Fusillade nourrie au centre commercial de Nairobi
par Duncan Miriri et Richard Lough NAIROBI (Reuters) - Des coups de feu nourris ont été entendus lundi matin à l'intérieur du centre commercial de Nairobi, pris d'assaut samedi par des activistes islamistes qui menacent de tuer leurs otages. Le dernier bilan officiel communiqué par les autorités fait état d'au moins 68 morts, dont deux ressortissantes françaises. Lundi matin, on ignorait toujours le nombre d'otages retenus par le commando responsable de l'attaque, revendiquée par les Chabaab somaliens. Ce groupe islamiste lié à Al Qaïda, qui exige le retrait de l'armée kényane de Somalie, a prévenu lundi matin que les otages seraient tués en cas d'assaut contre son commando. "Les forces israéliennes et kényanes ont tenté d'entrer de force dans le Westgate Mall mais n'ont pas pu, nos moudjahidine tueront les otages si les ennemis ont recours à la force", menace un porte-parole du groupe armé dans un message diffusé en ligne. L'armée kényane a indiqué de son côté sur son compte Twitter qu'elle ferait en sorte qu'une "conclusion rapide" soit donnée au siège du centre commercial. Interrogé sur la fusillade, un porte-parole de l'armée, le colonel Cyrus Oguna, a dit ne pas être en mesure d'apporter de commentaire. Les tirs nourris ont éclaté à l'aube du troisième jour de l'attaque, après une nuit calme. Des explosions ont également été entendues. Le secrétaire général de la Croix Rouge du Kenya, Abbas Gullet, a déclaré que des combats semblaient en cours à l'intérieur du centre commercial. Les forces de sécurité kényanes, qui bénéficient de l'assistance de conseillers occidentaux et israéliens, avaient annoncé dimanche avoir repris le contrôle de la plupart du complexe commercial. Les assaillants seraient une dizaine, voire une quinzaine d'hommes - et peut-être de femmes. Ils seraient barricadés dans un supermarché du centre commercial avec un certain nombre d'otages. Ils disent agir en représailles à l'intervention du Kenya en Somalie voisine depuis octobre 2011 contre les islamistes liés à Al Qaïda et exigent le retrait des troupes kényanes. KENYATTA: "JE NE CÉDERAI PAS" Il s'agit de la première crise d'envergure pour le président Uhuru Kenyatta, élu en mars, qui a perdu un neveu dans l'attaque. "Nous avons surmonté d'autres attaques terroristes", a-t-il rappelé, évoquant l'attentat de 1998 contre l'ambassade des Etats-Unis à Nairobi qui a fait plus de 200 morts. Quatre ans plus tard, la cellule d'Al Qaïda responsable de cet acte s'était attaquée à un hôtel de Mombasa appartenant à un Israélien et avait tenté d'abattre un avion de la compagnie israélienne El Al. Le président Kenyatta a également déclaré qu'il "ne céder(ait) pas dans la guerre contre le terrorisme" et qu'il ne retirerait pas les forces kényanes de Somalie. Outre les morts, 175 personnes ont été blessés, dont des enfants, lors de cette attaque qui a commencé lorsque les assaillants ont fait irruption samedi midi à un moment où le centre commercial était bondé. Selon un témoin, ils ont crié aux musulmans de quitter les lieux avant d'ouvrir le feu. La Grande-Bretagne, qui a annoncé la mort de trois de ses ressortissants, a dit s'attendre à un bilan plus lourd par la voie de son Premier ministre David Cameron. Le président américain Barack Obama a appelé dimanche Uhuru Kenyatta pour exprimer ses condoléances et a proposé son aide pour faire en sorte que les responsables de pour cette "attaque terroriste" soient jugés. L'assaut, lancé en pleine remise des prix d'un concours de cuisine pour enfants, a été suivi d'une intense fusillade et des coups de feu ont continué à retentir pendant plusieurs heures, puis des membres des services de sécurité sont parvenus à pénétrer dans le centre où ils ont entrepris de fouiller les boutiques une à une. Pendant des heures, des cadavres sont restés à même le sol dans les restaurants du centre commercial, où continuait de résonner une musique d'ambiance. A Paris, l'Elysée a annoncé que deux Françaises, une mère et sa fille, avaient été tuées dans "cet acte ignoble". Cinq Français ont réussi à s'échapper. Des experts israéliens conseillent les autorités kényanes, a-t-on appris de source proche des services de sécurité israéliens. "Des conseillers israéliens aident à l'élaboration de la stratégie de négociation mais aucun Israélien n'est impliqué dans un quelconque assaut imminent", a dit cette source. Al Chabaab a exclu de négocier. Le porte-parole des opérations militaires d'Al Chabaab a déclaré à Reuters en Somalie que son groupe ne craignait rien. "D'où Uhuru Kenyatta a-t-il tiré le pouvoir par lequel il nous menace ?", a déclaré Sheikh Abdiasis Abu Musab. Avec Edmund Blair, Drazen Jorgic, Humphrey Malalo et Kevin Mwanza; Bertrand Boucey, Danielle Rouquié, Nicolas Delame et Henri-Pierre André pour le service français