« The Killer » de David Fincher sur Netflix, un film loin d’être aussi ennuyeux que la routine de son héros
NETFLIX - Trois ans après Mank, son ovni en noir et blanc, David Fincher est de retour avec un nouveau long-métrage jouissif The Killer, disponible sur Netflix depuis le 10 novembre. Pour incarner son protagoniste, David Fincher voulait Michael Fassbender, et personne d’autre. Seul hic, le comédien de la saga X Men, Shame et Hunger est, depuis 2017, devenu pilote automobile. Mais le réalisateur s’est montré persuasif et patient, et le résultat de cette collaboration est explosif.
Le film est l’adaptation de la bande-dessinée intitulée Le Tueur des Français Matz et Luc Jacamon. Il met en scène un tueur à gages incarné par Michael Fassbender donc. Ce dernier est enfermé dans une routine répétitive et ennuyeuse qui est, d’après lui, garantie d’infaillibilité pour exceller dans ce milieu. Ce tueur, dont on ignore le nom, vit comme un ascète, pratiquant le yoga, les yeux fixés sur sa montre connectée et son pouls, confortablement vêtu de son costume de « touriste allemand » composé de bobs et de chemises hawaïennes.
Mais au détour d’un contrat comme un autre à Paris, le mécanisme parfaitement huilé s’enraye. Pour le tueur, c’est le début d’une épopée vengeresse à travers la planète. Un voyage qui le force à sortir de sa zone de confort. Pour lui, pour la première fois, les choses deviennent personnelles, même s’il s’efforce de le nier. Le spectateur, qui s’était enfoncé (confortablement) dans son canapé au début, se retrouve plaqué au dossier, tenu en haleine. Le tueur est obligé de sortir de sa routine et de son train-train presque ennuyeux, et nous embarque avec lui.
The Killer est construit en chapitres, garantissant au récit un rythme avec des respirations. Un pouls qui monte en pics et qui descend, comme celui du protagonniste. Lorsque le tueur se livre à un meurtre ou à un interrogatoire musclé, le public retient son souffle. Lorsqu’il se repose ou prend l’avion et qu’il retrouve sa routine rassurante (pour lui), le spectateur relâche brièvement la pression.
The Killer : un thriller noir teinté d’humour
La force de The Killer réside aussi dans cette alternance de séquences très différentes aux rythmes décousus, et de scènes de calme. Lorsque le tueur se parle à lui-même, c’est nous qu’il vient un peu apaiser.
De fait, Michael Fassbender n’ouvre quasiment pas la bouche pendant les 2 heures que dure le long métrage, mais sa voix est omniprésente. The Killer nous plonge dans ses pensées, ses obsessions, ses manies. Un monologue intérieur entrecoupé de chansons entêtantes du groupe The Smiths. David Fincher est un amoureux de musique qui apporte toujours une importance primordiale au son dans ses films, The Killer ne fait pas exception à la règle. Nuque qui craque, bruit d’un pistolet à clous, porte qui grince, tout est prétexte à grimacer.
Enfin, The Killer n’est pas qu’un thriller haletant. Le film est plein d’humour noir et de clins d’œil. Mention spéciale au monologue de Tilda Swinton qui devrait faire beaucoup rire à la machine à café. David Fincher ne se prive pas non plus pour pointer du doigt une faille de notre société selon lui : l’hyper-connectivité. Le tueur parvient à ses fins souvent grâce aux technologies censées, en principe, nous protéger.
Dans ce nouveau film, David Fincher revient aux essentiels de sa filmographie, aux éléments qui ont fait de Fight Club, The Game ou Seven des films cultes. Et c’est profondément réjouissant. Avec The Killer, le contrat est parfaitement rempli.
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