Valéry Giscard d'Estaing, le président qui a fait disparaître l'ORTF

Valéry Giscard d'Estaing répond aux questions des journalistes lors d'une conférence de presse, le 26 juin 1980 à l'Elysée à Paris - - © 2019 AFP
Valéry Giscard d'Estaing répond aux questions des journalistes lors d'une conférence de presse, le 26 juin 1980 à l'Elysée à Paris - - © 2019 AFP

L'ancien président Valéry Giscard d'Estaing, mort mercredi à 94 ans, a jeté les bases du paysage audiovisuel français actuel en supprimant dès le début de son septennat l'ORTF, créé sous la période gaulliste, tout en maintenant l'information sous le contrôle du pouvoir.

Elu en mai 1974, Valéry Giscard d'Estaing ne perd pas de temps pour réaliser l'une de ses promesses de campagne, l'éclatement de l'Office de radiotélévision française (ORTF), ce puissant groupe public constitué en 1964, en plein gaullisme triomphant.

La loi du 7 août 1974 remplace l'ORTF par sept sociétés distinctes: quatre sociétés nationales de programmes (TF1, A2, FR3 et Radio France), un établissement public de diffusion (Télédiffusion de France - TDF), une société de production (SFP), et l'Institut national de l'audiovisuel (INA). Une réforme entrée en vigueur dès le 5 janvier 1975.

Contrôle indirect du pouvoir

"Pour autant, le cordon n'est pas totalement coupé" entre l'audiovisuel et le pouvoir, souligne l'historien des médias Christian Delporte, interrogé par l'AFP. En effet, si "cette réforme instaure une concurrence entre les chaînes", et si Giscard a supprimé symboliquement le ministère de l'Information qui avait été recréé sous l'ère Pompidou, l'Etat conserve son monopole sur la télévision.

Il fixe en outre les budgets des chaînes et le pouvoir maintient un contrôle indirect sur l'information: "Le président met aux postes clés des amis, si bien qu'il n'a pas à intervenir lui-même", résume l'historien, qui évoque "un nouveau système plus moderne, avec une phase de libéralisation indéniable, mais qui a des limites".

L'opposition, François Mitterrand en tête, dénonce à l'époque la mainmise du pouvoir sur les médias. Les syndicats voient eux dans cette réforme, d'une part un moyen de briser leur pouvoir, d'autre part la porte ouverte à la privatisation ultérieure d'une ou plusieurs chaînes. Les gouvernements de Giscard d'Estaing s'opposent par ailleurs aux radios libres, grand phénomène culturel des années 1970, et cherchent au contraire à conforter le monopole de l'Etat sur les ondes.

François Mitterrand change la donne

François Mitterrand, grand adversaire de "VGE", sera même inculpé pour infraction à ce monopole, pour sa participation à "Radio riposte", station pirate lancée par des socialistes en 1979. Et c'est lui qui finit par libérer la bande FM, après sa victoire à l'élection présidentielle de 1981 et la défaite de VGE, permettant la naissance de nombreuses radios indépendantes, privées ou associatives.

C'est également dans les années 1980 que l'Etat finit par renoncer à son monopole sur la télévision, avec notamment le lancement de Canal+ en 1984, puis la privatisation de TF1 en 1986 sous le gouvernement de Jacques Chirac.

Article original publié sur BFMTV.com