été influencé autant par le cinéma français que le cinéma italien, anglais, espagnol et bien évidemment américain.


Mehdi Senoussi

Quelles ont été les principales difficultés rencontrées au moment de la conception du film ?

Personne ne voulait de ce film. Parler de chômage et de discrimination, ce n’est pas vendeur. Nous avons donc rencontré énormément de difficultés et faire un film sans argent c’est très compliqué. Et encore plus en 14 jours ! D’où le fait d’avoir pris le parti du huis clos. C’est dans la difficulté qu’on en ressort plus inventif !

Vaurien comprend un casting impressionnant, avec plusieurs "gueules" du cinéma français (Carlo Brandt, Moussa Maaskri...). Comment avez-vous choisi ces acteurs et actrices ?

J’ai eu la chance dans ma petite carrière de rencontrer de grands acteurs, très humains, accessibles. Pour le reste : le scénario, notre énergie et la directrice de casting Sylvie Brocheré ont été des atouts majeurs.

Parler de chômage et de discrimination, ce n’est pas vendeur. Nous avons donc rencontré énormément de difficultés et faire un film sans argent c’est très compliqué.

Pourquoi avoir fait le choix d'interpréter le personnage principal ? Avez-vous beaucoup de points commun avec lui ?

Ce n’était pas prévu que j’interprète le personnage principal mais le manque de moyens et de temps m'ont décidé à le faire. De toute façon Red c’est moi : dans la galère, l’acharnement, la détermination, dans ses faiblesses, ses craintes et son entêtement à vouloir transmettre son message.

Quel(s) message(s) avez-vous voulu faire passer via ce film aux thématiques très actuelles ?

La tolérance, le vivre ensemble, l’espoir et la cohésion sociale. Dans la rue, on croise beaucoup de gens et on ne prend jamais la peine de les connaître. On a d'ailleurs pas le temps. Souvent on a tendance à les mettre dans des cases : celle-là n'a pas l'air sympa, celui-ci a l'air méchant... Lorsque ces "archétypes" se retrouvent coincés dans un même espace, ils sont bien obligés, à un moment donné, de se regarder, de s'écouter, de se découvrir et même de se comprendre. Et lorsque les masques tombent, on arrive à vivre ensemble, à se respecter. Vaurien, c'est un hymne à la tolérance, à l'ouverture d'esprit.


Karina Testa, Phénix Brossard, Annie Mercier

Quels étaient vos principaux parti pris esthétiques ?

Le fait de tourner un huis clos implique des choix. J'ai voulu une caméra portée, toujours en mouvement, comme le regard témoin d'un autre personnage. On a dû jouer sur la lumière pour passer de la lumière froide et impersonnelle d’une agence Pôle emploi à la lumière chaude de moments plus intimes.

Quelle est la signification du titre ?

J’adore le double sens de vaurien, qui nous ramène souvent à une histoire d’argent, aux regards de certaines personnes et aux raccourcis que les gens ont quand ils n’ont pas la décence d’apprendre à connaître l’autre.

Avez-vous des projets en cours ?

Oui j’ai pas mal de projets en cours et j’ai encore plein de choses à raconter. Ce que je veux, c'est proposer des voyages au prix d’un ticket de cinéma.

La bande-annonce de "Fatima" de Philippe Faucon, où Mehdi Senoussi tenait un rôle :