Des turbulences font un mort sur un vol Singapore Airlines : comment ces phénomènes causent de tels accidents

AVIATION - L’événement est aussi rare que dramatique. Ce mardi 21 mai, la compagnie aérienne Singapore Airlines a annoncé la mort d’un passager qu’elle transportait entre Londres et Singapour, à la suite de « violentes turbulences ». Des dizaines d’autres occupants de l’appareil, voyageurs et membres d’équipage, ont pour leur part été blessés, certains grièvement, et transportés à l’hôpital après un atterrissage d’urgence à Bangkok.

La tempête Isha a semé le chaos dans les airs et a fait de ces vols un véritable enfer

Auprès de médias britanniques, certains des passagers ont raconté la « chute brutale » du Boeing 777-300ER alors qu’il survolait le golfe du Bengale. Selon les données techniques, l’appareil a ainsi perdu près de 2000 mètres d’altitude en quelques instants seulement.

Un phénomène bien connu des pilotes

Hurlements, objets propulsés dans la cabine, entailles et blessures diverses au fur et à mesure des chocs, tous les occupants relatent une scène qui semble sortie tout droit d’un film catastrophe. Avec au final une tragédie bien réelle : la mort d’un Britannique de 73 ans, « probablement victime d’une crise cardiaque », d’après les autorités thaïlandaises. Au cours d’une conférence de presse, elles ont aussi fait savoir que sept personnes se trouvaient dans un état grave.

Comme l’a expliqué à nos confrères de BFMTV le pilote Charles Clair, les turbulences sont bien connues de sa profession. Généralement catégorisées en « légères », « modérées » et « sévères », elles sont fréquentes pour quiconque a déjà pris l’avion.

Mais il est rarissime qu’elles soient violentes au point de causer des blessures graves et a fortiori la mort d’un passager. Cela peut tout de même se produire si certains occupants de l’appareil ne sont pas attachés, a détaillé le pilote : « Vous pouvez alors vous déplacer de plusieurs mètres, et quand vous êtes dans un avion, vous avez toujours des surfaces contondantes. » Dans les colonnes du Parisien, l’ancien aviateur Xavier Tytelman précise avec d’autres exemples : « On peut prendre l’exemple d’un dos-d’âne sur la route. Si vous roulez dessus à 80 km/h, les objets dans la voiture risquent de s’envoler. Alors, imaginez à une vitesse 10 fois plus rapide… » Résultat : entre les chocs, les coups, la retombée qui peut être violente une fois les turbulences passées et les crises cardiaques, les risques sont multiples.

Le changement climatique accentue les turbulences

Ces dernières années, plusieurs études scientifiques ont noté une corrélation entre le changement climatique et les turbulences. En juin 2023, une large enquête de chercheurs de l’université britannique de Reading publiée dans la revue Geophysical Research Letters notait par exemple une large augmentation de la durée et de la fréquence de ces phénomènes météorologiques au cours des quatre dernières décennies, estimant que la tendance allait s’accentuer à l’avenir.

Avec des conséquences tout à fait tangibles pour l’aviation civile puisque cette étude notait une augmentation importante des turbulences en ciel clair (par opposition aux turbulences liées à la traversée de nuages ou d’orages) à des altitudes de croisière pour les vols commerciaux, notamment au-dessus des États-Unis et de l’Atlantique nord.

Et pour cause : les turbulences, qui se manifestent par des chocs pour les occupants d’avions et parfois même par des chutes plus ou moins longues, sont en réalité liées à des changements brutaux du sens et de la vitesse des vents, qui sont le fruit d’interactions entre des masses d’air chaudes et froides. Or avec le changement climatique, ces « cisaillements du vent » sont de plus en plus fréquents. En conséquence, la fameuse étude de l’université de Reading expliquait que si un Paris - New York enregistre à l’heure actuelle environ 10 minutes de turbulences, ce chiffre pourrait doubler, voir tripler, d’ici 2050.

Comme le rapportait l’an passé Geo, en citant l’un des auteurs de l’étude, les turbulences coûtent d’ores et déjà entre 150 et 500 millions d’euros par an ne serait-ce qu’aux États-Unis. Car à chaque minute passée dans les turbulences, les avions s’usent, nécessitant des réparations et mettant en danger les passagers. Et l’on peut ajouter à cela la consommation de carburant qui augmente lorsqu’il faut redonner de la vitesse à un appareil qui vient d’être freiné par des turbulences. Tristement ironique quand on sait que le transport aérien lui-même contribue largement au dérèglement climatique.

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