Textes LR sur l'immigration : pour Dussopt, il est "inenvisageable" de modifier la Constitution
Le ministre du Travail juge "impossible" de modifier la Constitution "dans le sens" voulu par LR. La droite, qui a présenté deux propositions de loi sur l'immigration, souhaite notamment inscrire "la possibilité de déroger à la primauté des traités et du droit européen".
La réponse d'Olivier Dussopt ne s'est pas faite attendre. Après que la droite a dévoilé ses propositions sur l'immigration - lesquelles font l'objet de deux textes distincts - ce dimanche dans Le JDD, le ministre du Travail donne la réplique. Il défend le projet de réforme porté conjointement avec le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et affiche ses désaccords avec celui présenté par Les Républicains (LR).
Olivier Dussopt s'arrête plus particulièrement sur la première proposition de loi de la droite, revenant à modifier la Constitution pour permettre l'organisation d'un référendum sur l'immigration. Mais aussi à inscrire "la possibilité de déroger à la primauté des traités et du droit européen".
"Impossible"
Ce dernier point, est "inenvisageable" aux yeux de l'ex-membre du Parti socialiste, interrogé par France Info. Pour lui, cela serait "contraire à la construction européenne".
Dans le détail, Les Républicains proposent un "bouclier constitutionnel", selon l'expression de Bruno Retailleau, patron des sénateurs LR. Autrement dit, que la primauté du droit européen et international ne s'applique pas dans le cas d'une loi organique votée dans les mêmes termes par les deux chambres du Parlement ou par référendum, dont les mesures reviendraient à "assurer la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation".
Une telle décision "singulariserait et stigmatiserait la position de la France au sein de l'Union européenne", avertit encore Olivier Dussopt, ajoutant qu'une révision constitutionnelle lui paraît "impossible" et d'autant plus "dans ce sens-là".
"Deux priorités"
Pour la droite ce premier texte serait le préalable à une série de mesures - délit de séjour irrégulier, restriction du droit du sol, double peine - regroupées dans une seconde proposition de loi. Après avoir étalé ses divisions sur la réforme des retraites, le parti d'Éric Ciotti espère se refaire une santé.
Objectif: être uni et peser face à un gouvernement qui a reporté plusieurs fois son projet de loi et ne parvient toujours pas à réunir une majorité. LR est notamment vent debout contre la possibilité d'accorder un titre de séjour aux travailleurs en situation irrégulière exerçant dans un secteur en manque de main-d'œuvre.
Sur France Info, Olivier Dussopt diverge avec le constat fait par Bruno Retailleau, selon lequel "il y a trop d'immigrés en France". Au moment où le gouvernement entre dans une période de concertations dans le but de présenter une mouture en juillet prochain, le ministre du Travail continue de défendre l'équilibre de son texte, dont il résume les "deux priorités".
"D'abord, faire en sorte que notre État soit plus fort, que les décisions de justice, de l’administration soient mieux respectées". "Et puis, faire en sorte que le travail soit l'outil majeur de celles et ceux qui rejoignent notre pays".
"Ça ne peut pas fonctionner", a estimé Bruno Retailleau dans Le JDD, déplorant que le gouvernement ait pour "objectif d'expulser et 'en même temps' de régulariser plus".
Ce "n'est pas un appel d'air"
Pour l'instant, l'exécutif se refuse à lâcher du lest à LR, d'autant plus qu'il doit contenter l'aile gauche de la majorité. "Nous allons continuer à discuter", dit Olivier Dussopt, tout en défendant le volet régularisation du texte. "Aujourd'hui, il y a des secteurs d'activités qui ne fonctionneraient pas sans le recours à une main-d'œuvre étrangère non-communautaire", indique-t-il en substance, avant d'ajouter:
"Nous parlons d’hommes et de femmes qui sont sur le territoire français depuis des années, qui travaillent de manière légale, mais qui ont une situation personnelle irrégulière."
Selon lui, la mesure du gouvernement n'est "pas un appel d'air". Elle permettrait de "rendre plus solides les situations juridiques, à la fois au bénéfice des salariés concernés et de leurs employeurs".
Pour l'instant, les positions sont arrêtées. Olivier Dussopt temporise au micro de France Info et demande de "laisser le temps nécéssaire aux discussions" qui doivent se tenir prochainement avec les groupes parlementaires. Une chose est sûre: la majorité pourra difficilement se passer de la droite. Et celle-ci, qui dispose de 62 députés, n'a aucune chance de voir ses textes aboutir sans ralliement d'autres groupes parlementaires.
Article original publié sur BFMTV.com
VIDÉO - Jean-Louis Debré, ancien ministre de l’Intérieur, sur l'article 49.3: "La Constitution a été approuvée par le peuple français, le 49.3 y figure, donc ce n'est pas un vice anti-démocratique"