Journée mondiale des troubles bipolaires : comment se déclenche la maladie ?

Le trouble bipolaire se manifeste le plus souvent entre 15 et 25 ans (crédit : getty image)
Le trouble bipolaire se manifeste le plus souvent entre 15 et 25 ans (crédit : getty image)

La maladie psychique responsable des dérèglements de l’humeur apparaît le plus souvent chez les jeunes adultes, favorisée par des facteurs génétiques et biologiques.

C’est une maladie avec des hauts et des bas. Le trouble bipolaire est une maladie psychiatrique caractérisée par des troubles de l’humeur disproportionnés en intensité et en durée.

Deux phases s’alternent : l’épisode d’exaltation avec une augmentation de l’énergie et du besoin de faire des activités (manie ou hypomanie). Les patients “prévoient par exemple de multiples projets, ou font de grosses dépenses sans vérifier leur bien-fondé”, illustre Ameli. La seconde phase, caractérisée par des épisodes dépressifs, se traduit par une grande tristesse et un repli sur soi-même. Le trouble bipolaire est considéré comme l’une des maladies psychiatriques les plus sévères parce qu’elle peut conduire aux tentatives de suicide.

Entre ces deux phases, il peut y avoir des phases de rémission où l’humeur du malade se stabilise. A l’occasion de la journée mondiale des troubles bipolaires, le 30 mars, zoom sur une maladie qui touche entre 1 et 2,5% de la population française, soit entre 670 000 et 1 670 000 personnes. Un chiffre “très certainement largement sous-évalué”, selon la Haute Autorité de Santé (HAS).

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À quel âge apparaît le trouble bipolaire ?

Parfois, le trouble bipolaire débute à l’adolescence. Mais les premiers symptômes de la maladie se manifestent le plus souvent au début de la vie adulte, entre 15 et 25 ans. Une enquête de l’association Bipolarité France dévoilée ce jeudi montre cependant que le diagnostic est posé relativement tard, après 25 ans. Pour 20% des 1204 personnes sondées, il a d'ailleurs été posé plus de 15 ans après les premiers symptômes. “Au-delà des fluctuations de l’humeur non traitées, le risque est que d’autres troubles s’y associent tels que les troubles anxieux et les addictions. L’ensemble peut favoriser une désinsertion sociale et professionnelle voire des conduites suicidaires alors que les personnes dont le trouble bipolaire est stabilisé peuvent avoir un fonctionnement et une qualité de vie tout à fait satisfaisants”, explique la Professeure Chantal Henry, psychiatre spécialiste des troubles bipolaires et directrice scientifique de la Fondation Pierre-Deniker.

Le retard de diagnostic est dû au fait que les symptômes comme la tristesse, l’irritabilité, la fatigue ou les comportements à risques peuvent être confondus avec des tourments d’adolescents. Or, l’alternance de ces phases avec des phases maniaques ou hypomaniaques doit évoquer un trouble bipolaire. “La durée moyenne d’un épisode varie entre 4 et 13 mois, avec des épisodes maniaques généralement plus courts que les épisodes dépressifs”, précise la HAS dans un rapport.

La maladie psychique peut aussi se manifester plus tard dans la vie, à 30 ans ou à 70 ans. “Un épisode dépressif débutant après l’accouchement peut être l'épisode inaugural d'un trouble bipolaire”, note Ameli. Le trouble bipolaire, qui touche les deux sexes dans les mêmes proportions, débute le plus souvent par un épisode dépressif chez les femmes, mais par un épisode maniaque chez les hommes.

Y a-t-il des prédispositions aux troubles bipolaires ?

L’origine de la bipolarité est encore mal comprise, mais on sait qu’il existe des prédispositions génétiques. “Si l’un des parents souffre d’un trouble bipolaire, le risque qu’un des enfants en soit atteint est d’environ 20 %. Si le père et la mère ont un trouble bipolaire, ce risque monte à 50–60 %”, estime la HAS. Des analyses génétiques et immunologiques réalisées sur des patients ont permis de préciser le lien entre les facteurs génétiques et environnementaux. “Nous avons contribué à montrer que les patients bipolaires sont porteurs de variants génétiques en particulier du système Human Leukocyte Antigen (HLA) ou des gènes des récepteurs Tolllike (TLR) qui les rendent plus susceptibles à des facteurs de risques environnementaux, comme les infections, les traumatismes sévères, la pollution, la mauvaise hygiène de vie”, explique Marion Leboyer, responsable de l’équipe Neuropsychiatrie translationnelle à l’Institut Mondor.

Chez les personnes prédisposées, le trouble bipolaire peut débuter sous l’actions d’éléments déclenchants comme le stress dû à une séparation ou un décès, la consommation d’alcool, de tabac ou de drogue, le manque de sommeil, une maladie comme l'hyperthyroïdie ou dans des cas plus rares, la prise de médicaments (corticoïdes, antidépresseurs…). "L’exposition à ces facteurs déclenche une réponse inflammatoire qui perdure dans le temps, et peut engendrer l’activation de voies biologiques délétères, comme celles des rétrovirus endogènes, la production d’auto-anticorps, ou encore les modifications des neurotransmetteurs", ajoute Marion Leboyer. Les malades présentent en effet des troubles biologiques dans le fonctionnement et la communication des cellules du cerveau. Cependant, un trouble bipolaire peut également se développer sans élément déclencheur. Les chercheurs ont encore du chemin à faire avant de complètement lever le voile sur le trouble bipolaire.

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