Vaccination : les essais de phase 3 sont-ils terminés ?
De nombreux anti-vaccins affirment que les essais de phase 3 des vaccins ne sont pas terminés, ce qui fait des personnes vaccinées des "cobayes". La réalité est beaucoup plus rassurante.
C'est l'un des arguments les plus répétés par les anti-vaccins. La phase 3 des essais des vaccins contre le SARS-COV-2 ne serait pas terminée, faisant des vaccinés des "cobayes". Une idée largement relayée dans les sphères complotistes, afin de décrédibiliser la vaccination actuelle.
Je suis Pas Un Cobaye ! Faut vous le carrer dans le crâne bande d’escrocs!
Il s’agit ici d’un essai clinique en phase 3 sur une population civile.
Nuremberg a INTERDIT CES HORREURS! Et cette folle elle incite à être l’objet de ces affreuses expériences! Vous devrez payer !😡😡😡— Soniadoubi65 (@Soniadoubi655) July 3, 2021
Un argument notamment repris par Nicolas Dupont-Aignan, sur CNews le 6 juillet. "On ne peut pas imposer à des personnes, des êtres humains, des vaccins qui sont toujours en phase d'autorisation conditionnelle de marché", lance notamment le chef de file de Debout la France, en référence à la phase 3 des essais cliniques.
Comment ne pas exiger un minimum de recul, de précaution, pour des vaccins qui ne bénéficient que d’une autorisation conditionnelle et dont les phases de tests se prolongent jusqu’en 2023 ?
La modernité aura beau tout faire : le temps ne se décrète pas !#vaccinationobligatoire— N. Dupont-Aignan (@dupontaignan) July 6, 2021
Le point sur les différentes phases
Avant d'être mis sur le marché, tout vaccin doit subir trois phases de tests. La phase 1, c'est le test du vaccin sur quelques dizaines de personnes pour être sûr qu'il n'est pas dangereux. La phase 2, concentrée sur plusieurs centaines de personnes, vise à déterminer quelle est la bonne dose du vaccin.
Enfin, la phase 3, sur des dizaines de milliers de personnes, cherche notamment à déterminer l'efficacité du vaccin. Les vaccins les plus utilisés en France face au Covid-19, Pfizer-BioNTech et Moderna, ont bien subi ces trois phases et ont obtenu une autorisation de mise sur le marché.
"Il reste à déterminer le temps d'efficacité des anticorps"
"Nicolas Dupont-Aignan n'a pas tort lorsqu'il affirme que la phase 3 n'est pas terminée, puisque c'est effectivement le cas. En revanche, il en fait une mauvaise interprétation", rappelle Matthieu Molimard, chef du service pharmacologie médicale au CHU de Bordeaux.
La phase 3 de Moderna est prévue jusqu'en 2022, celle de Pfizer jusqu'en 2023. "La phase 3 n'est pas totalement terminée car il reste à déterminer le temps d'efficacité du vaccin et la persistance des anticorps, l'éventuel besoin de faire une dose de rappel et au bout de combien de temps. Il est encore trop tôt pour avoir de telles données, la vaccination étant encore récente. C'est pour cela que les phases 3 doivent se terminer en 2023 pour Pfizer", poursuit le professeur de pharmacologie.
Des essais se poursuivent
D'ici à la fin de la phase 3, prévue donc d'ici 2023, les essais se poursuivent. "Par exemple pour Pfizer, il est prévu d'injecter à un sous-groupe de patients une dose de vaccin au bout d'un an pour voir si cela a un effet sur l'immunité. Pour l'instant, d'un point de vue scientifique, on ne peut pas dire s'il faudra ou pas faire un rappel au bout d'un an", illustre le chef du service pharmacologie médicale au CHU de Bordeaux.
"C'est aussi pour cela que l'autorisation de mise sur le marché est qualifiée de temporaire, puisque qu’elle sera complétée lorsque la phase 3 sera totalement terminée et apportera les informations sur l'éventuel besoin de faire un rappel, à une certaine échéance", rappelle Mathieu Molimard.
"Le vaccin est sûr même si la phase 3 n'est pas totalement terminée"
Pour autant, rassure le chef du service pharmacologie médicale, "ce n'est pas parce que la phase 3 n'est pas totalement terminée que le vaccin n'est pas sûr. À partir du moment où l'autorité européenne du médicament a examiné et validé les données, on a eu assez d'éléments sur la qualité de production du produit, sur son efficacité et sa sécurité pour dire qu'on peut déjà commencer à l'utiliser", rappelle le chef du service pharmacologie médicale au CHU de Bordeaux.
"On a injecté plus de deux milliards de doses dans le monde, bien plus que de nombreux vaccins, on a un travail énorme de pharmacovigilance, qui a permis de voir les très rares cas de thromboses sur AstraZeneca par exemple, et des vaccins efficaces même face au variant Delta. Donc on a toutes les bonnes raisons de se faire vacciner", conclut Mathieu Molimard, qui rappelle que le temps presse face à la progression du variant Delta.
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