"Je me sens morte": Charlotte Arnould, qui accuse Gérard Depardieu de viols, affirme "vivre en enfer"

"Cela fait cinq ans que je vis en enfer." Ce mardi, Charlotte Arnould s'est longuement exprimée au micro de BFMTV, près de cinq ans après sa plainte contre Gérard Depardieu pour deux viols commis en 2018.

Selon elle, le 7 août 2018, l'acteur, que de nombreuses autres femmes accusent de violences et d'agressions sexuelles, invite la jeune comédienne chez lui. Elle le connaît depuis sa tendre enfance car Gérard Depardieu est un ami de son père. Elle le considère même comme un "petit père".

"J'ai toujours vécu en sachant que Depardieu était un proche. Il m'a tenu dans ses bras quand j'étais bébé. Il y avait une confiance et une estime", explique Charlotte Arnould, âgée de 22 ans au moment des faits. "Je me rends chez lui. Et assez rapidement tout bascule", continue-t-elle.

"Je le revois une semaine après (...) et il se repasse la même chose", poursuit Charlotte Arnould.

Gérard Depardieu a toujours nié les faits reprochés par la plaignante.

Une plainte pour "survivre"

La jeune femme, qui pesait 37 kilos à l'époque, souffrant d'anorexie, va mettre plusieurs jours à se rendre dans un commissariat pour porter plainte.

"Je me dis que je suis morte, que ma vie est finie. (...) Je me sens morte. Je sais qu'il s'est passé quelque chose de très grave, mais je vais mettre un petit peu de temps pour l'intégrer et le conscientiser. C'est là que je vais faire la démarche d'aller porter plainte", raconte la jeune femme.

Le 27 août, elle est entendue par des policiers. "J'ai l'impression d'être prise au sérieux, je n'ai pas eu la sensation qu'on remette en doute ma parole", se rappelle-t-elle malgré la douleur provoquée par le fait d'à nouveau raconter les faits à d'autres personnes qu'à son proche entourage. "Cela n'a pas de sens, c'est d'une violence inouïe."

Mais tout s'effondre en 2019, lorsque sa plainte est classée sans suite. "Je ne m'y attendais pas et je m'effondre. Cela a été une telle épreuve cette enquête préliminaire que je me dis 'j'arrête'", poursuit-elle. Toutefois, Charlotte Arnould veut coûte que coûte "récupérer cette intégrité, récupérer la narration de l'histoire". C'est pourquoi elle se constitue partie civile.

"Tout le monde savait"

À notre micro, Charlotte Arnould ne se le cache pas: "C'est une évidence que cela a des répercussions sur ma carrière." D'autant plus que voir Gérard Depardieu sur les planches ou à l'affiche de films, sans encombre, est vécu comme une "injustice terrible".

D'ailleurs, elle dénonce une "omerta énorme" du monde politique, cinématographique et médiatique autour de Gérard Depardieu.

"Tout le monde savait. Je pense que ça n'a étonné personne. On ne peut plus fermer les yeux", explique la plaignante. "Tout le monde sait qu'il se comporte comme ça sur les tournages. Personne n'est surpris", martèle-t-elle.

"Il y a une omerta énorme et il y a des gens qui permettent que ce soit possible. Tous ces gens qui sont au pouvoir nourrissent le monstre", déplore sur BFMTV Charlotte Arnould.

Des "symptômes" encore présents

D'un point de vue personnel, Charlotte Arnould est encore marquée au quotidien par cette affaire. Elle dit souffrir "de symptômes qui découlent d'un stress post-traumatique" comme l'anorexie, la boulimie, ou l'hyperphagie. "Il y a eu des périodes de scarification, d'alcool, de prise de médicaments, etc."

"Ma vie ne ressemble plus à rien. Cela fait cinq ans que je vis en enfer", confie-t-elle alors que "la flamme [pour la comédie] s'est éteinte".

En 2021, Gérard Depardieu a été mis en examen pour des soupçons de viols et d'agressions sexuelles. Une décision confirmée par la cour d'appel de Paris en mars 2022 que Charlotte Arnould considère comme "une première reconnaissance", même si "rien n'est gagné".

Puis, en avril 2023, treize femmes ont accusé, dans une longue enquête de Mediapart, de violences sexuelles l'acteur, qui "dément formellement l'ensemble des accusations susceptibles de relever de la loi pénale."

Charlotte Arnould espère alors que certaines des femmes citées dans l'enquête feront comme elle et porteront plainte. "La peur commence un petit peu à changer de camp. J'espère que ce n'est que le début de quelque chose. (...) Toutes ensemble, on est tellement plus forte qu'eux."

Article original publié sur BFMTV.com