Santé mentale des enfants : le manque d’autonomie pendant les sessions de jeux extérieurs en question

Plus les enfants ont la possibilité de diriger leurs propres jeux et activités, plus leur santé mentale est renforcée.
Carlo A / Getty Images Plus les enfants ont la possibilité de diriger leurs propres jeux et activités, plus leur santé mentale est renforcée.

PARENTALITE - Laisser son enfant jouer seul dans la rue, une mauvaise idée ? Pas si sûr. Une nouvelle étude américaine parue en septembre 2023 dans le Journal of Pediatrics avance que le manque d’autonomie accordé aux enfants ces dernières décennies pourrait être « l’une des causes, peut-être une cause majeure », du déclin de leur santé mentale.

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Cette étude combine les résultats de plusieurs études essentiellement américaines. Un contexte à garder en tête, car ce qui vaut outre-Atlantique ne l’est pas forcément en France, en raisons des différences en terme d’éducation ou de culture.

Mais ce qu’affirment les auteurs a de quoi poser question. L’article du Journal of Pediatrics dresse en effet une corrélation entre le déclin du bien-être des enfants depuis les années 1960, et la perte progressive d’autonomie dans les sessions de jeux à l’extérieur.

« Dans plusieurs enquêtes, les parents ont déclaré que leurs enfants jouaient beaucoup moins de manière indépendante à l’extérieur qu’eux-mêmes lorsqu’ils étaient enfants », écrivent les auteurs. Les parents « limitent la liberté de leurs enfants à l’extérieur en grande partie à cause des craintes liées à la criminalité et à la circulation ».

Problème : les études montrent que plus les enfants ont la possibilité de diriger leurs propres jeux et activités, plus leur santé mentale est renforcée. Alors que les priver d’autonomie et de jeu spontané peut engendrer anxiété, dépression et des difficultés relationnelles. Et ce pour plusieurs raisons.

La conception du jeu selon les enfants

« Jouer est une source directe de bonheur pour les enfants », rappellent les scientifiques. Mais pour que l’activité ludique soit satisfaisante pour les enfants, elle doit correspondre à leur conception du jeu. Plusieurs études se sont penchées sur les éléments qui font qu’un enfant considère une activité comme un jeu : elle doit être à l’initiative de l’enfant, qui doit jouer loin de la surveillance des adultes et sans leur intervention.

Selon une étude suisse menée en 1995 auprès de 2 672 familles, les enfants qui jouent dehors sans surveillance ont aussi plus d’amis, développent de meilleures aptitudes motrices et sociales que ceux dont le temps de jeu en plein air consiste à se rendre au parc en compagnie d’un adulte. En cause ? Les jeux sont limités dans le temps en fonction de la patience des parents et leur présence inhibe les enfants, moins enclins à initier des jeux stimulants et risqués.

Autre argument pour justifier la corrélation entre la perte d’autonomie des enfants et leur état de santé mentale : cette étude australienne, menée sur près de 1 000 jeunes de 17 ans en 1992, conclut que les lycéens qui occupent un petit boulot à mi-temps se sentent plus indépendants et plus heureux. Parmi les raisons invoquées : l’argent gagné, l’amélioration de leur vie sociale et le plaisir du travail.

Les réserves des auteurs

Sur le long terme, le manque d’autonomie peut aussi laisser des traces. Les auteurs de l’étude s’attardent sur le concept du « lieu de maîtrise » (locus of control en anglais). Il s’agit de la capacité d’une personne à considérer qu’elle contrôle sa vie et maîtrise les événements qu’il lui arrive.

Une personne aura plus de risque de développer de l’anxiété ou une dépression si cette capacité est réduite. Alors que faire pour l’accroître ? Plus les enfants ont de l’indépendance, plus ils apprennent à résoudre leurs problèmes et à prendre des décisions, plus ils développent cette capacité, selon l’étude.

Mais les auteurs émettent plusieurs réserves. Ils insistent sur le fait que des études supplémentaires doivent être menées pour démontrer s’il y a un bien un lien de causalité.

Ils ajoutent que d’autres facteurs pourraient avoir un impact sur le déclin de la santé mentale des enfants : l’augmentation du temps passé à l’école, la pression à obtenir des bons résultats scolaires, l’apparition des réseaux sociaux, ou encore le temps passé devant un écran.

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