Ecologie, budget... est-ce bien raisonnable d'organiser les Jeux olympiques d'hiver 2030 six ans après Paris 2024?

A moins d'un an des Jeux olympiques d'été 2024 à Paris, la France s'ouvre déjà un autre futur olympique, celui de 2030 et ses Jeux d'hiver dans les Alpes françaises. Un enchaînement d'évènements olympiques qui peut interroger, autant sur l'aspect économique qu'écologique. Mais les pouvoirs publics tricolores se veulent rassurants.

Sur son compte Twitter, Emmanuel Macron a promis des "jeux innovants, durables et inclusifs". Le projet français, bouclé en cinq mois par l'alliance des deux candidateurs des régions Auvergne-Rhône-Alpes et PACA, s'est imposé devant les candidatures suédoise et suisse grâce à un argument clé: 95% des structures qui seront utilisées par ces Jeux d'hiver 2030 existent déjà.

"Un budget d'un milliard payé par le CIO et la billetterie"

Il s'étend de Nice (patinage et village olympique) au Grand-Bornand (biathlon), distants de près de 500 km, avec notamment le ski alpin dans les stations de Courchevel-Méribel et de Val d'Isère et le ski de fond à La Clusaz. "On va faire l'inverse de Sotchi et Pekin, pour qui les Jeux leur ont couté entre 20 et 30 milliards d'euros. 95% des installations sont opérationnelles et prêtes, il faut revoir un peu bien entendu", admet Renaud Muselier, président de la région PACA au micro de BFMTV.

"On devrait être autour d'un budget d'un milliard ou un milliard et demi, qui devrait être payé par le CIO, la billetterie et le privé, qui est aussi intéressé par la démarche, assure le dirigeant, alors la menace d'un dépassement plane comme sur les JO 2024, où le budget a augmenté de 32% par rapport à celui formulé initiallement. On est également en train d'organiser des classes de neige. Ce qui est important pour nous, c'est d'organiser une desserte entre Marseille et Briançon, ce qui veut dire aménager nos territoires et les faire progresser."

C'est cette question des transports qui reste la plus sensible: la majorité des sites enneigés des Alpes sont difficilement accessibles en transports en commun, si ce n'est impossible. La candidature française, qui doit encore répondre à un certain nombre de questions de la part du CIO avant la désignation officielle prévue avant les Jeux 2024, devra se pencher sur ses questions afin de conforter son dossier.

"Ne pas aggraver le problème du changement climatique"

La question des infrastructures de transport inquiète autant sur le plan économique qu'écologique. Dans une tribune signée par plus de 20 ONGs et une centaine d'athlètes, les signataires posent les conditions de Jeux d'hiver respectueux de l'environnement et de la montagne, parmi lesquelles de "rendre accessible au moins 80% des sites en train ou autres transports en commun". Les 17 points rappellent aussi la fragilité du domaine skiable en France.

Selon le dernier rapport du GIEC, le réchauffement climatique devrait atteindre le point de non-retour d'une hausse de 1,5 degré d'ici... 2030. Avec la perspective d'un scénario à +4° d'ici 2100, qui provoquerait un risque "très élevé" de faible enneigement de 53% des stations des Alpes françaises. Une situation où la neige artificielle ne serait pas suffisante, en raison d'un manque d'eau pour la fabriquer et d'une température trop élevée pour la maintenir.

"Ce n'est pas parce que ces Jeux vont se dérouler dans des sites existants que ça en fera des jeux durables", défend Fabienne Grebert, présidente du groupe des Écologistes à la région Auvergne-Rhône-Alpes auprès de France Bleu. "En montagne, nous ne devons plus aggraver le problème (du changement climatique, NDLR) et ne devons plus augmenter la vulnérabilité des territoires et de leurs habitants", a réagi le collectif Résilience Montagne, qui exige un référendum national sur cette candidature.

Un eneigement qui pose toujours question

La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera assure elle pourtant que le projet français "ouvre des opportunités formidables (...) notamment pour l'avenir de nos montagnes, pour préparer son futur et préparer ses transformations notamment face au réchauffement climatique".

La tribune signée notamment par Mathieu Crepel, double champion du monde de snowboard, et Marie Dorin-Habert, médaillée d'or olympique de biathlon, rappelle que "si les Jeux olympiques et paralympiques d’Hiver ont un effet de catalyseur et d'accélérateur de politiques publiques, les investissements financiers et matériels importants qu’ils nécessitent (rénovation d’infrastructures sportives, de réseaux de transports, de logements etc.) sont une opportunité de mettre en œuvre une véritable transition des territoires de montagne."

Une transition qui doit "permettre d'assurer leur habitabilité à moyen et long terme" et "de faire évoluer l’industrie du tourisme d’hiver". Ces questions de l'eneigement à l'horizon 2030 sont loin d'être résolues puisque les retenues d'eau collinaire qu'imposent la neige artificielle sont des "désastres écologiques" rappellent les militants et aggravent les inégalités d'accès à l'eau pour les habitants.

Article original publié sur RMC Sport