Selon Jean Decety, trop de morale nuit à la démocratie

On en a tous un jour fait l'expérience : face à un fanatique, et quelle que soit sa secte – LFI ou le mouvement raëlien –, l'approche rationnelle ne marche pas. C'est peine perdue, comme si leur cerveau était foncièrement rétif aux faits, aux données, et même à la moindre des remises en question. Neurobiologiste et spécialiste de neurosciences sociales – un champ de recherches empiriques, au carrefour des neurosciences, de la psychologie évolutionnaire, de la psychologie cognitive, de la psychologie sociale et des sciences politiques – le Franco-Américain Jean Decety œuvre au décryptage des mécanismes d'un tel blocage, au cœur du processus de polarisation et de radicalisation en train de salement ravager nos démocraties libérales.

Ses travaux, dont il vient de présenter une synthèse à l'Institut Diderot le 6 février, à l'occasion d'un mois de résidence en France à l'Institut d'études avancées de Paris, offrent une confirmation scientifique de l'impression commune : le cerveau d'un dogmatique ne sait tout simplement plus prendre en compte des informations factuelles et correctives. Ses fonctions rationnelles sont comme gelées, l'individu n'est plus capable d'entendre et d'assimiler ce qui ne va pas dans le sens de ses croyances et de l'idéologie structurant son clan.

En cause ? La face sombre de la morale. Celle qui nous pousse à l'intolérance et à la méfiance envers ceux qui pensent ou agissent différemment de nous. Et qui peut même aller jusqu'à motiver une [...] Lire la suite