Theresa May obtient l'aval du parlement après avoir lâché du lest

La Première ministre britannique a obtenu lundi le feu vert de la Chambre des Communes à son projet sur les futures relations douanières avec l'Union européenne, après avoir cédé aux pressions des partisans d'un "Brexit dur" au sein du Parti conservateur, auquel elle appartient. /Photo prise le 16 juillet 2018/REUTERS/Matt Cardy

par Elizabeth Piper, William James et Andrew MacAskill

LONDRES (Reuters) - La Première ministre britannique a obtenu lundi le feu vert de la Chambre des Communes à son projet sur les futures relations douanières avec l'Union européenne, après avoir cédé aux pressions des partisans d'un "Brexit dur" au sein du Parti conservateur, auquel elle appartient.

En accédant à leurs revendications, Theresa May a révélé sa fragilité au parlement, où les deux ailes du Parti conservateur ne se sont pas ménagées, signe des divisions qui freinent les négociations avec l'UE pour parvenir à un accord avant la date butoir de la fin mars 2019.

La Première ministre a promis de s'en tenir à son plan, qui prévoit de conserver des liens économiques étroits avec les "27", mais, avant même qu'il ait été soumis à Bruxelles, il a été décrié par les deux ailes des Tories. Une ancienne ministre europhile l'a qualifié de "pire des mondes", alors que les eurosceptiques le jugent trop accommodant envers l'UE.

Lundi, les seconds ont tenté d'obtenir un durcissement du projet de loi sur les relations douanières, mais, plutôt que de les affronter et d'alimenter les tensions, le gouvernement a donc accepté les quatre amendements qu'ils ont présentés.

Selon le porte-parole de Theresa May, les amendements en question ne font en définitive guère plus que traduire les choix du gouvernement dans la loi.

En durcissant la formulation afin de souligner que la collecte des droits de douane par la Grande-Bretagne et l'UE se fera sur la base de la réciprocité, les partisans du Brexit risquent toutefois de rendre le plan de Theresa May plus difficile à "vendre" auprès de l'UE.

A l'issue d'un débat houleux, les députés se sont prononcés par 318 voix contre 285 en faveur du projet, qui doit maintenant être adopté à la Chambre des Lords.

DÉBAT RICHE ET COMPLET

"Nous avons eu aujourd'hui un débat riche et complet, parfaitement approprié pour un projet de loi d'une telle importance pour notre capacité à rester l'une des grandes nations commerçantes après notre sortie de l'UE", s'est félicité le ministre du Trésor Mel Stride.

Theresa May a réfuté l'idée selon laquelle son plan a été dévoyé et son porte-parole a assuré que les amendements qu'elle a accepté étaient "conformes" au livre blanc que les membres de son gouvernement ont approuvé le 6 juillet.

Elle pourrait toutefois avoir du mal à expliquer pourquoi elle accepté que l'UE puisse percevoir des droits de douane pour le compte de la Grande-Bretagne si Londres fait de même, ce qui n'est guère acceptable pour Bruxelles, selon un spécialiste.

Guto Bebb, secrétaire d'Etat à la Défense, a renoncé à ses fonctions après avoir voté contre le gouvernement. Il s'agit de la dixième démission dans les rangs conservateurs depuis la présentation du plan de sortie de l'UE.

"La seule raison pour laquelle le gouvernement a accepté ces amendements, c'est qu'il a peur d'une quarantaine de députés, partisans d'un Brexit sans accord, qui auraient dû partir il y a longtemps", a pour sa part commenté la conservatrice Anna Soubry, hostile au Brexit.

Justine Greening, ex-ministre de l'Education de Theresa May, a plaidé, elle, pour un nouveau référendum sur la sortie de l'UE.

Cette bataille n'était vraisemblablement pas la dernière et c'est peut-être pour en éviter d'autres dans l'immédiat que le gouvernement a avancé les vacances parlementaires à jeudi. Elles devaient débuter la semaine prochaine.

Mai a déjà dû batailler ferme pour convaincre ses ministres du bien fondé de son plan, lors d'un séminaire gouvernemental à Chequers, sa villégiature officielle, mais le consensus n'a pas duré. Le ministre du Brexit David Davis et son collègue des Affaires étrangères Boris Johnson ont démissionné dans les heures qui ont suivi.

(Samuel Kahn, Eric Faye et Jean-Philippe Lefief pour le service français)