Tête de mue

Tilda Swinton . De films indés en blockbusters, la Britannique caméléon s’éclate désormais dans des comédies. Et voit en Netflix un innovant modèle de création.

Il fallait bien qu’un jour, un réalisateur filme Tilda Swinton pour ce qu’elle est : une actrice OGM. Dans Okja, la fable du Coréen Bong Joon-ho, elle est la dirigeante d’une multinationale qui manipule tant l’ADN de ses «super-cochons» que les consciences des consommateurs. Une sorcière rose bonbon qui engendre des monstres promis à la boucherie. L’actrice est elle aussi une mutante. Physiquement, elle est le croisement d’un lévrier et d’une huppe. «C’est amusant qu’on me considère comme une actrice cérébrale… En réalité, je suis entièrement animale», dit-elle en long tailleur vert sauterelle. Dans chacun de ses films, Swinton est totalement autre. A son corps exultant, elle est tour à tour androïde, vampire ou vieux sage chauve (tout récemment, dans l’adaptation du comics Docteur Strange). Grande prêtresse de l’hybridation, elle fusionne les sexes, elle efface les âges. L’un de ses tout premiers films, Orlando (1992), de Sally Potter, avait donné le ton : elle y jouait le rôle-titre, ce personnage woolfien qui traverse les siècles et passe d’homme à femme. Si bien qu’elle a pu dire, à propos de son rôle dans Crazy Amy (2015), de Judd Apatow, pour lequel elle a le brushing sage et le maquillage léger de n’importe quelle poupée new-yorkaise : «Je ne me suis jamais sentie aussi déguisée.»

Dans la maison écossaise de ses aristocrates de parents, les murs étaient recouverts de portraits d’ancêtres. Ils avaient la tête de Tilda Swinton, mais avec des perruques et des costumes d’époque. Combien de temps les a-t-elle observés pour avoir hérité de ce don du transformisme ? D’aussi loin qu’elle se souvienne, elle a aimé les films fantastiques - «ceux de Hitchcock ou de Powell et Pressburger». A l’époque, les sorcières ne lui faisaient pas peur. «Chez nous, en Ecosse, ce sont des femmes fortes.» L’actrice vit (...) Lire la suite sur Liberation.fr

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