Les vétérans de Madness reviennent avec leur premier album en 7 ans

Quoi de plus normal pour un groupe nommé "Folie": les vétérans de Madness reviennent avec l'album d'une époque "où tout devient fou", comme le dépeint Mike "Barso" Barson, clavier et co-leader de la formation.

Le titre du 13e album des Britanniques, qui sort vendredi, mêle anglais et français: "Theater of the Absurd presents C'est la vie". Dès l'introduction, le nom de Samuel Beckett, auteur d'"En attendant Godot", est cité. Soit une figure du mouvement du Théâtre de l'absurde, étiquette qui colle bien à une planète qui ne tourne plus rond.

Ce disque est pourtant loin d'être conceptuel. Avec les titres What on earth is it (You take me for ?) et Run for your life, les cuivres invitent au dancefloor, comme au temps de leurs glorieux tubes ska Our house ou One step beyond.

Soubresauts du monde

L'hédonisme de ces morceaux n'élude pas "les temps sombres actuels", comme le dit Mike "Barso" Barson, rencontré par l'AFP à Paris aux côtés d'un autre leader du gang, le chanteur Graham "Suggs" McPherson.

"La Russie possède l'arme nucléaire/La 3e guerre mondiale, la voilà" entend-on ainsi dans Run for your life. Le disque a pourtant été écrit alors que l'invasion de l'Ukraine n'avait pas encore eu lieu.

"On l'a écrit pendant le confinement, la crise sanitaire. Toute la frustration ressentie à l'époque nous a fait penser, par association d'idées, au surréalisme auquel des gens comme Samuel Beckett sont reliés", raconte Suggs, 62 ans, lunettes noires toujours sur le nez, même à l'intérieur, tout comme son comparse, 65 ans.

Comme le résume le chanteur, il n'en fallait pas plus pour penser à des "auteurs français" tel Alfred Jarry. D'où la présence d'un refrain en français, au milieu de couplets en anglais, dans le morceau C'est la vie.

Les soubresauts du monde sont déclinés au fil de l'album, qui mêle envolées pop et arrangements avec cordes. "Lockdown and frack off" revient ainsi sur les confinements, avec cette atmosphère à la "Mad Max". Sauf que les personnages de la chanson ne se battent pas pour de l'essence, comme dans la franchise cinématographique de George Miller, mais pour des rouleaux de papier toilette, rappel d'une époque pas si lointaine où toute pénurie était hystérisée.

"Nos corps déclinent mais l'esprit se libère"

Mais qu'est-ce qui fait toujours courir ces sexagénaires? Le sextet pourrait se contenter de tourner avec ses vieux hits. "On connaît ces groupes qui, comme nous, ont commencé dans les années 1970/80 et qui continuent avec des vieux morceaux, c'est déprimant. Nous, nos corps déclinent mais l'esprit se libère" s'amuse "Barso".

C'est le documentaire Get back de Peter Jackson, sur la force créative des Beatles, qui les a en réalité encouragés. "A l'époque des archives du film, on disait les Beatles en train de s'écrouler mais ces images prouvent qu'ils avaient toujours ce truc ensemble. Et nous aussi, en nous réunissant dans un lieu de répet', on s'est rendu compte qu'on l'avait toujours, ce truc, on avait près de 40 nouveaux morceaux à notre disposition", déroule "Barso". Il en reste 14 (plus six petits interludes).

A l'évocation des Fab Four, on les interroge sur l'intelligence artificielle qui a permis de tirer des limbes la voix de John Lennon pour un morceau sorti au début du mois, Now and then.

"C'est intéressant l'IA, on a grandi avec la science fiction, on a vu des films comme Terminator, et là c'est devant nous", commence Suggs. "Je pense que l'IA va révéler qui on est: avec des bonnes personnes, ça donnera quelque chose de bien, avec les mauvaises, ça pourrait devenir très moche" conclut "Barso".

Article original publié sur BFMTV.com