Trois archevêques venus d'Irak demandent l'aide de l'Europe

BRUXELLES (Reuters) - La violence en Irak risque de mettre fin à près de 2.000 ans de présence chrétienne dans ce pays, où les militants de l'Etat islamique ont proclamé un "califat" dans les zones qu'ils contrôlent, ont déclaré mercredi les archevêques de Bagdad, de Mossoul et de Kirkouk en visite auprès de l'Union européenne à Bruxelles. Avant l'invasion américaine de 2003, les chrétiens étaient un million et demi en Irak. Après onze ans de violence et de chaos, ils ne sont plus que 400.000. Depuis l'avancée des islamistes le mois dernier dans le nord et l'ouest du pays, l'exode des chrétiens s'est accéléré vers la Turquie, le Liban et l'Europe de l'Ouest. Louis Raphaël Sako, patriarche de Babylone des Chaldéens, l'archevêque catholique syriaque de Mossoul Yohanna Petros Mouche et l'archevêque chaldéen de Kirkouk Youssif Mirkis, qui tous trois reconnaissent l'autorité du pape François, ont demandé à l'Union européenne de venir en aide à leurs fidèles jetés sur les routes de l'exil. "Les prochains jours seront très mauvais. Si la situation ne change pas, il ne restera plus qu'une présence symbolique des chrétiens en Irak", a déclaré Mgr Sako, qui vit à Bagdad. "Si les chrétiens s'en vont, c'en est fini de leur histoire de près de vingt siècles dans ce pays." La prise de Mossoul, dans le nord de l'Irak, par les militants sunnites hostiles au gouvernement de Bagdad a poussé de nombreux habitants de la ville à fuir, a raconté pour sa part Mgr Mouche. "Quand ils ont voulu revenir, il n'y avait plus d'eau, presque plus d'électricité. Il n'y avait que la peur", a poursuivi l'archevêque. Même à Kirkouk, dans la zone kurde pourtant réputée plus sûre, plusieurs centaines de chrétiens décident chaque jour de partir, déplore Mgr Mirkis. "Notre présence était un symbole de paix. Aujourd'hui, c'est la panique et rares sont les chrétiens qui pensent avoir encore un avenir en Irak..." Contrairement à leurs voisins chiites, majoritaires dans le pays, sunnites ou kurdes, les chrétiens n'ont pas de milices pour les défendre. La présence du christianisme dans le pays remonte au 1er siècle, lorsque les apôtres Thomas et Thaddée ont évangélisé la Mésopotamie. Mgr Sako déclare que les chrétiens d'Irak ne sont pas actuellement persécutés pour leur foi par les hommes de l'Etat islamique mais il ajoute que deux religieuses chaldéennes et trois enfants ont été enlevés en plein jour lundi à Mossoul, où les églises sont fermées. La majorité des chrétiens et des chabak, une minorité chiite, ont fui la ville. La visite des trois archevêques à Bruxelles était organisée par la fondation catholique "Aide à l'Eglise en détresse". (Robin Emmott, Guy Kerivel pour le service français)