« Trois nuits par semaine », une rom com queer française digne de ce nom

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Pyramide Distribution

CINÉMA - Prête-moi ta main, 20 ans d’écart, La délicatesse... Des comédies romantiques, en France, on en a. Des comédies romantiques queer ? Un peu moins. Ce mercredi 9 novembre, un réalisateur français du nom de Florent Goëlou va changer la donne avec l’arrivée, sur grand écran, de son premier long-métrage : Trois nuits par semaine.

Son histoire, c’est celle du dénommé Baptiste (Pablo Pauly). Baptiste est parisien, il est en couple avec Samia (Hafsia Herzi). Un soir, alors qu’il l’accompagne dans une de ses actions de dépistage du VIH pour prendre des photos (il est photographe amateur), le jeune homme fait la rencontre de deux drag-queens, présentes elles aussi sur les lieux. Parmi elles, Cookie Kunty (Romain Eck).

Perchée sur ses hauts talons, elle tape dans l’œil de Baptiste. Et très vite, il va vouloir la revoir. Poussé par l’idée d’un nouveau projet photo avec elle, Baptiste va s’immerger dans le milieu du drag parisien, mais aussi et surtout dans l’univers de Cookie, Quentin dans la vraie vie. C’est le début de leur histoire.

Découvrez ci-dessous la bande-annonce de Trois nuits par semaine :

De cette histoire, on retient les sentiments naissants, le premier baiser, la première fois, le choc (parfois) des cultures, la dispute, la réconciliation. En bref, les ingrédients clés de toute bonne rom com qui se respecte. « Je me suis inspiré des recettes classiques de la comédie romantique, et notamment les films sur lesquels Richard Curtis a travaillé en tant que scénariste, comme Coup de foudre à Notting Hill et Quatre mariages et un enterrement. Ça a guidé l’écriture », nous raconte-t-il.

Connu aussi sous le nom de scène drag de Javel Habibi, il poursuit : « L’enjeu, ensuite, ça a été de déjouer ces codes-là. Surtout, l’endroit politique du film, pour moi, c’était l’endroit du désir. Le personnage principal est un homme qui aime les femmes, il est frappé par un désir inattendu, plus large que ce qu’il avait prévu et qu’il décide d’embrasser. »

Les drag-queens à l’écran

Ce n’est pas la première fois que Florent Goëlou travaille avec Cookie Cunty, drag-queen réputée du même nom dans la vraie vie. Dans Trois nuits par semaine, elle est dévouée à son travail, sa passion. Pour Baptiste, c’est là où ça coince. Comment faire cohabiter le travail et l’amour ? C’est là tout l’enjeu de leur relation, nous dit l’ancien élève de la Fémis.

À l’écran, les romances françaises mettant en scène des héros non hétérosexuels sont rares. Il y a bien sûr Les roseaux sauvages d’André Téchiné ou Les Chansons d’amour de Christophe Honoré, « même si je pense que lui n’apprécierait pas qu’on labellise le film comme ça », commente le cinéaste. C’est plus souvent du côté des drames qu’on l’y range. Le réalisateur de 37 ans ne veut pas s’attribuer la première rom com queer française, « mais sur le drag, peut-être ».

À l’image de Priscilla, folle du désert (1995), les pays anglo-saxons n’ont pas attendu 2022 pour s’y mettre. Et pour cause, le drag y est très ancré socialement, aux États-Unis notamment. En France, le renouveau date d’il y a cinq ou six ans, nous dit Cookie Kunty, pas très étonnée de voir le cinéma se l’approprier désormais. « C’est aussi une question d’industrie, ajoute Florent Goëlou. Ces pays ont compris depuis longtemps qu’il y avait un marché, quand en France on a souvent pensé que le cinéma LGBT+ était un cinéma de niche, qui ne trouverait pas son public. C’est faux évidemment. »

Le récent succès, cet été, de l’adaptation française de la compétition de drag-queens RuPaul’s Drag Race va dans ce sens. Elle a montré qu’il y avait de la place pour l’univers du drag sur le petit écran, mais aussi pour parler avec humour et beaucoup de sensibilité des problématiques que traversent les personnes LGBT+. « Quelques années avant cela, jamais à la télé, on aurait produit ça. Ils sont très frileux avec tout ce qui sort de la norme », observe Cookie Kunty. Offrir à tout le monde d’autres représentations est important, selon elle.

Une comédie tournée « vers la lumière »

Un point de vue partagé par Florent Goëlou, mais pour ça, il faut aussi « arrêter de penser des programmes où c’est le sujet ». « Il faut montrer que les personnes LGBT+ existent, qu’on a des vies quotidiennes comme tout le monde, que ce ne soit pas tout le temps spectaculaire ou accidenté », pointe-t-il du doigt. « Et que le boucher du coin soit gay et que ce ne soit pas l’intrigue », ajoute Cookie Kunty. « Ou qu’il y ait des personnes trans sans qu’elles soient autre chose que la personne trans du film », surenchérit le réalisateur.

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Dans Trois nuits par semaine, aucun homosexuel ne meurt d’une maladie, aucun autre ne se prostitue, deux clichés souvent mis à l’écran. Le film n’omet pas certaines réalités, comme les agressions homophobes. « Parce que ça fait partie de nos vies, aussi, comme de militer, d’être en conscience, d’être responsable, de se mobiliser, par exemple, dans la prévention contre le VIH, comme le font deux des héroïnes. Cependant ce n’est pas toujours central », reconnaît Florent Goëlou. Ce à quoi Cookie Kunty ajoute : « Nos destins ne sont pas nécessairement tragiques. Nos vies, on demande juste à les vivre. »

Le registre de la comédie s’est imposé comme une évidence. « Je voulais que le film soit lumineux et créer des représentations positives, continue Florent Goëlou. Le film est tourné vers la lumière, la rencontre et la force de groupe. » Soyez sûrs de rire.

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