« The Fabelmans » : Steven Spielberg a mis 16 ans à écrire le film de sa vie

Photo
Storyteller Distribution Co., LLC. All Rights Reserved

CINEMA - Steven Spielberg assure qu’il y a un peu de lui dans chacun de ses films, même lorsqu’il imagine des histoires de dinosaures ou d’extraterrestres. Mais jamais autant que dans The Fabelmans, au cinéma ce mercredi 22 février. Le long-métrage de 2h30 est une plongée douce et nostalgique dans l’histoire familiale du réalisateur, alors adolescent des années 1950. Et pour faire de ses souvenirs un film, Steven Spielberg a mis son temps.

C’est sur le tournage de Munich, en 2005, que survient le premier déclic. Tony Kushner, co-scénariste du film et grand admirateur du cinéaste, l’interroge : « À quel moment avez-vous décidé de devenir réalisateur ? » La question, on ne peut plus banale, résonne chez Steven Spielberg. « Il m’a dit : je vais te confier un secret, et il m’a raconté l’histoire qui a servi de fondement à The Fabelmans », se souvient le dramaturge dans les notes de production.

Spielberg raconte sa propre histoire

Cette histoire, c’est celle du jeune Steven - Sammy dans le film, incarné brillamment par Gabriel LaBelle - qui découvre Sous le plus grand chapiteau du monde de Cecil B. DeMille dans un cinéma de Philadelphie avec ses parents (Michelle Williams et Paul Dano à l’écran) à l’âge de 6 ans, et se met ensuite en tête de tourner ses propres films. Son enfance heureuse, entourée d’un père brillant scientifique et d’une mère musicienne de talent, forge son caractère et son identité artistique. Mais à l’âge de 16 ans, il découvre, en revisionnant les images d’un film de vacances, un lourd secret sur sa mère qui déstabilise l’équilibre familial.

Lorsque Tony Kushner lui dit qu’il « faut absolument [qu’il] en fasse un film », Steven Spielberg lui répond qu’il « y pense de temps en temps ». « Plus j’étais dans le déni que je n’aurais jamais vraiment besoin de raconter ma propre histoire, plus je réalisais : pourquoi est-ce que j’ai cette conversation avec moi encore et encore ? », explique le cinéaste au Time Magazine.

Pendant les temps morts du tournage de Munich (2006) puis de Lincoln (2012) et encore de West Side Story (2021), les deux hommes ont de longues discussions, qui se transforment parfois en séances d’écriture, au cours desquelles Spielberg livre ses souvenirs d’adolescence. « Je n’aurais jamais été capable de coécrire ce film sans quelqu’un que j’aime, admire et respecte autant que Tony Kushner », dit-il aujourd’hui. « La seule chose qui comptait, c’était que je puisse me livrer à quelqu’un, que je puisse tout déballer, pour ainsi dire, sans jamais ressentir de gêne ou de honte. »

Photo
Storyteller Distribution Co., LLC. All Rights Reserved

Le second déclic intervient pendant la pandémie de Covid. « J’ai commencé à me demander : quelle est l’histoire que je n’ai pas encore racontée et dont je m’en voudrais de ne pas le faire ? C’était la même réponse à chaque fois : l’histoire de mes années formatrices en grandissant, de mes 7 à 18 ans », évoque Steven Spielberg au New York Times. Alors après 15 ans d’échanges, qu’il qualifie lui-même en souriant de « thérapie », ils écrivent un traitement de 90 pages, suffisamment riches pour nourrir six longs métrages. Une première version du scénario aboutit en septembre 2020, un mois après le décès de son père Arnold - sa mère Leah est morte quatre ans plus tôt - et la production du film peut commencer.

Une ode aux salles obscures

Outre le récit initiatique de Steven Spielberg sous les traits de Sammy Fabelman, The Fabelmans est aussi un film doux et lumineux sur l’histoire du cinéma de Cecil B. DeMille à John Ford, le pouvoir des images à créer des émotions, à réunir ou à diviser ceux qui les regardent. Et sur un ton encore différent du Babylon de Damien Chazelle ou du Empire of the light de Sam Mendes, également en salles.

« Nous avons besoin d’être ensemble dans des salles obscures pour ressentir les idées et les messages de quelqu’un », défend Steven Spielberg au Time Magazine qui remerciait il y a quelques jours Tom Cruise et son plébiscité Top Gun : Maverick d’avoir « sauvé les fesses de Hollywood ». Si le réalisateur de 76 ans a pensé son histoire pour qu’elle « résonne de manière collective afin que les spectateurs puissent reconnaître leur propre famille dans le film », il a déjà « vécu l’un des plus beaux moments » de sa relation avec ses sœurs lorsqu’il leur a montré, fébrile, son long-métrage. « Nous avons toujours été proches, mais cette histoire nous a réunis à nouveau comme si nous étions tous de retour [là où nous avons grandi] ».

À voir également sur Le HuffPost :

Lire aussi