Migrants morts dans la Manche : cinq militaires mis en examen en France

Des migrants tentent de traverser la Manche dans un petit bateau gonflable (image d’illustration)
Des migrants tentent de traverser la Manche dans un petit bateau gonflable (image d’illustration)

JUSTICE - Un an et demi après le dramatique naufrage d’un bateau dans la Manche qui a coûté la vie à 27 migrants, cinq militaires ont été mis en examen en France pour « non assistance à personne en danger », a appris l’AFP de source judiciaire ce jeudi 25 mai.

D’après une source proche du dossier, il s’agit de trois femmes et deux hommes en fonction au moment des faits au Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage Gris-Nez (Pas-de-Calais), chargé des secours dans la Manche.

Un peu plus tôt dans la journée, l’AFP apprenait qu’une dizaine de personnes, dont des militaires du Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) Gris Nez, avaient été placées en garde à vue dans cette enquête. Les autorités françaises sont suspectées d’avoir été appelées à l’aide à une quinzaine de reprises, sans succès, la nuit du naufrage.

« Tous les opérateurs actuellement au Cross Gris-Nez ou embarqués ont toute la confiance du préfet pour conduire les opérations de sauvetage en mer », avait réagi dans la matinée la Préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord, qui gère le Cross. « L’affaire suit son cours et l’instruction n’est pas de notre ressort », a-t-elle ajouté, se refusant à tout autre commentaire.

France et Royaume-Uni se renvoient la balle

Le canot a coulé au petit matin du 24 novembre 2021, emportant 27 passagers, majoritairement des Kurdes irakiens, âgés de 7 à 46 ans. Personne ne leur est venu en aide malgré leurs nombreux appels pendant trois heures. Ni côté français, ni côté britannique, chacun passant la nuit à se renvoyer la balle, selon des documents de l’enquête consultés par l’AFP.

Le Monde a pu prendre connaissance des investigations et notamment des appels des migrants au Cross. Ce dernier leur a promis d’envoyer de l’aide, mais à l’approche des eaux britanniques, l’autorité française a simplement contacté ses homologues britanniques pour qu’ils prennent le relai. Une fois la frontière maritime passée, les naufragés ont rappelé les Français en panique : « Oui, mais vous êtes dans les eaux anglaises », aurait répondu le Cross.

Puis, une opératrice a tenté de rediriger l’appel vers Douvre mais la communication coupe. « Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé. J’ai les pieds dans l’eau, bah… je t’ai pas demandé de partir », aurait-elle déclaré. Les secours ne viendront jamais.

Ces éléments, qui concordent avec les déclarations des deux survivants, ont secoué le Cross Gris-Nez, chargé des secours dans la Manche, et ont suscité la « consternation » des associations d’aide aux migrants.

Dix passeurs mis en examen

Lors de précédentes auditions dans cette enquête, des agents du Cross avaient invoqué le manque de moyens qui contraint « à prioriser ». Ce soir-là, le Cross a traité « des centaines, voire des milliers d’appels », avait rapporté l’un d’eux.

« Si à un quelconque moment il y a eu un manquement, une erreur, les sanctions seront prises », avait aussi assuré en novembre le secrétaire d’État Hervé Berville, reconnaissant un « effroi » à la lecture des informations de presse.

Dix passeurs présumés, majoritairement afghans, ont été mis en examen dans l’information judiciaire parisienne sur ce drame, qui a fait monter la tension entre Paris et Londres. Mais sans décourager les candidats à l’Angleterre.

Une enquête est également en cours outre-Manche. Les autorités britanniques ont annoncé fin novembre avoir arrêté un homme, « suspecté d’être un membre du groupe criminel organisé qui a conspiré pour transporter les migrants au Royaume-Uni à bord d’un petit bateau ».

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