Vannes, Grenoble, deux belles histoires mais une seule place au paradis du Top 14

Vannes y pense depuis longtemps, toute une région derrière le club

Enfin. Enfin en finale. Après deux tentatives (2019, 2021), le RC Vannes a sa chance. Il a un peu bégayé son rugby lors de la demi-finale face à Béziers la semaine dernière (27-21), dans son stade de La Rabine, "on n’a pas été bon" avoue le manager breton Jean-Noël Spitzer, mais le club a brisé son plafond de verre. Voilà donc les irréductibles bretons à une marche de l’élite du rugby français. C’est historique, Spitzer le sait, lui qui tient les rennes du sportif depuis… 2005, alors que Vannes était en Fédérale 2, en milieu amateur!

La quête d’un club, presque celle d’une carrière pour lui : "je ne sais pas si on peut parler de carrière car je n’avais pas envisagé de faire ça au départ. Mais aujourd’hui oui, c’est une mission. On ne se voile pas la face, c’est tellement dur d’y être, de quitter le monde amateur pour arriver ici. Il nous reste une derrière étape donc oui, il y a cette envie d’aller au bout de cette mission." Et s’ils ne seront pas 10 000 comme toujours à domicile quand le RCV joue à guichets fermés, plusieurs milliers de leurs supporters sont tout de même annoncés au stade Ernest Wallon de Toulouse, lieu de cette finale.

Toute une région rêve de voir son club, tel un ambassadeur, être le premier à fouler les pelouses du Top 14. Les joueurs le savent et s’en délectent. "Ce serait exceptionnel pour tout le groupe de marquer l’histoire du club à jamais, avoue le demi d’ouverture Maxime Lafage. D’être les premiers Bretons à remporter un Bouclier et une montée au plus haut niveau français. C’est un travail de longue haleine, le club bosse depuis longtemps pour être à ce niveau. Le travail de milliers de personnes, de toute un club, une ville, une région. Toute la Bretagne est derrière nous, on le sent depuis les demi-finales on est poussé à l’extrême. Avec tout ça on ne peut que leur rendre, tout ce qu’ils nous donnent tous les jours et à chaque match à La Rabine."

Mais alors que l’équipe vivra sa première finale de Pro D2, l’ombre de la pression d’un tel évènement va-t-elle brouiller les cerveaux bretons ? "On est à l’abri de ça assure Spitzer. On sait que l’exposition médiatique est plus forte, mais on le vit posément. On se prend au jeu, sans se prendre la tête. On a basculé assez vite après Béziers. On va découvrir une finale, on peut être pris par l’émotion mais on n'a pas de signaux avant-coureurs." D’ailleurs, les joueurs et le staff ont pris du plaisir à avancer vers cette finale, en quittant la ville en fin de semaine. "Mais pas pour une histoire de pression, juste parce que ça fait 50 semaines qu’on travaille. On a repris fin juin l’an dernier, c’est long. Donc on était content de monter dans le bus et changer d’environnement." Et de filer vers un destin qu’ils espèrent lumineux.

Grenoble revenu de l’enfer

Difficile de retranscrire toutes les émotions qu’on pu vivre les joueurs de Grenoble depuis un an. On passe la finale perdue face à Oyonnax et "l’access-match" lâché à domicile contre Perpignan. Trois jours plus tard, pour des raisons financières, le club était rétrogradé en Nationale. Avant un appel qui maintenait le FCG en Pro D2 en juillet, mais avec six points de pénalité au classement. Seulement, ce n’était pas terminé : alors que l’équipe avait sévèrement bataillé pour une spectaculaire remontée au classement, six nouveaux points lui étaient retirés en fin d’année, ponctuée par un revers à domicile face à Nevers.

En conférence de presse, à l’aube de jouer le titre et la montée en Top 14 et alors qu’on l’interrogeait sur les mots échangés entre les joueurs pour s’en sortir, le capitaine Steeve Blanc Mappaz se souvenait : "ça a été dur. Ce n’est pas forcément les mots qui ont été les plus importants entre nous. Car on peut se dire, "allez les mecs on ne lâche pas", "allez on s’accroche", mais derrière, c’est les actes. Les vacances ont fait du bien après le coup sur la tête de Nevers. Et on a répondu ensuite face à Aix. Là, j’ai senti qu’on était capables de prendre les choses en main. Et il s’est passé ce qu’il s’est passé sur la phase retour. C’est là où je félicite l’ensemble de mes coéquipiers et le staff. On s’est retroussé les manches."

Pour un parcours de feu: onze victoires en treize matchs par la suite et quatre points réattribués par l’autorité de régulation (après une augmentation de capital), qui finissaient de propulser les Alpins et leur meilleure attaque de la division en phases finales. "Il y a eu des phases chaotiques, puis euphoriques explique Patrick Pezery, l’entraîneur des avants. Et il a fallu aligner une série de huit victoires pour se stabiliser et voir où on pouvait se positionner. Car en juillet et en décembre, ça a été plus que compliqué et pas évident de redresser la barre. Mais J’ai de l’admiration pour mes joueurs. Surtout la satisfaction qu’ils aient pris conscience qu’à partir du moment où eux ont décidé les choses, ils ont a réussi à faire beaucoup ensemble."

Il n’en reste pas moins que cette équipe est une bande d’écorchés vifs qui est passée par tous les sentiments, comme le dit le demi de mêlée Eric Escande : "C’est surtout improbable ! Par rapport à tout ce qu’on a surmonté et beaucoup d’autres choses en interne dont vous n’êtes pas au courant. Par rapport à tout ça c’est juste incroyable de se retrouver là. C’est surtout de s’en rendre compte, de profiter et d’aller chercher quelque chose que ce groupe n’est jamais allé chercher. Un supplément d’âme ? Peut-être que oui. Ça nous sert et inconsciemment on a les choses qui vont de notre côté aussi. Que ça continue encore sur cette finale."

Ce qu’ils pensent de leur adversaire

Jules Le Bail, demi de mêlée de Vannes

"Grenoble est une équipe qui a beaucoup de caractère. Qui est défensivement en place, qui met son adversaire sous pression, avec des montées fortes et hautes, sans se consommer dans les rucks. On sait à quoit s’attendre. Après, offensivement, c’est une équipe qui aime bien tenir le ballon, qui est en place, qui se déplace rapidement et qui est athlétique. Mais on connait les finales, ce sont des matchs serrés, avec de la pression et parfois pas beaucoup de jeu. C’est l’équipe qui mettra le plus son adversaire sous pression qui gagnera."

Steeve Blanc Mappaz, capitaine de Grenoble

"On a analysé Vannes, ils ont une grosse défense, un gros buteur, la discipline va être primordiale. Quand ils rentrent dans les 22 adverses, ils tiennent très bien le ballon et ils scorent beaucoup. On s’est préparé à tout ça, c’est une équipe assez complète. Mais nous sommes deux équipes qui se ressemblent au niveau du jeu. On s’est surtout préparé pour être les meilleurs possibles sur ce que nous on propose plutôt que, comme l’année dernière réfléchir à contrer l’adversaire. Ce n’était pas forcément une bonne chose."

Pour rappel, l'équipe qui s'inclinera en finale de Pro D2 ce samedi affrontera Montpellier le dimanche 16 juin à 18h lors de l'access match. Le vainqueur de cette rencontre sera en Top 14 la saison prochaine.

Article original publié sur RMC Sport