Un député dénonce les manquements de l'Etat sur Alstom-GE

Le député Olivier Marleix (Les Républicains), président de la commission d'enquête parlementaire sur la politique industrielle de l'Etat, a dénoncé jeudi les manquements de l'Etat lors du rachat des activités énergie d'Alstom par l'américain General Electric (GE). /Photo d'archives/REUTERS/Vincent Kessler

PARIS (Reuters) - Le député Olivier Marleix (Les Républicains), président de la commission d'enquête parlementaire sur la politique industrielle de l'Etat, a dénoncé jeudi les manquements de l'Etat lors du rachat des activités énergie d'Alstom par l'américain General Electric (GE).

A l'issue des six mois d'investigation de la commission, "j'ai acquis la conviction qu'en autorisant la vente d’Alstom à GE, l'Etat a failli à préserver les intérêts nationaux", a-t-il déclaré lors de la présentation à la presse des conclusions de cette commission.

Dans son avant-propos au rapport de la commission d'enquête, Olivier Marleix note que cette fusion n'exprime qu'un "laisser-faire" de l'Etat, qui, par "cécité, imprévision et entre-soi", a failli à protéger ses intérêts fondamentaux.

Pour le député, cette opération - mais aussi celle de la cession de la branche ferroviaire d'Alstom à l'allemand Siemens annoncée à l'automne - révèle notamment que la procédure de contrôle des investissements étrangers en France "est largement pervertie", avec une "inversion du processus".

Alors que c'est au ministre de l'Economie qu'incombe, aux termes de la loi, la décision d'autoriser la vente d'un actif stratégique après instruction du dossier, Olivier Marleix estime que dans ces deux cas la décision a été prise au niveau de l'Elysée "avant que la procédure ne soit instruite par Bercy et que toutes ses conséquences pour nos intérêts fondamentaux ne soient identifiées".

Soulignant que le rapporteur de la commission, le député Guillaume Kasbarian (La République en Marche) ne partageait pas son diagnostic, Olivier Marleix a ajouté que "si nous ne voyons pas les mêmes problèmes, nous voyons les mêmes solutions".

Pour Guillaume Kasbarian, il ne faut en effet pas oublier la situation économique de l'époque et le fait qu'Alstom "ne pouvait pas continuer tout seul" parce qu'il n'avait "ni la taille critique ni les ressources financières" suffisantes.

Sans compter que les repreneurs ne se bousculaient pas.

ÉVOLUTIONS EN VUE

D'une manière générale, ce qui compte dans ces dossiers c'est l'emploi industriel et "si ça doit passer par des actionnaires qui n'ont pas forcément un passeport français, ça ne nous choque pas forcément", a-t-il déclaré.

Une position qui fait écho aux efforts de l'exécutif visant à promouvoir l'attractivité de la France auprès des dirigeants économiques et financiers internationaux.

Malgré ces divergences de diagnostic, les deux députés d'Eure-et-Loir se rejoignent sur la nécessité de faire évoluer les pratiques vers plus de transparence.

Membre de cette commission d'enquête, Bastien Lachaud, député de Seine-Saint-Denis (La France insoumise), a quant à lui regretté par voie de communiqué que "la Constitution ait empêché l'audition d'un des principaux acteurs de l'affaire Alstom: Emmanuel Macron".

L'actuel chef de l'Etat a suivi ce dossier alors qu'il était secrétaire général adjoint de l'Elysée, au début du quinquennat de François Hollande, puis en tant que ministre de l'Economie.

Pour tirer les leçons de la vente d'Alstom, la commission formule 50 propositions pour améliorer le contrôle des investissements étrangers en France.

Une partie d'entre elles sont d'ores et déjà sur le métier. Le gouvernement prévoit en effet de renforcer le contrôle des investissements étrangers en France, notamment en élargissant la nécessité d'un accord préalable de l'Etat aux secteurs de l'intelligence artificielle, du spatial, du stockage des données et des semi-conducteurs.

Ces dispositions devraient figurer dans le projet de loi "Pacte" (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises) porté par Bruno Le Maire, appelé à être présenté en conseil des ministres lors de la deuxième quinzaine de mai.

Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, entendu la semaine dernière par les membres de la commission, a également accédé à une autre de leurs demandes en ouvrant la voie à la mise en place d'un rapport annuel au Parlement sur les investissements étrangers en France.

(Myriam Rivet, édité par Elizabeth Pineau et Yves Clarisse)