Les USA demandent à Pékin de réduire de 200 milliards de dollars son excédent

par Sue-Lin Wong et David Lawder

WASHINGTON/PEKIN (Reuters) - L'administration Trump adopte une ligne plus dure dans ses négociations commerciales avec la Chine, en exigeant désormais une baisse de 200 milliards de dollars de l'excédent commercial annuel chinois vis-à-vis des Etats-Unis et une forte diminution des droits de douane, ont déclaré vendredi des responsables au fait du dossier.

La demande d'une réduction de 200 milliards double l'exigence antérieure du président Donald Trump qui parlait de 100 milliards. La Chine a enregistré l'an dernier un excédent commercial record avec les Etats-Unis, d'un montant de 375 milliards de dollars.

Donald Trump demande d'autre part la "réciprocité" dans les droits de douane, se plaignant fréquemment que les tarifs douaniers imposés par Pékin aux voitures américaines soient de 25% alors que ceux imposés par Washington aux véhicules chinois sont de 2,5%.

La longue liste des demandes américaines a été présentée à Pékin avant le début des négociations tenues jeudi et vendredi entre des responsables de l'administration Trump et leurs homologues chinois pour tenter d'éviter une guerre commerciale entre les deux plus grandes économies au monde.

La Maison blanche n'a pas donné le détail de ses demandes mais a indiqué que la délégation américaine "avait eu des discussions franches avec les responsables chinois sur le rééquilibrage des relations économiques bilatérales Etats-Unis/Chine, l'amélioration de la protection de la propriété intellectuelle par la Chine, et l'identification de mesures qui permettent injustement des transferts de technologies".

Un peu plus tôt, des responsables des deux pays avaient déclaré que la Chine et les Etats-Unis étaient parvenus à un consensus sur certains points de leur contentieux commercial, Pékin ayant notamment proposé d'augmenter les importations de produits américains et de réduire les droits de douane sur certains produits, selon deux sources au fait des tractations et un document consulté par Reuters.

D'importants désaccords demeurent dans certains domaines mais les deux pays ont pris l'engagement de les résoudre par le dialogue, écrit l'agence de presse Chine nouvelle au terme des deux jours de discussions à Pékin entre le secrétaire au Trésor américain Steven Mnuchin et le vice-Premier ministre chinois Liu He. Chine nouvelle a parlé de discussions "constructives, franches et efficaces" même si les désaccords demeurent "relativement importants".

PÉKIN A "RÉPONDU AVEC VIGUEUR"

Un des rares signes de progrès concrets est venu du dossier ZTE, la délégation américaine ayant accepté de soulever auprès de Donald Trump la question d'une levée des sanctions imposées par les Etats-Unis au fabricant de téléphones mobiles chinois, selon les sources.

Le département du Commerce a interdit le mois dernier aux sociétés américaines de vendre à ZTE des composants et logiciels nécessaires à la fabrication de ses smartphones en reprochant à l'entreprise chinoise d'avoir enfreint les termes des sanctions économiques imposées à l'Iran.

La délégation américaine rentre maintenant à Washington pour rendre compte à Donald Trump et "connaître ses décisions sur les prochaines mesures", a dit la Maison blanche.

Pour amadouer Washington, Pékin a proposé d'acheter davantage de produits américains et d'abaisser les tarifs douaniers imposés aux voitures et à d'autres produits, ont précisé des sources au fait du dossier.

La Chine a demandé en retour aux Etats-Unis de ne plus restreindre ni discriminer les investissements chinois au nom de la sécurité nationale, ont-elles ajouté.

Pékin a aussi appelé Washington à refermer son enquête sur d'éventuelles violations par Pékin des droits de propriété intellectuelle américains et de ne pas mettre en oeuvre la hausse de 25% des droits de douane annoncée par Donald Trump dans ce cadre.

Ces nouveaux tarifs douaniers imposés à l'équivalent de 50 milliards de dollars de produits chinois doivent théoriquement s'appliquer à partir de juin mais l'administration Trump n'a fourni aucune précision sur le calendrier et les modalités.

Pékin a menacé de riposter à cette nouvelle salve de droits de douane - annoncés après une première hausse réciproque - en taxant davantage le soja ou les avions américains.

D'après le journal chinois Global Times, qui cite des sources au fait des discussions, les négociateurs chinois ont "répondu avec vigueur" aux critiques américaines, faisant comprendre à Washington que Pékin ne se laisserait pas intimider.

(Pierre Sérisier, Tangi Salaün et Eric Faye pour le service français)