Lens-Arsenal: dans les coulisses de la journée parfaite des Sang et Or et de l'exploit face aux Gunners

Ce succès se prépare depuis que les Lensois ont assuré la saison dernière leur qualification pour la phase de poule de Ligue des champions. Parmi les enjeux: répondre favorablement aux exigences de l’UEFA. Lens doit réaménager le parcage visiteurs en installant des sièges à la demande d’Arsenal. Le club loue des LEDS qu’il installe autour du terrain pour satisfaire les sponsors de l’UEFA. Le service communication doit gérer près de 400 demandes d’accréditation. Seulement la moitié sera acceptée.

Le salon du deuxième étage de la tribune présidentielle est aussi réaménagé pour permettre à l’UEFA d’installer son Champion’s Club, espace d’hospitalité réservé à ses partenaires et VIP. Tous les services du club se mobilisent et travaillent beaucoup les semaines précédentes cette grande soirée pour être prêts le jour J.

Une bouteille de Sauternes de 1998 et une défaite au babyfoot

Mais en Ligue des champions, le "match" débute bien avant le coup d’envoi sur la pelouse. L’une des grandes traditions, c’est le déjeuner des dirigeants le jour de la rencontre. Il est de coutume de mettre les petits plats dans les grands pour accueillir au mieux la délégation adverse voire même de l’impressionner et de déjà "gagner" sur le terrain de l’hospitalité. Les dirigeants lensois décident donc de convier les patrons d’Arsenal à Busne, près de Béthune, au restaurant gastronomique du Château de Beaulieu (2 étoiles au Michelin). Echange de cadeaux pour chaque convive, fanions, photos, les dirigeants d’Arsenal emmenés par Vinai Venkatesham (CEO), Tim Lewis (vice-président exécutif), ou encore Edu Gaspar (ancien joueur et directeur sportif) sont ravis de l’accueil.

Côté lensois, l’ensemble du board est présent excepté le patron Joseph Oughourlian retenu à Madrid pour ses affaires. C’est à ce moment-là qu’est présenté un babyfoot spécialement créé pour ces retrouvailles entre Lens et Arsenal et qui rejoindra le Salon présidentiel du Stade Bollaert. Un match de babyfoot Arsenal-Lens s’engage donc, remportés par les Anglais. Le déjeuner est excellent, impressionne les convives britanniques, et sera ponctué par l’ouverture d’une bouteille de Sauternes de 1998, année du tout premier Arsenal-Lens. Mais les deux délégations ne traînent pas à table car le match de Youth League des U19 est programmé à 14h à La Gaillette. L’occasion pour les dirigeants nordistes de présenter leur centre d’entrainement à leurs homologues londoniens. Certains d’entre eux, comme Per Mertesacker, directeur de l’académie des Gunners, soulignent l’identité unique du RC Lens. "C’est hallucinant le sentiment de communauté qui règne chez vous. Votre club est vraiment une famille", glisse-t-il à un témoin. La victoire 1-0 des U19 lensois, devant 3000 spectateurs, alimente la fierté des dirigeants qui prennent ensuite la direction du stade.

Un dirigeant d’Arsenal: "Amazing!"

Attendu comme un volcan, Bollaert se prépare. Les stands des célébrissimes "Frites Sensass" sont prises d’assaut autour du stade. Les supporters se hâtent autour de l’enceinte pour ne rien rater, le tout dans une ambiance bonne enfant surveillée par des forces de l’ordre discrètes. "Il est où David Seaman? et Tony Adams? et Martin Keown?", peut-on entendre au pied de la tribune Marek. Les plus anciens des supporters lensois nostalgiques du match de 1998 sont présents. Quelques minutes avant le coup d’envoi, un grand tifo se déploie tout le long de la même tribune. Les chants s’enchainent jusqu’aux mythiques Corons de Pierre Bachelet. En tribune présidentielle, on entend des "Amazing!" dans la bouche des dirigeants d’Arsenal. Joseph Oughourlian, le président du RC Lens, qui a atterri dans le Nord dans l’après-midi est tout sourire, peut-être pour masquer le stress inhérent à une telle soirée.

Le club a voulu marqué le coup et faire appel à son passé en invitant d’anciennes gloires : Eric Sikora, Guillaume Warmuz, Daniel Moreira, Yannick Cahuzac. Tous recevront, au coup d’envoi, des mains d’Arnaud Pouille le DG le maillot Or du match avec leur numéro de leur époque. Sont aussi présents l’ancien président Gervais Martel ou encore la veuve de Daniel Leclerc, mythique entraineur lensois de la fin des années 90. La tribune présidentielle accueille plusieurs personnalités du monde économique et personnages politiques. La ministre des Sports porte le maillot sang et or sur les épaules. L’ancien président de la République François Hollande qui a passé la journée avec le maire de Lens Sylvain Robert l’accompagne au stade. Xavier Bertrand, président de la région des Hauts-de-France est également présent à quelques mètres du président de la FFF Philippe Diallo. Les dirigeants d’Arsenal sont impressionnés. L’un deux avouera même à un dirigeant de Lens : "C’est le meilleur accueil qu’on ait reçu de ces dernières années."

"Bon, vous remettez ça dimanche hein?"

Le match se déroule parfaitement. Sur la pelouse bien sûr où les Lensois dominent Arsenal. Mais aussi et surtout en tribune où les supporters offrent une ambiance extraordinaire. A la fin du match, fierté et soulagement se mélangent en tribune présidentielle. "Tu vois, c’est génial d’offrir ça à ce public", souffle Oughourlian à un proche. Le président est ravi et fier de l’organisation globale du match, de voir que son club a su relever tous les défis. Lens a été à la hauteur à tous points de vue. De retour au vestiaire, les joueurs laissent éclater leur joie. Ça crie et chante dans tous les sens pendant une bonne demi-heure. Dans le couloir qui mène au vestiaire, Mikel Arteta fait une chaleureuse accolade à Franck Haise pour le congratuler. Quelques minutes plus tard, l’entraineur lensois se retrouve face aux journalistes qui à leur tour le félicitent. Mais lui semble garder une certaine retenue.

Un peu plus tard dans la soirée, au moment où familles et proches de joueurs se retrouvent dans un salon du stade, la femme de Franck Haise décrit dans une discussion la "solidité mentale" de son mari qui a connu des moments très compliqués après l’enchainement de défaite du début de saison. Au même moment, un dirigeant du club demande à Florian Sotoca où il a trouvé cette ressource physique pour tenir tout le match à un tel rythme. "Franchement, c’est l’énergie du public. Ils nous ont porté", explique l’attaquant. Adrien Thomasson vient de dire la même chose en direct dans l’After sur RMC, micro-casque sur la tête en tribune de presse. Un autre dirigeant intercepte le héros de la soirée Elye Wahi et lui lance "bon, vous remettez ça dimanche hein ?". Car dimanche, Lens reçoit Lille à 17h05 pour le derby du Nord. S’il n’y aura pas de supporters lillois dans le parcage visiteur, le peuple lensois rêve d’une nouvelle victoire face cette fois au rival voisin pour faire de cette semaine une semaine vraiment parfaite.

Article original publié sur RMC Sport